Nathalie Bassière est AVS (Auxiliaire de Vie Scolaires), métier connu aussi sous l’appellation d’AESH (Accompagnant des Élèves en Situation de Handicap). Un métier dont les contours restent encore méconnus pour beaucoup. « Notre métier consiste à apporter à l’enfant à besoins éducatifs particuliers un accompagnement personnalisé en milieu scolaire pour compenser et surmonter les difficultés liées à ses troubles, en l’accompagnant vers l’autonomie et la confiance en lui » nous explique Nathalie dont le livre « Moi, AVS un accompagnement de l’élève en situation de handicap » nous permet de partager le quotidien. Comme pour beaucoup de ses collègues AESH ou AVS, c’est par hasard qu’elle a atterri dans l’accompagnement des élèves en situation de handicap. Aujourd’hui, elle demande la reconnaissance de son métier.
Avez-vous été formée avant de prendre votre poste ?
Il existe bien 60 heures de formation obligatoires mais en général, elles ont lieu quelques mois après l’embauche. On est donc « parachutés » dans un milieu où l’on apprend sur le terrain. Il existe des possibilités de formations, souvent proposées en octobre et sur inscription. Il n’y a pas assez de communication autour de ces dernières, elles sont facultatives, mais je les conseille vivement car elles sont pilotées par des spécialistes de la santé. Par méconnaissance, peu d’AVS y participent et très peu d’enseignants également. Je me suis basée sur ces enseignements, qui traitent vraiment des troubles de l’enfant, sur le terrain.
Ca n’a pas dû être évident. Aujourd’hui, votre métier vous plait ?
Oui, j’ai la chance d’avoir un métier qui a du sens. Nous, AVS, sommes la clé de voûte permettant à l’élève en situation de handicap de trouver sa place dans la classe et dans sa scolarité, de pouvoir s’épanouir et de progresser vers l’autonomie. Les élèves que j’accompagne ayant beaucoup d’attentes, mon investissement est intense pour pouvoir répondre à leurs besoins éducatifs particuliers avec discernement, efficacité et toujours avec le sourire. Ma présence rassure l’élève, l’équilibre et lui permet de trouver sa place dans la classe. J’aime à penser être une passerelle. J’accomplis ma mission avec justesse et respect, j’ai la chance de faire partie intégrante de l’équipe éducative. Il y a une forme de complémentarité entre nos différentes fonctions. Le sourire et le bien-être des élèves constituent une richesse unique et valident ma mission professionnelle.
Pour autant, vous devez rencontrer des difficultés ?
Le plus difficile dans ce métier reste de ne pas être reconnue tant au niveau de la société qu’au niveau de l’Éducation nationale. Ce métier est précaire alors que l’investissement qui est demandé est immense pour une bonne prise en charge du handicap en milieu scolaire. On ne peut aimer ce métier que pour sa dimension humaine, l’aspect financier est un véritable frein. Il participe au manque de reconnaissance. Et puis, une autre difficulté, c’est la méconnaissance de nos missions. Peu de personnes – enseignants et familles – les connaissent. Mon livre ambitionne une meilleure compréhension afin d’y palier.
Autre difficulté, c’est le nombre d’enfants que l’on doit prendre en charge. Par exemple, accompagner un élève 6 heures par semaine, c’est insuffisant pour qu’il progresse vraiment. Cette année, je m’occupe de six élèves – dont un en 6ème, un en 5ème, un en CE2, trois en CP. Ces enfants ont des troubles de l’apprentissage différents et me demandent donc une adaptation constante. Je dois aussi être en phase avec tous les niveaux de la maternelle au lycée, être compétente dans toutes les matières pour être efficace dans l’accompagnement auprès de chacun d’entre eux. Je dois, par ailleurs, m’aligner sur les exigences et le fonctionnement de chaque enseignant.
Cette année, j’ai été associée dès la rentrée scolaire dans la rencontre parents-enseignants, c’est un gain de temps considérable. Auparavant, je n’étais pas conviée et n’avais que peu d’informations sur les troubles de l’élève, je perdais donc du temps à les identifier.
Et pour finir, la prise en charge de certains élèves est plus difficile que pour d’autres. Ils peuvent être en crise, et demandent donc une posture et des mots justes.
Ainsi, être AVS ou AESH, c’est un vrai métier. Vous le revendiquez ?
Le métier d’AVS est un métier à part entière qui reste méconnu car nos missions et fonctions ne sont pas valorisées. Il est difficile de trouver sa place au milieu des préjugés.
L’école inclusive impose une double inclusion, celle de l’enfant mais aussi celle de l’AVS. Les enseignants ne sont, en général, pas suffisamment informés sur nos fonctions et ne sont pas formés à travailler avec les AVS. Ils s’adaptent, comme nous.
Il est essentiel de comprendre que la compensation humaine (l’AVS) est un levier important de la réussite de l’enfant dans sa scolarité. Reconnaître notre métier participe à l’évolution du regard sur le handicap en milieu scolaire et plus largement dans la société. Il est indispensable de travailler ensemble avec l’équipe éducative. L’AVS facilite le travail de l’enseignant au sein de la classe, nous avons une connaissance fine des élèves que nous accompagnons. Nous sommes une sorte de béquille humaine.
Par le biais de mon livre, je représente l’AVS sur le terrain dans la complexité du métier, dans sa richesse humaine et propose au lecteur une invitation en classe. Il peut alors prendre conscience, au fil des pages, que c’est un métier à part entière qui ne s’improvise pas mais qui doit être exercé avec un savoir-faire professionnel, comme tout métier. La loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances a permis une meilleure prise en charge des enfants en situation de handicap par l’AVS. Je témoigne de la réalité du terrain et de ses difficultés.
Propos recueillis par Lilia Ben Hamouda