Par Alexandra Mazzilli de l’Association Aide aux Profs
Ce mois-ci, Aide aux Profs vous propose :
– de découvrir le parcours d’entrepreneur de Christophe Vacherand, ancien professeur agrégé d’E.P.S. qui travaille aujourd’hui en partenariat avec un grand groupe américain, spécialisé dans les domaines du bien-être et de l’anti-âge ;
– et de re-découvrir le parcours professionnel plein de surprises de Sonia Cottier Rodrigues, professeur des écoles, ancienne réflexologue plantaire et aujourd’hui en recherche d’opportunités dans les domaines de la lecture et de l’écriture.
Ancien enseignant d’Education Physique et Sportive, agrégé, Christophe est aujourd’hui Entrepreneur dans le secteur du Bien Etre/Anti-âge. Il ne regrette pas son choix, revendiquant une certaine liberté d’action et d’épanouissement au travail.
1/ Quelles études avez-vous suivies et pourquoi êtes-vous devenu enseignant ?
Je rêvais d’être pilote de ligne mais j’avais des problèmes de vue importants. Etant très sportif, j’ai donc suivi une formation universitaire ordinaire dans le domaine du sport : (à l’UEREPS ou Unité d’Enseignement et de Recherche d’Education Physique et Sportive, ancêtre de l’UFRSTAPS ou Unité de Formation et de Recherche des Sciences et Techniques des Activités Sportives et Physiques). Je suis surtout devenu enseignant par goût du sport à l’adolescence.
2/ Quel a été votre parcours de carrière dans l’Education Nationale ? Comment se sont passées vos premières années ?
J’ai passé mon CAPEPS à 21 ans (le Certificat d’Aptitude au Professorat d’Education Physique et Sportive, l’équivalent du CAPES dans les autres disciplines, ndlr), à la suite duquel j’ai été professeur de collège pendant quatre ans. Puis j’ai pris une disponibilité de trois ans pendant lesquels j’ai effectué un passage dans la Grande Distribution. Au bout de ces trois années, je suis retourné à l’enseignement, en Lycée Professionnel cette fois et j’ai passé et réussi l’agrégation interne. Je suis alors devenu notamment intervenant STAPS et IUFM avant un retour en lycée professionnel et une démission à l’âge de 49 ans.
3/ Que vous a procuré votre métier d’enseignant ?
Le métier d’enseignant, pour moi, c’est à la fois le plaisir de transmettre et les frustrations de ne pouvoir faire assez (classes surchargées, programmes inadaptés, élèves inadaptés au cursus et subissant les cours).
C’est aussi la crainte de la routine dans un système inadapté à la problématique actuelle de l’enseignement et de l’adaptation au monde moderne.
4/ Comment en êtes-vous arrivé à une situation de démotivation, avec l’envie d’une seconde carrière ? Quel est le déclic qui vous a fait quitter les élèves ?
Ce qui m’a poussé, c’est le désir d’entreprendre, la nécessité de vivre ma vie à 200%, de ne pas avoir de regrets. C’est sans doute quelque chose de bien ancré dans mes gènes…
J’ai ressenti un besoin de réelle LIBERTE !
La démotivation des élèves dans ce système inadapté génère la démotivation de l’enseignant, c’est ce qui m’est arrivé.
Enfin, la crainte de la routine a également été un très fort élément déclencheur qui m’a amené à la démission.
5/ En quoi consiste votre activité actuellement ?
Je suis Entrepreneur indépendant, et je développe des partenariats d’affaires dans le secteur du bien-être et de l’anti-âge avec des entrepreneurs indépendants qui décident de devenir acteurs de leur vie.
Mon activité se développe actuellement dans 18 pays et utilise le e-commerce.
6/ Quelles compétences pensez-vous avoir acquises dans l’enseignement, et lesquelles vous paraissent transférables et vous ont servi pour réussir votre reconversion ?
Ce que je retiens essentiellement de mon expérience d’enseignant, c’est la capacité de transmettre et avant tout le désir ardent d’aider les autres à réussir, ce que je continue à faire actuellement en proposant des partenariats d’affaires à des personnes de valeur, que j’accompagne dans leur entreprise et leur changement de vie.
7/ Comment s’est passée concrètement votre reconversion ? Quelles démarches avez-vous entreprises ? Etes-vous en disponibilité ou avez-vous démissionné ?
J’ai simplement demandé ma démission après avoir débuté dans le secteur de l’anti-âge.
8/ Avez-vous suivi un apprentissage, une formation pour vous perfectionner ? Comment s’est effectuée la prise en charge de votre formation ? L’Education Nationale finance-t-elle ce genre de projets ?
Bien évidemment, l’Education Nationale ne participe absolument pas au financement du projet, par contre, j’ai pu bénéficier de l’Indemnité de Départ Volontaire.
Formation personnelle et réelle volonté de réussir ont été les clés de ma réussite.
9/ Quelles sont les principales difficultés que vous avez rencontrées ou que vous rencontrez encore dans votre reconversion ? Combien de temps vous a-t-il fallu pour vous installer et en vivre ?
Ma reconversion a été rapide et m’a permis d’en vivre dès le début (j’ai eu la chance de connaître la rentabilité immédiate de mon projet qui comporte un risque 0).
Le plus difficile dans le passage du statut de salarié à celui d’entrepreneur est de se fixer un cadre. L’absence de contraintes extérieures peut être perturbant pour certains.
10/ Aujourd’hui, avez-vous des regrets du métier d’enseignant ? Revenus moins élevés ? Vacances ? Fatigue ? Stress ?
Aujourd’hui, je n’ai absolument aucun regret.
Mes revenus sont trois fois supérieurs à ceux que j’obtenais dans l’Education Nationale après seulement deux ans de démission, et ces revenus sont en croissance exponentielle.
Je bénéficie d’une liberté totale de mes faits et gestes et je prends des vacances identiques voire supérieures à celles de mon ex-métier de prof, mais aux dates que je souhaite (je n’ai ainsi pas la contrainte des tarifs augmentés en période de vacances scolaires).
De plus, je ressens du plaisir à travailler et la motivation d’un réel projet professionnel beaucoup plus enthousiasmant que le métier de prof, et notamment en termes de relations humaines.
11/ Que conseilleriez-vous à un enseignant qui souhaite réaliser une mobilité professionnelle hors de l’enseignement ?
Je ne conseille qu’une seule chose : vivre sa vie, réaliser ses rêves, et n’avoir aucun regret : tout est question de DECISION.
12/ Aujourd’hui, quel regard portez-vous sur l’école de la République ?
Le Modèle est inadapté à l’évolution de la société et au monde économique du 21ème siècle.
A force de démagogie et de laisser-aller, l’école contribue à la baisse de notre compétitivité à l’échelle du Monde.
Son site Internet :
http://www.soniacottier.fr/accueil/index.html
Son témoignage recueilli par Cécile Bonnet sur un blog :
http://cecilebonnet.com/temoignage-de-sonia-cottier/
Ce mois-ci, nous vous proposons de re-découvrir le parcours de Sonia Cottier Rodrigues. Sonia est professeure des écoles, actuellement en poste après une année en cumul d’activités (en 2010-2011), pendant laquelle elle a connu l’expérience de l’auto-entrepreneuriat en s’installant comme réflexologue plantaire, après une formation auto-financée. Aide aux Profs et le Café Pédagogique vous avaient présenté cette jeune femme dynamique en mars 2011 :
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lemensuel/lesysteme/Pages/2011/121_20.aspx
Deux ans après, Sonia a retrouvé le chemin de l’école et son tableau noir… Elle est actuellement TRS (Titulaire Remplaçante de Secteur) à trois quart de temps sur trois classes différentes (CE2-CM1, CM1 et CP)… Elle a mis fin à son auto-entreprise mais reste à l’écoute d’opportunités, en particulier autour de la lecture et de l’écriture cette fois, pour une éventuelle autre reconversion. Elle a d’ailleurs déjà vu l’une de ses nouvelles, « Un coquelicot face à la mer » publiée dans un recueil collectif, L’autre, chez SaFée Editions. Ainsi Sonia est-elle l’exemple qui permet de tempérer un peu le ton de cette rubrique. Toutes les reconversions ne sont pas forcément définitives et n’aboutissent pas à une démission. Pour autant, Sonia ne vit pas l’arrêt de son auto-entreprise comme un échec. Que peut donc nous apporter son expérience ?
Pouvez-vous nous rappeler les études que vous avez suivies ?
Avant d’entrée dans le détail de ma formation, je souhaiterais d’abord soulever la problématique à laquelle j’ai été confrontée tout au long de ma scolarité : le choix de l’orientation.
Passionnée autant par la littérature, les langues, les arts que par les sciences (de la vie et humaines), et sans véritable vocation, il m’a été extrêmement difficile de projeter d’emblée un parcours défini à l’avance. J’ai donc très tôt fréquenté les CIO et rencontré divers conseillers. Face à mes interrogations et au vue de mes résultats plutôt satisfaisants, tous m’ont encouragée à suivre la voie scientifique, celle qui d’après eux m’ouvrirait le maximum de possibles.
Après mon Bac S à dominante Sciences de la Vie, j’ai eu besoin de concret. J’ai opté pour une filière technique courte, un DUT de biologie appliquée et me suis assez rapidement fait une idée du travail en laboratoire grâce aux différents stages. Cette expérience n’ayant pas été concluante, je l’ai immédiatement complétée par une année post premier cycle en cosmétiques, univers qui me semblait allier science et art, rigueur et créativité, deux caractéristiques inhérentes à ma personnalité.
Quelles sont les différentes professions que vous avez-exercées ?
Après l’obtention de mon diplôme de cosmétiques, contre toute attente (dans ma région, il y avait peu d’entreprises dans ce secteur d’activité), j’ai rapidement trouvé un emploi dans un petit laboratoire de fabrication comme technicienne. Mon travail consistait essentiellement à enrichir d’agents actifs des bases de crèmes déjà développées. Au bout d’un an, le manque de créativité et l’aspect routinier du poste m’ont conduite à démissionner pour intégrer en CDD un laboratoire de cosmétiques plus important dans un grand groupe pharmaceutique. J’ai pu gérer seule différents essais, ma mission étant axée sur l’amélioration des produits déjà sur le marché. Malheureusement, une restructuration a entraîné la fermeture du service, et avec, la fin de mon contrat.
J’ai pris à ce moment-là conscience de la difficulté à laquelle j’allais être confrontée pour trouver un nouvel emploi, avec mon cursus assez spécifique, et ma mobilité limitée.
Après quatre mois de recherche, j’ai tout de même décroché un CDD qui s’est rapidement transformé en CDI dans une entreprise de services effectuant des tests de produits cosmétiques sur des volontaires. J’étais chargée de l’analyse des données et de la rédaction des rapports d’efficacité des produits. Le travail était complètement différent de ce que j’avais connu auparavant, mais pas inintéressant. Je suis en quelque sorte passée de technicienne à secrétaire, avec tout de même un aspect scientifique et technique. Cela me convenait plutôt bien.
Pourquoi avoir choisi un jour le métier de professeur des écoles ?
Pour des raisons personnelles, j’ai été amenée à déménager et m’installer à la campagne. Je devais prendre le train, puis les transports en commun pour me rendre au travail. Parallèlement, au bout de presque deux ans, j’avais de nouveau la sensation d’avoir fait le tour. La routine, l’impression de ne plus rien apprendre, et mes diplômes insuffisants pour prétendre à plus de responsabilités. Cette situation m’a amenée à réfléchir à propos de mon avenir à long terme. J’étais prête à revoir mon parcours, et n’étais pas du tout contre le fait de reprendre des études, à la condition que cela puisse être compatible avec mes contraintes d’alors.
En réalité, j’ai d’abord commencé par me renseigner sur le métier de psychologue scolaire, parce que ce domaine m’attirait particulièrement. Mais très rapidement, j’ai abandonné ce projet : je n’avais pas le bon cursus universitaire et matériellement pas les moyens de le suivre. Concrètement, j’étais indépendante, et j’avais besoin d’un salaire pour vivre. A l’époque, un membre de ma famille s’apprêtait à préparer le concours de professeur des écoles, cela m’a mise sur la voie.
Travailler avec des enfants, éduquer, partager et transmettre des valeurs, ainsi que des connaissances diverses et variées. Cela allait finalement assez bien avec mes goûts éclectiques !
D’autre part, je m’imaginais en tant que future maman, et je pensais que c’était le travail rêvé pour concilier vie familiale et vie professionnelle…
Et enfin, plus pratiquement, il m’était possible de reprendre des études tout en travaillant puisqu’il me suffisait de préparer le concours en candidat libre.
A partir de là, j’ai cessé de trop réfléchir et je me suis lancée ! J’ai rapidement postulé comme surveillante d’externat auprès de mon Académie, et j’ai obtenu dans la foulée un poste à trente minutes de chez moi, 18 heures réparties sur trois jours, et j’ai démissionné de mon travail de technicienne-secrétaire.
Comment en êtes-vous arrivée à une situation de démotivation, avec l’envie d’une seconde carrière ? Quel est le déclic qui vous avait fait quitter les élèves ?
J’ai commencé à enseigner en tant que remplaçante (TZR), comme de nombreux jeunes profs. Cela a duré deux ans. Cette situation a été particulièrement difficile pour moi, car en sortant de l’IUFM, je ne me sentais pas armée pour bien faire la classe, de la petite section de maternelle jusqu’au CM2, en passant par l’enseignement spécialisé. Tout était nouveau, tout était à construire, à s’approprier, et tout changeait tout le temps ! Impossible pour moi de m’appuyer sur quoique ce soit : je ne restais pas assez longtemps sur les postes, chaque fois il fallait recommencer et me réadapter. J’avais le sentiment de ne rien maîtriser, et cela générait beaucoup de stress. Pour compenser cette insécurité, je travaillais énormément. Mais j’ai toujours pensé que cela était normal, et faisant finalement parti du métier, paramètre que j’avais occulté au moment de la préparation du concours.
Et puis, j’ai commencé à accumulé les petits problèmes de santé : mononucléose infectieuse, allergies diverses, fatigue intense… C’est là que j’ai véritablement commencé à m’interroger. On entend aujourd’hui beaucoup parlé de « burn out », sujet que soulève d’ailleurs actuellement l’association Aide aux Profs. Il est difficile de dire s’il s’agissait de cela pour mon cas. J’ai tendance à penser qu’être enseignante, ou femme active tout simplement, et jeune maman n’est à l’évidence pas de tout repos ! Toujours est-il qu’à un moment, je me suis sentie si épuisée que j’avais de plus en plus de mal à me projeter dans le métier. Les préparations, les corrections, la présence face aux élèves, la difficulté pour me stabiliser dans une école proche de chez moi, les réunions, tout cela tout à coup a pris le pas sur le plaisir d’exercer « le plus beau métier du monde ».
Après la naissance de mon deuxième enfant, j’ai demandé un mi-temps. J’en avais besoin pour faire une pause aussi bien physiquement que psychologiquement. J’ai pris conscience que le métier était ce qu’il était et que je ne pourrai pas le changer. La seule solution qui s’offrait alors à moi était d’envisager une autre direction, pour la seconde fois dans ma carrière professionnelle.
Je n’ai donc jamais réellement quitté les élèves. J’ai essayé de me créer un avenir tout en gardant un pied à l’école. Comme tout le monde, et encore une fois, sans langue de bois, j’en avais besoin, pour vivre et payer mes factures.
Comment en êtes-vous arrivée à la réflexologie plantaire ? Avez-vous suivi un apprentissage, une formation pour vous perfectionner ?
J’ai découvert la réflexologie plantaire au cours d’une formation plus générale de naturopathie que j’ai suivi par correspondance pendant deux ans (2009-2011). Parallèlement, j’étais toujours professeur des écoles à mi-temps. J’ai toujours été très intéressée par les médecines naturelles, c’est pourquoi j’ai choisi à l’époque de suivre ce cursus, que j’ai entièrement financé avec mes économies personnelles. La réflexologie plantaire faisait partie d’un module spécifique que j’ai suivi sur plusieurs mois, le week-end à quelques centaines de kilomètres de la maison. Cela a été une véritable révélation ! J’ai découvert qu’il était possible d’aider le corps à s’autoréguler en pratiquant un simple massage de la voûte plantaire. J’ai trouvé cela tellement extraordinaire, que j’ai ressenti le besoin de faire connaître cette pratique naturelle. J’ai obtenu le certificat de réflexologie plantaire, puis j’ai continué à m’auto-former, en lisant des ouvrages spécialisés sur le sujet. J’ai aussi complété mon cursus par une autre formation, toujours de réflexologie plantaire, mais en lien cette fois-ci avec la médecine chinoise.
C’est un univers passionnant, cela a nourri ma soif de connaissance pendant un temps, car ces formations adultes coûtent souvent très chères !
Concrètement, quelles démarches aviez-vous mises en place pour créer votre entreprise ?
Puisque j’avais un nouveau savoir-faire entre les mains, j’ai voulu tenter l’expérience de la création d’entreprise. L’existence du statut d’auto entrepreneur a évidemment grandement facilité ma décision ! Simplicité des démarches et aussi limitation des risques : pas de chiffre d’affaires, pas de charges ! Je me lançais, mais avec un sacré filet de sécurité !
J’ai d’abord envoyé un courrier à mon inspection académique, afin de demander un cumul d’activités, sur lequel j’ai précisé la nature de mon projet, le temps que je pensais y consacrer, et le statut sous lequel j’allais exercer. Un mois plus tard, je recevais la lettre officielle m’autorisant à pratiquer la réflexologie plantaire pour une année scolaire, renouvelable sur demande, mais dans la limite d’une fois. Puis je me suis inscrite sur Internet sur le site officiel des auto-entrepreneurs.
J’ai opté pour la location d’un local, situé près de chez moi mais sur un axe très passant. J’avais besoin d’exercer ce nouvel emploi à l’extérieur de la maison, et d’autre part je souhaitais être « visible » pour développer plus rapidement mon activité. J’ai réalisé un site Internet pour faire connaître la réflexologie plantaire et aussi pouvoir me présenter et parler plus particulièrement de mon travail, et puis j’ai créé mes supports de communication : logo, affiches, cartes de visite, flyers que j’ai ensuite distribués dans les pharmacies, cabinets de médecins-homéopathes, instituts de beauté, etc.
J’ai aussi à plusieurs reprises proposé des séances de découverte gratuites dans un institut de beauté et une boutique bio.
Quelles sont les principales difficultés que vous avez rencontrées dans cette reconversion ?
Le plus difficile a été clairement de trouver mon public. Beaucoup de gens étaient intéressés voir intrigués par cette pratique, mais ne faisaient pas forcément la démarche de venir en soin. La raison principalement invoquée : non remboursé… Difficile de se démarquer aujourd’hui, l’offre en matière de soin de santé naturelle n’ayant cessé de se développer ces dernières années, ce qui en soi est une très bonne chose ! De plus en plus de personnes se préoccupent de leur santé et ont envie de se prendre en charge autrement. Je conçois qu’il soit plus facile de se tourner vers des pratiques telles que l’ostéopathie, approche thérapeutique aujourd’hui largement démocratisée et souvent prise en charge par les mutuelles.
Mon activité était en fin de compte très irrégulière. Quelques personnes ont opté pour un suivi (tous les trois ou quatre mois) et la majorité pour des séances ponctuelles. Il fallait constituer un fichier client assez conséquent afin d’assurer un « turn over ». Ce côté commercial me gênait beaucoup. Je n’avais rien à vendre, je souhaitais simplement me mettre à la disposition de ceux qui souhaitaient découvrir une autre façon de prendre soin de soi. Je préférais que les gens viennent à moi plutôt que de leur imposer ma pratique.
D’autre part, étant donné que j’étais toujours professeur des écoles, j’avais de longues semaines, et cela me demandait beaucoup d’énergie.
Pourquoi ne pas avoir continué dans cette voie et être revenue en classe ? Le vivez-vous comme un échec ?
Durant cette année de cumul d’activités, je ne me suis pas spécialement focalisée sur la reconversion. J’ai essayé de faire vivre cette activité, de trouver des solutions pour faire connaître la réflexologie plantaire et donner envie aux gens d’essayer.
Concrètement, dans un premier temps mon objectif n’était pas d’en vivre, cela aurait été utopique en même temps que décourageant, mais simplement de pouvoir assumer mes charges et frais de location sans avoir à « piocher » dans les ressources du ménage. Ce que j’ai toujours réussi à faire. J’espérais tout de même à plus longue échéance parvenir à en faire une activité à part entière, c’est évident. J’avais envie d’y croire, de me donner une chance, en tout cas d’essayer pour ne rien regretter !
Au bout d’un an, s’est posée la question de la demande de renouvellement du cumul d’activités. J’avais encore un an maximum « pour faire mes preuves » et choisir au final entre la réflexologie plantaire et l’enseignement. Concrètement j’avais besoin de plus de clients mais deux contraintes se sont vite imposées :
- j’avais commencé quelques démarches pour m’installer dans une ville plus importante : je n’avais pas les moyens financiers d’assumer les loyers pratiqués, me restait la solution du soin à domicile ;
- plus de clients voulait dire aussi plus de manipulations : au bout d’un an de pratique j’étais physiquement diminuée, avec des douleurs diffuses dans les mains et les poignets.
C’est ce deuxième point qui a guidé ma décision.
J’ai rendu mon local, envoyé ma déclaration de cessation d’activité au CFE, et n’ai pas demandé de renouvellement de cumul d’activités. J’ai pendant une année encore continué d’alimenter mon site Internet, avec divers conseils et informations autour de la réflexologie plantaire et d’autres thèmes comme les fleurs de Bach, que j’avais étudiés dans un centre agréé (et dont j’ai validé le niveau 1).
J’ai donc repris le chemin de l’école en septembre 2011 à mi-temps, sans aucune rancœur ni sentiment d’échec, car la décision de ne pas poursuivre la réflexologie plantaire ne m’a pas été imposée, je l’ai choisie.
Cette expérience m’a énormément apporté : des rencontres, de la confiance, de la reconnaissance, la joie de lire l’apaisement sur des visages et puis des sourires. Cela n’a pas de prix !
Je ne conçois plus aujourd’hui ma vie professionnelle comme un déroulement linéaire, mais plutôt comme un chemin un peu escarpé fait de routes secondaires que j’ai le choix d’emprunter ou non. Les notions de réussite ou d’échec n’ont donc plus lieu d’être, il y a simplement des occasions d’apprendre, d’oser ou non prendre telle ou telle direction.
Nous évoluons sans cesse, de même que nos envies et nos besoins.
Et puis il faut aussi composer avec les contraintes matérielles et familiales.
Comment vivez-vous actuellement votre activité d’enseignante après cette parenthèse ? Etes-vous une enseignante en souffrance ?
Grâce à mon expérience de réflexologue, j’ai appris à prendre du recul vis-à-vis de mon métier d’enseignante, à moins me « mettre de pression ». Cela n’est pas toujours simple, car il est toujours possible d’améliorer nos pratiques, de retravailler nos préparations. Il faut faire le deuil de la perfection, et apprendre à être plus humble sur les objectifs à atteindre en classe.
Même si 10 ans après l’obtention du concours je n’ai toujours pas ma classe attitrée (j’occupe toujours un poste de TRS), j’ai la chance de travailler depuis plusieurs années dans la même école, entourée de collègues très ouverts et à l’écoute, toujours prêts à partager leur vécu et expérience. Cela aide parfois à relativiser.
Aujourd’hui, je ne suis plus une enseignante en souffrance. J’essaie de faire mon travail le plus consciencieusement possible tout en me préservant. L’équilibre est fragile, mais il faut veiller à le respecter.
Je suis actuellement à trois quarts de temps, ce qui me laisse encore un peu de latitude pour me consacrer à ma famille et mes passions, même si les journées sont parfois dignes d’un marathon !
Souhaitez-vous toujours quitter l’école définitivement pour vivre d’autre chose ? Quels sont vos projets professionnels actuels ?
Bien sûr que l’idée de quitter l’Education Nationale me séduit toujours, mais pas à n’importe quel prix, ni pour faire tout et n’importe quoi !
Je guette les opportunités, me renseigne, multiplie les contacts afin d’ouvrir les possibles.
Je suis toujours membre accompagnée par l’association Aide aux Profs, qui me fait parvenir les offres susceptibles de m’intéresser et me fait également bénéficier de son réseau.
Il y a deux ans, j’ai travaillé bénévolement à la rédaction d’articles autour de la scolarité et de l’école pour un site Internet. Le but était d’informer les parents d’élèves désireux de mieux comprendre le système mais peu disponibles, car très occupés par leur activité professionnelle. Il s’agissait d’associer à ce projet les comités d’entreprise. L’objectif, à terme, était de proposer un forum et une permanence téléphonique sur tout le territoire français afin d’assurer un suivi personnalisé pour les familles en demande, parallèlement aux articles d’information. La collaboration n’a malheureusement pas abouti.
Parlez-nous de votre passion de la lecture et de l’écriture…
Aujourd’hui, et depuis l’arrêt de mon activité de réflexologie plantaire, je consacre une bonne partie de mon temps libre à la lecture et l’écriture. Je suis une dévoreuse de livres !
J’avais délaissé cette passion pendant toute la durée de la préparation du concours de professeur des écoles et mes premières années d’enseignement, trop accaparée par tout cela.
J’ai renoué avec le plaisir de lire lorsque j’ai suivi ma formation de réflexologie plantaire, d’abord avec des ouvrages techniques sur cette thématique, puis d’autres plus généraux autour du développement personnel. Je suis passionnée par tout ce qui touche à la connaissance de soi, à l’Etre humain.
Petit à petit, je suis revenue vers mon premier amour, le roman. J’admire particulièrement l’œuvre de Virginia Woolf, pour son introspection et la beauté de son écriture. Je lis en moyenne entre trois et cinq livres par mois, et aime naviguer entre les époques et les genres (littérature anglo-saxonne, française, XXème siècle, ou auteurs contemporains).
Et puis, il y a l’écriture.
Petite, je passais mon temps à dessiner et remplir des journaux intimes ! Mon rapport à l’écriture était déjà très fort. Je n’inventais pas d’histoires à proprement parler, je notais simplement des petits bouts de vie, mes états d’âmes, et j’entretenais régulièrement des correspondances avec des amies rencontrées en vacances. Mon rêve le plus secret « quand je serai grande », était d’écrire un livre sans avoir la moindre idée de ce que j’y raconterais !
En 2010, je me suis inscrite pour la première fois sur un réseau social professionnel, Viadéo, pour mettre en avant mon activité de réflexologie plantaire. J’ai découvert à cette occasion et complètement par hasard un hub (centre d’intérêt) intitulé « A nos claviers », un atelier d’écriture créative en ligne, et j’ai commencé à y participer. Très vite, j’y ai pris goût et contrairement à ce que je pensais, les contraintes imposées m’ont permis de booster ma créativité. Cela m’aidait à canaliser mes idées, et à mettre de l’ordre. Petit à petit je me suis rendue compte que j’avais des choses à dire, et cerise sur le gâteau, les personnes du hub semblaient apprécier et prendre plaisir à lire mes productions ! Cela m’a donné confiance et petit à petit je me suis lancée sur des textes plus longs, pour finir par participer à un véritable concours de nouvelles. J’avais besoin de me frotter à un public différent, savoir si mon écriture et mon univers pouvaient toucher des « inconnus », et m’assurer aussi d’une certaine légitimité. Ce n’est pas facile de se permettre d’écrire lorsque l’on ne vient pas d’un milieu intellectuel ou d’un cursus littéraire. J’avais en quelque sorte besoin que quelqu’un m’aide à faire tomber mes barrières. A ma grande surprise, ma toute première nouvelle « Un coquelicot face à la mer » a été choisie pour faire partie du recueil collectif 2012, L’autre, chez SaFée Editions… Cela a été un moment exceptionnel, j’étais heureuse, honorée et très émue de voir mon texte relié dans un recueil au milieu de celui des autres. Depuis, je continue à écrire.
Je travaille actuellement sur un projet plus personnel. J’ignore encore s’il s’agira d’un recueil de nouvelles ou s’il prendra la forme d’un roman. Pour le moment j’essaie juste d’écrire, d’avancer sans trop me poser de questions, malgré les impératifs familiaux et professionnels.
Parallèlement, j’apporte ma contribution au hub « A nos claviers » aux côtés de deux autres administrateurs, et continue lorsque j’en ai le temps de participer en répondant aux exercices proposés ! C’est un bon prétexte à l’écriture et les échanges sont toujours enrichissants.
Je mets en ligne mes productions sur un site internet (www.soniacottier.fr) que j’essaie de tenir à jour, bien que cela ne soit pas évident. Les activités sur la toile peuvent devenir assez rapidement chronophages et prendre le dessus sur le travail de création lui-même ! Il faut savoir se donner des priorités et s’y tenir si l’on veut éviter de s’éparpiller. Définir ce qui nous est essentiel.
L’écriture fait aujourd’hui partie de mon quotidien, c’est ma façon de prendre part à la vie.
J’ai moins le temps de dessiner que lorsque j’étais enfant, mais cela m’arrive encore parfois, notamment au moment des « grandes vacances ». J’aime aussi peindre, et m’adonner à toute sorte de loisirs créatifs (carterie, scrapbooking, en particulier).
Communiquer et partager mon univers à travers mes créations voilà ce qui m’anime finalement et me plaît le plus !
Aujourd’hui, quel regard portez-vous sur l’école de la République ?
Je suis de plus en plus mal à l’aise avec l’école telle qu’elle se présente aujourd’hui. La norme et l’évaluation prennent trop souvent l’avantage sur le plaisir d’apprendre. Il me semble que l’on ne met pas assez en avant l’individualité et les talents de chacun ! Beaucoup d’enfants perdent confiance dans le système, et en eux, car ils ne se sentent pas reconnus dans leur singularité. Les méthodes « classiques » s’adressent bien souvent aux élèves « scolaires », ceux qui réussissent (j’ai envie de dire même sans nous !) et laissent les autres en échec, voir brisés. Je rencontre de plus en plus d’enfants angoissés, stressés, alors qu’ils n’ont que huit ans, voire moins. Cette situation n’est pas normale, ce n’est pas sain.
En tant que professeur des écoles je me sens parfois démunie et je m’interroge sur le sens de ma mission. L’école doit être un lieu d’apprentissage et d’épanouissement, non une énième occasion de pointer les manques et faiblesses de l’enfant.
En tant que maman de deux enfants (dont une récemment diagnostiquée dyslexique-dysorthographique) je me pose aussi des questions. Quelle école pour les profils atypiques ? Et pour les enfants de demain ? S’agit-il de les faire entrer à tout prix dans un tiroir sur mesure ou de leur permettre de se connaître pour tirer parti de la richesse de leur personnalité et les aider à trouver leur place dans le monde ?
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