Bibliographie
Madame FATOU Françoise exerce dans l’éducation nationale en tant qu’infirmière scolaire depuis 1993 après avoir occupé différents postes dans le secteur privé depuis son diplôme d’état (DE) en 1981.
Sa carrière dans le secteur public d’éducation est désormais bien étoffée, elle a travaillé en collège ZEP, Zone sensible, en lycée, à l’Université et désormais dans un lycée général et technologique. Nous avons souhaité l’interviewer sur ses expériences mais aussi pour mettre en perspective son travail dans les différents établissements et sur les approches éventuellement divergentes selon les lieux d’exercice. Nous souhaitions aussi connaître son point de vue sur ce qui rassemble et différencie son travail avec celui d’un conseiller principal d’éducation et si les liens qu’elle tissait avec l’équipe vie scolaire dépendait notamment des établissements.
Gardy BERTILI : Pourquoi avoir choisi d’être infirmière ?
Françoise FATOU : Depuis l’âge de 6 ans, j’ai été attirée par ce métier sans même savoir en quoi il consistait réellement. Je n’ai jamais été déçue ni découragée.
GB : Quelles sont les qualités requises indispensables d’une infirmière scolaire ?
FF :Une infirmière scolaire doit faire preuve de beaucoup de patience, d’écoute et savoir quoi faire des dires des élèves. Elle doit savoir se former même pendant son temps libre, avoir de bonnes relations, expliquer aux élèves ses choix, ses décisions et expliquer à toute l’équipe mais aussi aux parents d’élèves.
GB :Quelles approches différentes entre le fait d’exercer en ZEP ? En LP ? En LGT?
FF : Les activités sont les mêmes mais dans les ZEP il faut faire preuve davantage d’attentions aux élèves. Il faut même avoir des antennes et être au courant de tout pour pouvoir agir et réagir efficacement.
GB : Le travail avec les CPE et la vie scolaire est-il différent et en quoi ?
FF : Non, le travail d’équipe est primordial et indispensable quelque soit le lieu d’exercice.
GB : Quels regards les enseignants jettent-ils sur l’infirmière ? Docteur des âmes ? Fuite des cours ? Contre-pouvoir ? Manière de les garder en dehors de la santé des élèves ?
FF : Peut-être un peu contre-pouvoir, c’est pourquoi le travail d’équipe est indispensable pour ne pas aller contre les dires d’un professeur plutôt les expliquer et voir ensuite avec le professeur si les propos étaient trop vifs.
GB : Le secret professionnel est-il irréductible ?
FF : Avec le secret professionnel strict, on ne peut travailler avec personne, il faut donc le moduler.
GB : Les parents soutiennent-ils souvent le travail de l’infirmière ? Comme vous associez-vous à eux pour aider les enfants ?
FF : Essayer de mettre en place un travail d’équipe, dire que l’on est ni d’un côté ni de l’autre. Soutenir l’effort des parents auprès de leur enfant. Il faut avoir des contacts réguliers avec les parents en cas de difficultés.
GB : Les attentes des CPE et de la vie scolaire sont-elles différentes vis-à-vis de vous selon les établissements ?
FF : J’essaie de travailler étroitement en équipe, cela rassure tout le monde.
GB : Pourquoi les élèves viennent-ils à l’infirmerie ?
FF : Au collège : souvent pour échapper aux cours. Il faut donc faire la part des chose : le petit rigolo ou celui qui souffre
Au lycée :, ils ont grandi et ont pris la mesure des enjeux, ils viennent quand ils ne peuvent plus faire autrement.
GB : Les élèves utilisent-ils différemment les services de l’infirmerie selon le lieu d’exercice?
FF : Oui. Certains professeurs aussi. Au collèg,e des collègues utilisent l’infirmerie comme une super permanence quand les élèves sont très agités. Cela fait une exclusion de cours sans le dire.
GB : Que pensez-vous de la politique de santé scolaire actuelle ?
FF : Il est toujours d’actualité de supprimer les infirmières de l’éducation nationale pour les mettre à disposition des régions. Il n’y a pas vraiment de fil directeur. On nous demande de réduire la violence mais sans moyens en formation. On nous demande de plus en plus dans nos missions, il nous faut travailler par priorité. Tout faire est impossible. Tout est théorie sans tenir compte du terrain. Nous rendons des statistiques tous les mois, elles ne prennent en compte la demande de l’élève, la demande formulée et non la demande sous-jacente et encore moins le travail de l’infirmière qui en découle.
GB : Quelle efficacité pour combattre les grossesses d’adolescentes ? La prise de risque ? Les consommations de produits illicites ? Les conduites addictives ? Pour faire face à la santé mentale ?
FF : Ecouter, écouter, écouter, communiquer un maximum, il n’y a jamais de question idiote (c’est-à-dire sans fondement.
GB : Les actions de santé ont-elle des incidences, une efficacité sur les élèves ? Et si oui à quelles conditions ?
FF : On sait pertinemment que les actions de santé en groupe classe ont un retentissement de 2% et relèvent plutôt de l’information. L’efficacité est plutôt trouvée dans le « tête à tête » entre 2 individus. Il faut donc lors d’une action en groupe ouvrir vers un entretien individuel à tous ceux qui le désirent.
GB : Le CPE peut-il avoir un rôle à jouer sur dans les actions de santé et sur la santé physique et morale des élèves ?
FF : Oh oui ! Il y a une autre vision, une autre manière de faire. Quand l’infirmière et le CPE travaillent ensemble, cela empêche le nombrilisme.
GB : La personnalité du chef influe-t-il sur le travail de l’infirmière et son efficacité ? Comment ?
FF : Délicat. Il faudrait dans l’idéal une confiance mutuelle. J’ai toujours eu cette chance.