Emballement médiatique et « approche relative » admet le ministère
Encore un indicateur ? « Ival », « Ivac », pour « Indicateur de Valeur Ajoutée des Lycées ou Collèges » pour celles et ceux qui n’auraient pas la référence. Mais attention, d’après le ministère-même, il s’agit d’une approche relative. Si elle est ainsi relativisée, d’un point de vue scientifique, elle est pourtant largement médiatisée. Car, ces évaluations intéressent et répondent bien plus aux préoccupations des familles ou de l’opinion publique – ainsi construite au passage – que des spécialistes de l’éducation, comme bien souvent les sujets éducatifs qui font la Une de la presse, malheureusement. La preuve en est au regard des nombreuses notes et études absentes des colonnes médiatiques ou encore de l’absence de publication de données ou rapports, gardés secrets. Songeons à la publication des IPS (indicateurs de mixité sociale) rendus publics en 2022 après une bataille judiciaire menée par le journaliste Alexandre Lechenet.
IVAl, IVAC, un classement qui n’en serait pas un
L’Education nationale publie les résultats des collèges et lycées classés selon le critère de la valeur ajoutée qui « évalue l’apport propre de l’établissement à la réussite de ses élèves, compte tenu de leurs caractéristiques ». La Depp précise également que cette approche est relative. L’idée ne serait pas de classer, mais de donner une photographie et non un palmarès précise-t-on. Pour la Depp, cette valeur ajoutée permet de « comprendre et apprécier la façon dont les établissements accompagnent leurs élèves vers la réussite » et « prendre en compte les disparités importantes en e recrutement entre les établissements en termes de profils scolaires et socio-économiques des élèves ».
Ces données sont donc à destination des familles, pour éclairer leur choix.
Mais à parler de valeur ajoutée positive, n’implique-t-il pas son pendant de valeur ajoutée négative ? Les équipes pédagogiques apprécieront.
Notons que les données sont partagées avec générosité alors que la publication des IPS n’a été publique qu’au terme d’une décision de justice : le ministère a été condamné par le tribunal administratif de Paris à publier ces statistiques sociales. Depuis 20 ans, les données, également accessibles et publiques, montrent la ségrégation grandissante et combien les écarts se creusent entre les publics accueillis dans le établissements privés et publics au détriment de ces derniers. Pour favoriser (vraiment) la mixité scolaire et sociale, ne devrait-on pas cesser avec toutes ces données et leur médiatisation qui concourt à la concurrence et à la fuite ? Le jeu des réputations nuit forcément à certains établissements.
Nourrir la culture néolibérale du choix, de l’offre, de la concurrence
Il y a fort à parier que vous lirez et retrouverez dans la presse locale et nationale des articles sur les collèges et lycées de votre ville, département, région ou académie qui sont bien classés ou évalués, ceux qui font bien réussir vos enfants.
Ces indicateurs infusent une logique de marché, de choix et y habituent Car les familles ont bel et bien un choix à faire en termes de scolarité de leur enfant. Enfin, certaines familles. Si dans le cadre de la sectorisation, et de la carte scolaire, parler de choix peut étonner, c’est oublier que le secteur privé échappe à ces conditions. La politique du choix fait celle du privé finalement.
Des effectifs réduits dans les classes ne seraient-ils pas une valeur ajoutée objective, et non pas « relative » ? De même, faire reculer la ségrégation des établissements serait une valeur ajoutée aux établissements les plus défavorisés.
Approche relative, médiatisation, c’est le cocktail et le traitement médiatique réservé à l’école. Comme l’abaya qui cache la forêt, l’uniforme cache l’indigence de tous ces contre-feux qui ne parlent pas des réels difficultés et enjeux pour les personnels et élèves.
Djéhanne Gani
Pour consulter les indicateurs
https://cafepedagogique.net/2023/03/30/se/ce
