Echec de l’école ou échec de la politique éducative ?
Le récent rapport du Haut Conseil de l’Education sur l’école primaire, alimenté de plusieurs études dont celle réalisée par l’Irédu, pointe les difficultés de notre école de manière directe et condensée. Ce rapport a aussi le mérite de s’interroger sur les causes de ce constat en soulignant des points importants du fonctionnement de notre école. L’analyse des coûts et des résultats au cours du temps et au niveau international montre de façon nette que notre école primaire n’est pas suffisamment efficiente. En outre, le fait qu’une proportion non négligeable d’élèves (15% environ) connaisse des difficultés sévères à l’issue du primaire peut être réellement être considéré comme un échec de notre système scolaire.
Mais, au-delà des résultats concernant le niveau des élèves et la faible efficacité des dispositifs traditionnels proposés pour réduire la difficulté scolaire, ce qui mérite sans soute d’être le plus souligné dans le rapport du HCE, c’est le constat réalisé sur le pilotage de notre système éducatif. Des vraies questions sont posées sur la faible efficacité de la gestion pédagogique de l’école primaire dont l’exemple des cycles en est une illustration pertinente. Il s’agissait pourtant d’une réforme ambitieuse, ciblée sur les pratiques des écoles et des enseignants, qui présentait toutes les garanties pour gérer au mieux la diversité des parcours scolaires et les rythmes d’apprentissages des élèves. Or, sa mise en oeuvre peut être considérée comme un échec avéré. Bien d’autres exemples, non cités dans le rapport, peuvent nous interroger sur les modalités d’application de la politique éducative. C’est notamment le cas des pratiques d’évaluation des élèves qui restent majoritairement traditionnelles (avec la notation) et qui peuvent contribuer à marquer socialement la difficulté scolaire chez les jeunes élèves.
La responsabilité de ce dysfonctionnement, comme le souligne le rapport, est en priorité à rechercher du côté de la faiblesse du pilotage de proximité. L’encadrement, l’accompagnement, la formation des équipes enseignantes sur le terrain sont insuffisants et le niveau de responsabilité pédagogique attribué aux circonscriptions et aux IEN ne correspond plus à l’évolution de notre système scolaire. Il se pose alors la question du statut des écoles et de leurs directeurs, sujet certes sensible, mais qui ne peut faire l’économie d’une réflexion approfondie et concertée. On peut enfin s’interroger sur la date de publication de ce rapport ; la veille de la rentrée scolaire n’est sans doute pas une bonne période car les conclusions diffusées par les medias, qui se limitent souvent à quelques chiffres alarmants, peuvent provoquer des réactions d’inquiétude chez les parents et des sentiments de malaise chez les enseignants. Pourtant, la lecture du rapport du HCE témoigne davantage sur l’échec de la politique éducative que sur celui de l’école et de ses acteurs.
Bruno SUCHAUT
Directeur de l’Irédu-CNRS