Avec « 100 000 profs pour l’Afrique », le ministère des affaires étrangères et l’Institut de France veulent « consolider la place du français en Afrique » et assurer « l’avenir de la Francophonie ». Et pour cela, le ministère compte sur le numérique pour former les milliers de professeurs de français dont le continent aura besoin. Présenté le 20 mars, « 100 000 profs » déclinera une plate forme de formation, une banque de ressources, un réseau social pour sauver la place du français en Afrique. Mais les efforts seront-ils à la hauteur du défi ?
« L’avenir de la francophonie se joue en Afrique ». De Yamina Benguigui, ministre en charge de la francophonie, à Laurent Fabius ou Xavier Darcos, président de l’Institut français, les acteurs des « 100 000 profs » sont convaincus. Le nombre des francophones double tous les 25 ans et en 2050 ils devraient être plus de 700 millions et environ 600 millions en Afrique. Cela à condition que la transmission du français soit assurée dans des pays où le corps enseignant est vieillissant, qui ont beaucoup d’urgences et peu de ressources humaines ou financières. Laurent Fabius évoque « une course de vitesse entre les croissances démographique et éducative ». La France espère que le numérique permettra de la gagner. Il y a aussi ce qui n’est pas dit. C’est qu’en Afrique de l’est, des outils éducatifs puissants, mais anglophones, se mettent en place avec l’aide de pays du Commonwealth comme l’Inde. Et de fait, certains pays francophones lorgnent vers l’anglais.
Le programme « 100 000 profs pour l’Afrique » propose 4 projets numériques. Le plus avancé semble être Afripédia. Il s’agit d’une déclinaison de Wikipédia adaptée aux conditions locales. Wikipedia est proposé sur clé usb ou sur serveur wifi permettant ainsi de se passer de connexions Internet fluctuantes.
Le projet le plus ambitieux est « NumériFOS », une banque de ressources en français. L’Institut a décidé d’axer le projet sur le français professionnel, celui des affaires, de la santé, du tourisme par exemple. Il veut en faire la banque de référence. Développée avec le soutien de la Chambre de commerce de Paris, elle sera utilisée par les tuteurs africains pour la formation des enseignants.
La plateforme IFOS, développée aussi avec la CCI de Paris, servira à la formation à distance des enseignants africains. Elle utilisera des dispositifs de formation à distance libres de droits, gratuits et utilisables dans la fonction publique mais aussi dans les entreprises africaines.
Enfin, « 100 000 profs pour l’Afrique » s’appuiera sur le réseau social d’enseignants, IFProfs. Il mettra en relation les enseignants sur une base nationale mais permettra aussi des échanges entre enseignants francophones du monde entier.
Présenté par pas moins de 2 ministres, le projet est très ambitieux. Tiendra-t-il ses promesses ? Les projets sont dirigés par l’Institut français et financés par les affaires étrangères, avec le soutien de l’OIF, du CIEP et de partenaires privés comme TV5monde et la Fondation Orange. L’expertise du CIEP et de la CCI sont des appuis importants. Mais là aussi l’Etat invente de nouveaux réseaux au lieu de s’appuyer sur l’existant, souvent venu du terrain. Le financement prévu pour ces développements, moins de 4 millions d’euros, sera-t-il suffisant ? Quel est le prix de l’avenir de la francophonie ?
François Jarraud
Sur le site du Café
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