Meirieu réveille le débat sur l’école
« Etre à gauche, c’est refuser de désespérer de quiconque ». On croyait le « débat sur l’école » endormi par les évocations nostalgiques des conseils de discipline, du redoublement, de l’uniforme, de l’autoritarisme et de la non-mixité. Dans un bel entretien donné au Nouvel Observateur, Philippe Meirieu fait sonner le réveil par des propositions simples et concrètes. « Comment faire redémarrer l’ascenseur social? Comment faire émerger des élites dans les zones « sensibles »? Comment faire pour que les élèves et les familles qui se croient assignés à l’échec scolaire puissent reprendre confiance en l’école… On voit bien la réponse « libérale » qu’on peut.. apporter: « Créons dans les banlieues des établissements privés qui sélectionneront les meilleurs élèves et leur offriront un havre de paix où ils pourront, enfin, travailler et réussir. » Cette réponse aboutirait à la création de ghettos terribles, elle ferait éclater le creuset social de l’école républicaine. Pour ma part, je crois à une alternative progressiste, qui consiste à faire un effort particulier pour développer l’environnement culturel et les pratiques artistiques dans les établissements sensibles. C’est indispensable pour réconcilier les enfants avec les savoirs. Et c’est ce sur quoi, justement, le gouvernement actuel recule ». Le directeur de l’IUFM de Lyon remarque que la sélection précoce, préconisée par le gouvernement, est inefficace : « dans l’enquête Pisa où nous sommes au 13e rang, tous les pays qui arrivent en tête ont repoussé la sélection le plus tard possible et ont des professeurs qui enseignent plusieurs matières au collège. Ils y ont massivement développé les pratiques artistiques: exactement le contraire de ce que veut le ministre de l’Education Luc Ferry ». P. Meirieu appelle également à stabiliser et aider les enseignants des quartiers difficiles. Des propositions à débattre..
http://www.nouvelobs.com/articles/p2029/a216387.html
Nouvelle contribution au Débat du « Manifeste »
Quoi de mieux pour lancer le débat sur l’école que de s’attaquer à quelques lieux communs ? Le « Manifeste pour un débat public sur l’école » regroupe des chercheurs, des enseignants, des responsables de mouvements pédagogiques : Philippe Meirieu, Gilbert Longhi, Jacky Beillerot, Jean-Michel Zakhartchouk, Jean-François Vincent par exemple. Cette quatrième contribution visite quelques opinions « faussement simples ». Ainsi face à l’avalanche des appels au retour de « l’enseignement traditionnel », l’équipe du Manifeste rappelle que « En fait, si rendre l’élève actif ne suffit pas pour qu’il apprenne, c’est néanmoins une condition indispensable. Pour apprendre, les élèves doivent prendre des risques, oser décrire leurs représentations, les confronter à celles des autres, faire des essais et des erreurs, explorer, recommencer ». Autant de tâches complexes qui permettent de construire des connaissances quitte à prendre le temps de se tromper. Aux partisans des savoirs disciplinaires, ils opposent la nécessité du supradisciplinaire : « Le collège doit, à la fois, achever la construction du socle culturel dont les fondations ont été posées à l’Ecole primaire, et être un lieu de construction d’un projet de réussite pour chaque élève. Pour cela, il n’est certainement pas indispensable de rentrer, dès la sixième, dans des enseignements disciplinaires cloisonnés qui juxtaposent des connaissances plus qu’ils ne les articulent. Il est certainement préférable, au contraire, de rester, durant les deux ou trois premières années du collège, dans une logique pluridisciplinaire ou supradisciplinaire qui ancre les disciplines dans des projets qui leur donnent du sens. Rien n’oblige à ce que la structure des enseignements au collège soit la même en sixième et en troisième ». Ces réflexions arriveront-elles jusqu’au grand public ou celui-ci devra-t-il se contenter d’un « débat » à sens unique ?
Contact : jf.vincent@occe.net
Alain Juppé pour l’orientation précoce
« »L’enfant est au cœur du système éducatif », c’est-à-dire – si l’on décrypte – l’enseignant doit se borner à favoriser, de manière aussi neutre que possible, l’éclosion du génie qui sommeille en chacun de nos chérubins sans le traumatiser par une pédagogie trop directive ». Dans une tribune du Figaro, Alain Juppé mobilise les bons vieux clichés pour faire passer son message. Ainsi il évoque « la méthode globale », déshonneur des pédagogues, et la théorie des ensembles, ou les méthodes actives d’aujourd’hui : « En maternelle, l’acquisition de la maîtrise graphique semble aujourd’hui prioritaire par rapport aux rudiments du déchiffrage des syllabes et des chiffres. Voulons-nous faire de tous nos enfants des peintres? ». Le président de l’UMP préconise l’orientation dès la 4ème et l’ouverture du corps enseignant à des personnes venues d’autres professions : « Le temps du tête-à-tête solitaire du maître polyvalent avec sa classe, six heures par jour, est peut-être révolu. Ne devons-nous pas multiplier à côté des professeurs d’autres voix, d’autres contacts, d’autres expériences? » .
http://www.lefigaro.fr/debats/20030919.FIG0333.html
La CFDT et l’école démocratique
» Il serait utile, avant toute chose, de mettre un terme aux querelles théologiques qui déchirent depuis trop longtemps la communauté scolaire : « Eduquer ou instruire ? », « La pédagogie ou le savoir ? », etc. L’école est lasse de ces débats d’école. Tous ceux qui ont l’expérience quotidienne du travail avec les adolescents le savent : on gagnerait un temps précieux à remplacer les « ou » par des « et ». » François Chérèque, Jean-Luc Villeneuve et Xavier Nau signent ensemble une tribune dans Libération du 22 septembre. Les trois responsables de la CFDT relèvent les difficultés du métier d’enseignant et le risque futur de pénurie de professeurs.
http://www.liberation.fr/page.php?Article=143719
Luc Ferry veut réformer les conseils de disciplines
« Tout ce qui peut contribuer à rétablir l’autorité morale des enseignants est essentiel ». Dans un entretien accordé au Parisien le 23 septembre, Luc Ferry confirme son intention de doubler le nombre d’enseignants dans les conseils de disciplines. Actuellement composé de 3 représentants de l’administration, 2 enseignants, 1 ATOS et 5 parents et élèves, le conseil de discipline pourrait passer à 15 membres dont 4 administratifs, 1 élu local, 4 enseignants et 5 parents et élèves. La mesure devrait être bien accueillie par le SNES qui, la veille, avait regretté « qu’il y ait moins de professeurs que d’élèves », situation qui n’existe qu’au lycée. Mais le conseil est-il obligatoirement coupé en camps ennemis opposant profs et élèves ? S’il est clair qu’on ne peut apprendre que dans le calme et l’ordre, d’autres questions mériteraient réponse : la sanction suffit-elle à établir l’autorité ? Les problèmes de l’école peuvent-ils se résoudre dans les règlements intérieurs ? Les systèmes éducatifs les plus disciplinaires ont-ils la meilleure efficacité ?
http://www.leparisien.fr/home/info/vivremieux/article.htm?articleid=210899594
http://www.education.gouv.fr/sec/chefdet/fiche33.pdf
http://actu.voila.fr/Depeche/depeche_emploi_030922092733.38liqc4n.html
La FCPE contre la réforme des conseils de discipline
« En renforçant sans nuance le poids de l’institution scolaire au sein des conseils de discipline, le Ministre introduit une logique suicidaire d’affrontement. Il suspecte a priori les délégués des usagers de laxisme et de complaisance et tente d’étouffer leur voix en créant les conditions pour imposer les choix de l’institution ». La FCPE réagit avec vigueur à l’annonce par Luc Ferry d’un doublement du nombre d’enseignants au conseil de discipline. Pour la FCPE, « le Ministre prétend lutter contre la violence : en réalité, il met en place lui-même les conditions de la violence, donnant en exemple aux jeunes un mode de résolution des conflits fondé sur le règlement de comptes dont ils seront les premières victimes. Face à l’arbitraire, les familles et les jeunes n’auront d’autre solution que de faire appel à la justice pour faire respecter leur droit ».
http://www.fcpe.asso.fr/article.aspx?id=306
Le voile et la liberté religieuse
« La liberté religieuse constitue un acquis fondamental des sociétés occidentales. Elle implique la possibilité de manifester publiquement sa foi, y compris dans les lieux publics. » Irène Jami, enseignante, Anne-Sophie Perriaux, Yves Sintomer, universitaires, et Gilbert Wassermann, rédacteur en chef de « Mouvements », signent une tribune dans Libération, qui appelle à tolérer le voile islamique à l’école. « La laïcité doit s’interpréter aujourd’hui comme une neutralité de l’Etat à l’égard des diverses religions, et non comme une morale se posant en rivalité avec elles ». Ils remettent en question l’assimilation du voile au refus de la parité : les motivations des jeunes filles voilées seraient plus complexes et variées. C’est donc la haine religieuse qui pousserait à refuser le voile : « Le fantasme d’un péril islamiste masque les véritables problèmes : la situation sociale des banlieues, la crise d’une école en manque d’un nouveau modèle, les discriminations dont souffrent les populations d’origine immigrée, les inégalités entre hommes et femmes qui persistent dans toute notre société. C’est moins l’islam politique que le racisme et les discriminations ethniques qui constituent aujourd’hui le véritable danger ». Le même quotidien publie le texte d’une enseignante que ses convictions de prof ont conduit à la position inverse : » Culturellement, statutairement, cet éveilleur d’esprit a encore la force de résister aux sirènes d’un réalisme de renoncement. En cela, il se dissocie de la France qui s’en va. Le prof, même s’il a l’oeil sur sa feuille de paie, le nombre de ses annuités et la ligne bleue de la retraite, reste un humaniste qui voit dans la prolifération insidieuse des menaces, à peine ou ostentatoirement voilées, s’effilocher la trame de ses valeurs républicaines. Il faut le soutenir en légiférant, et sans tergiverser. »
http://www.liberation.fr/page.php?Article=146091
http://www.liberation.fr/page.php?Article=146090
Du voile et de la laïcité
Au moment où deux jeunes lycéennes d’Aubervilliers sont provisoirement exclues en raison du port du voile, Education & Devenir ouvre le débat sur le voile à l’école par une table-ronde opposant Jean-Pierre Obin, ancien directeur d’IUFM, et Jean-Pierre Rosenczveig, magistrat et président de DEI-France. Pour J.-P. Obin, « nous assistons aujourd’hui a un réinvestissement du signe par des courants religieux musulmans fondamentalistes (dont le plus puissant, le wahhabisme) dans une lutte pour la suprématie interne sur le monde musulman et, pour leurs plus fanatiques partisans, dans une utopie de destruction de la modernité occidentale et de transformation de la planète en une vaste théocratie totalitaire… Pour moi la question du voile est donc un combat, ou plutôt une toute petite partie d’un combat, entre la tradition et la modernité, entre l’Archaïsme et le Progrès, entre l’obscurantisme et les Lumières, entre la liberté et le totalitarisme ». Ce à quoi J.P.. Rosenczveig oppose la loi : « L’Etat doit garantir à tout enfant – mineur de moins de 18 ans – l’expression des convictions religieuses dès lors que cette expression ne porte pas atteinte à l’ordre public. Pourquoi l’ordre public est-il troublé à Creil et ne l’est-il pas dans nombre d’endroits où des jeunes filles portent (un temps) le tchador? En d’autres termes nous sommes sur une liberté fondamentale – l’expression des convictions religieuses – à laquelle il ne peut être porté atteinte que dans des conditions très strictes dans l’intérêt général. La jurisprudence dégagée au fil de l’histoire par le Conseil d’Etat colle bien avec ce texte qui nous lie tous… Le laïc que je suis et qui au nom de la laïcité tolère toutes les formes d’expression religieuse dès lors qu’elles me respectent ne peut pas supporter que soit traitée différemment telle ou telle religion ».
http://actu.voila.fr/Depeche/depeche_emploi_030923182552.5vuw0k68.html
http://education.devenir.free.fr/Tribune.htm
Toujours le voile
« Le fait que de plus en plus de jeunes filles décident de porter le voile interroge la société. Cela ne veut pas dire qu’elles n’ont pas leur place dans l’école de la République. Les encourager à partir dans des écoles confessionnelles ne réglerait rien ». Le père des deux jeunes filles exclues provisoirement d’un lycée d’Aubervilliers annonce qu’il portera plainte si ses filles sont exclues. C’est l’occasion de travailler le concept de laïcité. L’association Education & Devenir nous propose, à coté du débat évoqué le 24 septembre, une page qui accueille réflexions et liens sur ce sujet. De son côté, Le Monde interroge les autres systèmes scolaires européens. France, Belgique et Turquie exclus, « dans les autres pays, le voile ne donne généralement pas lieu à polémique ».
http://www.liberation.fr/page.php?Article=144269
http://education.devenir.free.fr/Laic.htm
http://www.lemonde.fr/article/0,5987,3226–335303-,00.html