Que font 320 enseignants et personnels de laboratoire de physique-chimie réunis à Brest ? Jacques Vince, enseignant au lycée Dr Charles Mérieux de Lyon, nous confie son bilan de 4 jours de formation proposés par l’UdPPC à la fin du mois dernier. Révolution quantique, IA et analyse des eaux de mer étaient au programme.
Comme chaque année, l’UdPPC (Union des professeurs de physique et de chimie) propose en effet aux enseignants de physique et de chimie d’assister pendant 4 jours à des conférences, des ateliers, des visites de laboratoires ou d’entreprises… et des visites touristiques puisque le congrès visite une nouvelle ville à chaque édition. Ce fut Brest cette année. Le voyage au « bout de la terre » n’a pas empêché une forte affluence : avec plus de 320 participant·es, on est dans la moyenne haute.
Même si le bureau national de l’association délègue chaque année l’organisation à une section académique qui s’est portée candidate, il ne s’agit pas de tenir un « congrès de l’UdPPC », comme il s’est appelé pendant longtemps. Il y a près de 20 ans, dans un souci d’ouverture, il est devenu le « congrès des professeurs de physique et de chimie », n’étant pas réservé aux adhérents de l’association (même si ceux-ci bénéficient de frais d’inscription réduits). Le périmètre de participation est sensiblement le vivier potentiel de l’association : tout enseignant de physique-chimie, du collège au supérieur, exerçant dans le public ou dans le privé, peut devenir congressiste le temps de quelques jours. En outre, les personnels de laboratoire, si importants pour la discipline et pourtant si précarisés et en voie de disparition, peuvent assister au congrès. De même, des professeurs des écoles qui seraient particulièrement investis sur les apprentissages scientifiques peuvent s’inscrire. C’est donc bien toute une communauté dont le point commun est l’enseignement de la physique et de la chimie qui se retrouve pendant ces 4 jours.
Situé en début de 2e semaine des congés d’automne, le congrès suit généralement de quelques jours les « Journées nationales de l’APMEP » qui proposent l’équivalent pour les enseignants de mathématiques, et précèdent celles des professeurs de SVT fin novembre.
Un congrès ou une formation ?
Ici, l’objectif principal n’est pas de voter pour départager des motions, de définir la ligne de l’association pour l’année à venir et de donner mandat à un bureau. Cela ne veut pas dire que les débats sur l’état de la discipline ou sur les conditions d’exercice n’ont pas lieu. Mais ils se tiennent en ateliers (qui peuvent porter spécifiquement sur telle ou telle réforme) ou lors de l’assemblée générale plénière de l’UdPPC de fin de congrès. Et le congrès est aussi systématiquement marqué par une séance inaugurale lors de laquelle, par la voix de son ou sa président·e, l’association explicite ses craintes, ses revendications mais aussi ses propositions devant un ou plusieurs Inspecteurs généraux qui peuvent y répondre dans la prise de parole qui leur est proposée. À l’ordre du jour des inquiétudes et « points de frottement » cette année : les formations initiale et continue, la densité du programme de spécialité de terminale, le devenir des séries technologiques, et les groupes de niveau, fermement dénoncés.
Au-delà de ces moments qui permettent de rendre compte des problématiques en cours pour la profession, quels sont les objectifs du congrès et pourquoi peut-on affirmer qu’il contribue au parcours de formation des enseignants ? Il s’agit d’allier mise à jour de connaissances, échanges entre pairs et ouverture sur la dimension applicative de la discipline. Il s’agit aussi de voir la science en train de se faire (via les conférences mais aussi les visites de laboratoire) et les applications industrielles et technologiques (via les visites d’entreprises). Le congrès alterne ainsi quelques conférences plénières aux thématiques variées, des ateliers davantage tournés vers la pratique enseignante, et de nombreuses visites. Il n’est pas rare qu’un Prix Nobel rende visite au congrès. Cette année à Brest Alain Aspect a évoqué la 2e révolution quantique. Les thématiques actuelles ne sont pas en reste : Axel Jean est venu détailler les enjeux de l’IA pour nos pratiques. Dans un congrès placé sous le signe de la mer, l’analyse des eaux de surface des océans (Rosemary Morrow) et leur pollution par les plastiques (Ika Paul-Pont) ont aussi été traités en conférences plénières. Les disciplines connexes sont également souvent convoquées : avec cette année par exemple une conférence sur les premières traces de vie sur Terre (Stefan Lalonde).
La reconnaissance du congrès comme une action de formation reconnue par l’Institution est une revendication de longue date de l’UdPPC, qui tient cependant à rester totalement maitresse du contenu. Cette indépendance a parfois été avancée par les interlocuteurs institutionnels pour ne labelliser le congrès comme une formation. Elle devrait plaire aux directeur·ices d’EAFC puisque se déroulant hors temps scolaire. Une telle reconnaissance permettrait la prise en charge des frais afférents (qui peuvent monter à 400 €). Au mieux, et de moins en moins, quelques rares académies délivrent un ordre de mission sans frais, d’autres renvoyant à une demande individuelle à faire à son chef d’établissement…
Les congrès des associations disciplinaires sont-ils en passe de devenir les dernières actions de formation qualitatives non découpées par tranche d’une heure et demi (le soir, en visio) ? Et ceci hors du giron institutionnel ? Ce serait un comble au regard des besoins que chacun·e reconnait.
Mais quelles que soient les évolutions futures, et le besoin ne diminuant pas, l’UdPPC donne déjà rendez-vous l’an prochain à Strasbourg du 28 au 31 octobre 2025, puis, et ce sera inédit, à Bastia en 2026 !
Jacques Vince