Jacques Bernardin, le président du GFEN, introduit le sujet en rappelant quelques résultats d’enquêtes nationales ou internationales qu’il a analysés et dont il tire quelques « points faibles des pratiques ordinaires d’enseignement-apprentissage ». Les élèves français ne sont pas dans le fond des tableaux statistiques des pays européens, ils se situent dans une moyenne, mais ce qui est inquiétant, ce sont plutôt les écarts importants qui se creusent aux extrêmes entre les meilleurs élèves et les plus faibles. Entre deux enquêtes PISA, la France est passée de 16% d’élèves en difficultés à 22%.
Quand il s’agit d’interpréter, donner un avis, dès lors qu’on demande un investissement, les élèves français abandonnent, ne répondent pas, ont du mal à comprendre ce qu’on leur demande, n’ont pas confiance, disent qu’ils ne savent pas… toute une série de comportements qui montrent un « effet de système » et doivent poser question aux éducateurs (enquête de l’AFEV). Ce constat posé, Jacques Bernardin expose les faiblesses du système, selon lui mais aussi en référence aux travaux du réseau de chercheurs Reseida, Paris 8 entre autres, et pointe deux grandes tendances qui ont cours à l’Ecole.
Soit on est dans « l’indifférence aux différences » : dans une relation d’évidence par rapport au savoir, il y a une illusion de transparence des contenus et des situations. Les consignes sont données trop furtivement, sans expliquer les enjeux de l’apprentissage. Cela entretient des malentendus. Au niveau des contenus, on glisse peu à peu vers des consignes simplifiées et l’activité de l’élève en difficultés n’est plus la même. L’essentiel est de « faire et aller jusqu’au bout de la tâche », sans se préoccuper de réussir pour comprendre. La deuxième faiblesse du système est à l’opposé de la première : surestimer les différences selon des niveaux et des capacités présupposés. A ce moment-là, on est dans le guidage renforcé, la décomposition de la tâche, l’individualisation comme mode royal de fonctionnement et comme conséquence l’isolement des élèves. « Encore une fois, on aboutit à la même question : quels contenus sont réellement enseignés ? », dit Jacques Bernardin qui remet bien ainsi la question des savoirs au centre des préoccupations.
En même temps il précise les contenus de la journée basée sur des savoirs « fondamentaux », lecture, avec Roland Goigoux, mathématiques, avec Roland Charnay. Les ateliers eux aussi sont axés sur les mêmes thématiques. A lire leurs intitulés les objets de travail sont pointus :
– du comptage égyptien… à l’orthographe du futur des verbes
– de la mesure des longueurs aux nombres décimaux
– apprendre à catégoriser en géométrie
– passer du geste au concept, démarche vers l’abstraction en technologie
– lire et comprendre un énoncé mathématique
Où l’on voit que le savoir est une aventure humaine et qu’il est toujours vivant.
Où l’on voit aussi que pour comprendre le monde, on passe du faire au dire et au penser.
Isabelle Lardon
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