Les éditions RETZ avaient lancé il y a deux ans CLEO, une nouvelle collection pour l’enseignement du français à l’école primaire, dont le Café avait dit tout le bien qu’il pensait. Son auteur, Antoine Fetet, s’est attelé à un programme courageux visant, malgré les limites des programmes actuels, à aider les enseignants à construire des activités intelligentes et efficaces en lecture, orthographe, grammaire et conjugaison.
En cette rentrée, Retz poursuit le chantier en lançant un environnement pour TBI (qui peut aussi être utilisé avec un ordinateur et un vidéoprojecteur) dans la même philosophie. Les concepteurs du logiciel ont pris le temps d’un travail approfondi avec l’auteur afin que les ressources numériques soient en phase avec la démarche des manuels. Ernesto Feltrin est formateur TICE à l’IUFM de Lorraine, Isabelle Champeau travaille dans l’ASH après avoir été personne-ressources TICE en circonscription. Le Café leur a donc demandé comment ils avaient travaillé pour la conception de ce nouvel outil.
Vous avez déjà vu travailler des enseignants avec des TBI. Selon vous, quels problèmes professionnels pose ce genre de nouvel outil aux enseignants, au-delà des problèmes de fonctionnement et de prise en main ?
– le temps de préparation des documents à utiliser avec le TBI
– la complexité des outils et des fonctionnalités mis à disposition
– la conception de scenarios pédagogiques autour du TBI : le TBI propose une nouvelle approche des contenus à enseigner, nécessitant des compétences techniques mais surtout des compétences pédagogiques particulières liées aux possibilités du TBI. Comment l’exploitation d’un document sur le TBI modifie-t-elle la pratique pédagogique ? Quelles fonctionnalités seront les plus pertinentes pour améliorer les apprentissages ? De nombreuses activités pédagogiques sont proposées sur les sites institutionnels comme PrimTice ou les sites académiques. Mais elles nécessitent à la fois une recherche parfois longue et une adaptation au niveau de classe, à la progression de chaque enseignant.
Vous avez développé l’outil interactif de CLEO. Pouvez-vous nous indiquer les grandes phases de votre travail et les aspects sur lesquels vous avez approfondi votre travail ?
Le développement d’ un outil interactif tel que Cléo TBI est parti d’une demande d’un des auteurs qui utilisait la méthode CLEO dans sa classe, en CLIS, pour des élèves handicapés. La démarche proposée par CLEO nécessitait des adaptations diverses, notamment au niveau de supports collectifs grand format et d’une manipulation renforcée pour étayer les apprentissages. De ces besoins est né l’idée d’une adaptation interactive de CLEO sur TBI C’est ainsi qu’Antoine Fetet et les éditions RETZ nous ont permis de mutualiser nos compétences et réflexions pour l’élaboration de CLEO TBI.
La première étape a été une définition claire de nos objectifs et des grandes orientations que nous souhaitions donner à Cleo TBI : un outil de travail collectif, s’appuyant sur la démarche pédagogique de Cleo CE1, simple à utiliser. Cleo TBI devait permettre un usage quotidien : le scénario pédagogique et les éléments nécessaires à sa mise en oeuvre devaient être à la disposition de l’enseignant à chaque séance et devaient s’appuyer sur les interactions dans le groupe classe.
Ensuite, la conception de Cleo TBI a débuté par l’appropriation « approfondie » de l’ensemble constitué par le guide pédagogique et le fichier de l’élève de Cleo CE1. Nous avons considéré que Cleo TBI était un outil complémentaire, reprenant la démarche pédagogique proposée par Antoine Fetet. Nous avons donc naturellement repris les trois phases de travail de Cleo : découverte d’une notion, entrainement, réinvestissement.
Pour chacune des phases, nous avons chercher en quoi le TBI pouvait aider l’enseignant dans son travail, à savoir favoriser les apprentissages des élèves. C’est dans cet esprit que nous avons proposé les activités à notre éditrice.
Ensuite, nous avons entrepris l’écriture de chacune des 180 activités : chacun des deux auteurs décrivait une activité, puis en proposait le contenu à l’autre qui réagissait, amendait, corrigeait. Les éléments du guide TBI ont été écrits en même temps sous forme synthétique. Dans cette étape, nous avons travaillé à partir de diapositives électroniques : schéma du contenu de chaque écran et commentaires pour indiquer à la fois l’interactivité (par exemple : « les étiquettes sont mobiles » ou bien « boutons Afficher / masquer pour chacune des listes »), mais aussi le contenu de l’écran initial (par exemple « seul le texte de gauche est visible au départ ») et enfin les indications d’ordre pédagogique (« avec le stylet, entourer les terminaisons des verbes »…)
Ensuite l’activité décrite est envoyée à l’éditrice dont le travail est essentiel : outre le travail de relecture, elle coordonne l’ensemble de l’équipe (auteurs, maquettiste, développeurs) et s’assure que le projet progresse selon un échéancier déterminé.
Les activités sont ensuite transmises à une équipe de développeurs qui programme les activités en Flash. Commence alors le long travail de relecture et de correction. Nous relisons et corrigeons chaque activité fonctionnelle et demandons parfois des modifications qui ont été le plus souvent réalisées.
Par rapport aux autres outils que vous avez déjà testé, le vôtre vous parait-il avoir des spécificités ?
Cleo TBI a été dès l’origine pensé pour le TBI. Nous croyons que c’est un des premiers produits conçus de cette manière. On a travaillé en pensant constamment à une classe où le TBI serait devenu l’outil de travail régulier de l’enseignant.
Nous avons essayé de concevoir les activités qui favorisent (nécessitent même) l’intervention des élèves au tableau, des échanges verbaux et des interactions entre les élèves et avec l’enseignant. Cleo TBI ne peut être utilisé seul, sans intervention de l’enseignant. Il ne peut être utilisé sur un ordinateur par un élève seul : ça n’a pas de sens. Cleo TBI ne remplace pas les éléments existants, mais les complète.
Nombre des situations proposées ne comportent pas de bouton de « validation » comme on le trouve souvent dans les exercices interactifs. Pour quelle raison ?
Cleo TBI est un outil d’enseignement collectif : l’enseignant l’utilise dans toutes les activités, avec l’ensemble de la classe ou un groupe d’élève. Avec Cleo TBI, il nous paraissait évident que la validation des réponses des élèves devait s’effectuer pendant l’activité, soit par l’enseignant, soit par les autres élèves. L’ordinateur n’intervient pas dans la validation des réponses car ce n’est pas son rôle dans l’usage pédagogique que nous avons envisagé. Lorsqu’un élève place côte à côte des syllabes pour former un mot, l’enseignant a le moyen de lui faire découvrir une éventuelle erreur, par une relecture ou par l’intervention des autres élèves qui peuvent être sollicités. Comme nous l’avons expliqué ci-dessus, ce sont les interactions entre les élèves et avec l’enseignant qui permettent de construire les apprentissages : l’action de l’élève sur le TBI est accompagnée d’une verbalisation de l’action, d’une justification, d’une explicitation. L’ensemble de la classe participe à ces échanges oraux.
L’absence de sons suit cette même logique : ce sont l’enseignant et les élèves qui oralisent.
Nous souhaitions proposer aux enseignants un outil facile à utiliser et qui ne soit pas trop déstabilisant par rapport aux outils habituels. Nous avons « scénarisé » les apprentissages en utilisant au mieux (on l’espère !) les potentialités du TBI et en décrivant une démarche pédagogique qui donne une place importante à l’activité de l’élève et aux interactions entre les élèves. Mais nous avons souhaité que l’enseignant reste le moteur essentiel des apprentissages et qu’il soit au coeur de l’action pédagogique et didactique. Il dispose d’une marge de manoeuvre importante dans la gestion de l’activité, qu’il peut guider selon son propre modèle pédagogique.
La présentation de la démarche de Cléo
Cléo TBI
http://www.editions-retz.com/notice-1578.html
