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L’expérience d’un blog collaboratif piloté : « Sur le métier » | ||||||||
« Un des moyens qu’a l’enseignant pour se construire une posture réflexive sur son métier est l’écriture professionnelle »
Recourir aux multiples possibilités offertes par Internet pour concevoir ses cours, les enrichir, les échanger fait maintenant partie des pratiques courantes d’une part croissante des enseignants. L’usage du traitement de textes, la recherche documentaire, la consultation de sites spécialisés sur lesquels on peut trouver des exemples, des références et des cours « clés en mains », ne sont désormais plus réservés à quelques initiés mais se généralisent.
Parmi les sites auxquels l’enseignant peut accéder, on peut distinguer les espaces de liberté, sur lesquels chacun peut consulter, télécharger, des espaces institutionnels proposés par les académies. Ces derniers, garants de la conformité aux textes officiels et de la qualité pédagogique ne peuvent accueillir toutes les contributions et ne mettent en ligne qu’avec prudence, des travaux validés.
L’article qui suit se propose d’examiner comment, pourquoi et jusqu’à quelles limites on peut concevoir un espace de liberté sur un site académique. La plupart des exemples seront empruntés au français et à l’histoire et géographie en lycée professionnel puisque c’est sur le site « lettres et histoire géographie en lycée professionnel » de l’académie de Lille qu’est tentée l’expérience de ce que le groupe de production académique préfère nommer un « bloc-notes» pour éviter l’anglicisme « blog ».
Précisons bien d’abord à qui est destiné ce bloc-notes et plus généralement le site. Le PLP Lettres Histoire, Professeur de Lycée Professionnel est un enseignant par principe bivalent (ou trivalent si l’on envisage l’histoire et la géographie comme deux disciplines distinctes). On lui confie généralement l’enseignement de l’ECJS et son emploi du temps comprend une part non négligeable consacrée aux projets et actions de soutien. Parfois de formation littéraire, mais plus souvent historien ou géographe, linguiste, sociologue, voire philosophe, on l’a bien compris, il est tout sauf un spécialiste et à ce titre, ou à cette absence de titre, il aura sans doute plus qu’un autre, beaucoup à chercher et à apprendre sur de nombreux aspects de son métier.
Que trouvera-t-il sur les sites disciplinaires institutionnels ? D’abord et bien sûr les textes officiels, des communications, quelques exemples de progressions, un certain nombre de séquences, des bibliographies, des recherches documentaires. Mais un site institutionnel ne peut proposer que ce qui a été validé, est conforme aux textes et parfaitement construit. Cette obligation contraint à la rigueur, parfois même à la pauvreté et peut rendre les sites institutionnels peu attractifs face au foisonnement et à la liberté des sites pédagogiques sur lequel on trouvera sans difficulté « le » questionnaire, « le » schéma de cours qui permettra demain d’aborder une nouvelle de Maupassant , « l’argumentation », « la lecture de l’image » ou « l’appel du Général de Gaulle du 18 juin 1940» mais aussi le témoignage et le cours d’un collègue qui a fait étudier à ses élèves des textes de chansons de « Rap » et qui assure que « ça a marché ».
Chacun le sait pourtant, l’enseignement n’est pas fait que de séquences. Rien ne garantit qu’un texte, un cours, une étude qui a séduit une classe en intéressera une autre. Parce que notre métier n’est pas que contenu, il est précisément le lieu d’interactions aussi riches que mouvantes. Une fois choisis le support et la problématique, une fois la séquence construite, le métier d’enseignant consiste aussi à s’interroger sur la mise en œuvre, sur les moyens à se donner pour que les élèves « entrent » dans les activités proposées, pour que les textes, les documents soient saisis dans toute leur portée. Une fois le paquet de copies corrigé, il est nécessaire de trouver le dispositif qui permettra de faire comprendre les erreurs. Notre métier est fait d’interrogations : pourquoi cet élève qui ne s’exprime jamais va-t-il aujourd’hui prendre la parole ? Pourquoi a-t-il retenu, oublié ? Lorsqu’on enseigne, l’élève est là, en personne ; ce n’est plus l’élève virtuel du moment de la préparation et de la conception du cours et l’enjeu est précisément qu’il ne se limite pas à répondre aux questions mais aussi qu’il comprenne pourquoi elles lui ont été posées et qu’il s’implique dans le déroulement de la leçon.
Un des moyens qu’a l’enseignant pour se construire une posture réflexive sur son métier est l’écriture professionnelle. Pourtant, si l’on excepte le « mémoire professionnel » rédigé par les stagiaires de l’IUFM, rares sont les moments où le professeur prend le temps de mettre son métier à distance, de recourir aux interactions lecture/écriture et ainsi de dépasser le quotidien, d’analyser ses erreurs ou ses réussites.
C’est à partir de ces réflexions qu’est né ce site que le Groupe qui travaille autour du site académique « Lettres-histoire en lycée professionnel » a d’abord choisi de nommer une « Rubrique » et qui a progressivement pris la forme d’un « bloc-notes » institutionnel dénommé Sur le métier. La volonté première est d’en faire un espace sur lequel on puisse trouver et réagir à tous les aspects du métier difficiles à saisir. Ce sera le compte-rendu de celui qui a trouvé dans sa passion de l’histoire, l’énergie et l’enthousiasme qui lui ont permis de faire aimer à ses élèves Tête de nègre de Daniel Picouly ou encore les propositions d’une enseignante pour une chronologie « orientée » par les intérêts des élèves de Baccalauréat Professionnel Electro-ménager.
Qui dit bloc-notes dit obligatoirement lecture, interactions et réactions. Or, le site institutionnel est là pour former, guider et valider. Outre le peu d’intérêt d’un « blog » qui ne serait qu’une reprise du Bulletin Officiel, on voit bien la difficulté et le danger de limiter l’expression des collègues.
Les choix qui ont été faits par le groupe sont les suivants. Les « articles » et autres « contributions », « réactions », « coups de cœur » produits par les membres du groupe sont mis directement en ligne après validation par les corps d’inspection. Les réactions à ce qui est écrit ne passent, elles, que par le filtre du « webmestre », chargé de n’éliminer que ce qui serait sans rapport avec les classes ou la pédagogie.
Le « bloc-notes » fonctionnera-t-il ? Sans doute « validation » et « filtres » sont-ils des obstacles à la création d’un espace d’expression. Mais l’expérience mérite d’être tentée, puisque, qu’elle réussisse ou non, il nous restera un florilège d’expériences, de comptes-rendus, de réflexions, qui auront sans aucun doute fait avancer la réflexion pédagogique dans notre académie.
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