En publiant l’avis 25-28385, le ministère de l’éducation nous rappelle que ce que préconise la doctrine technique du numérique à propos de l’utilisation de logiciels libres (open source ou…) et souverains n’est pas toujours en phase avec les réalités de terrain, au moins pour les quatre prochaines années. Plus encore, il faut rappeler cet élément du code de l’éducation : Article L123-4-1, Modifié par LOI n°2013-660 du 22 juillet 2013 – art. 9 « »Le service public de l’enseignement supérieur met à disposition de ses usagers des services et des ressources pédagogiques numériques. Les logiciels libres sont utilisés en priorité » !!!. Si le mouvement en faveur des logiciels libres au sein même de la DNE semble avoir de l’audience (et même des ambitions), cette signature montre qu’il y a loin de la coupe aux lèvres. Car les réalités des usages de terrain ont depuis longtemps montré la prééminence des solutions des grandes entreprises du secteur alors que le secteur du libre tente de prendre sa part allant jusqu’à l’opposition frontale. Rappelons aussi ici la signature précédente d’un accord entre le MEN et la société Microsoft signé en 2015 et controversé aussi. Depuis les solutions libres ont fait leur chemin, sans pour autant offrir un poids égal à celui des majors du secteur.
Essayer d’expliquer cette décision
Comment expliquer cela ? Signalons d’abord que l’avis présenté ici concerne principalement l’enseignement supérieur et les services centraux du ministère. Le secteur scolaire n’en fait pas partie, au moins dans l’état actuel du marché. Rappelons aussi que c’est un marché pour une année renouvelable jusqu’à 48 mois. C’est la règle des marchés publics qui s’applique ici aussi. Il faut constater que l’usage des services de Microsoft est encore très présent dans de nombreux établissements et services centraux et que ce n’est pas récent. De plus il faut reconnaître que la grande majorité de la population, même dans le monde enseignant, utilise les solutions proposées par les majors du secteur. L’engouement quasi religieux pour certaines solutions numériques a été démontré à propos d’Apple et il est similaire dans les discours de certains libristes.
Un enjeu de mondialisation : comment y faire face ?
Alors faut-il renoncer aux solutions proposées par les grands acteurs commerciaux du secteur pour aller vers le libre. La réalité des pratiques, aussi bien professionnelles que grand public, amène à interroger la possibilité de coexistence voire d’interopérabilité ou d’intégration de solutions libres dans l’écosystème numérique général. Au cours des cinquante dernières années, les acteurs du logiciel libre, ou encore open source et récemment renommés « communs numériques » ont fait de nombreuses campagnes pour convaincre. Jusqu’à ce que la loi intègre en 2013 dans le code de l’éducation la priorité. Mais priorité ne veut pas dire exclusivité. D’ailleurs le protocole signé avec Microsoft présenté ici est libellé ainsi « Concession de droits d’usage à titre non exclusif « . Si l’évolution actuelle, à propos de la souveraineté et des dépendances liées à la mondialisation amène à aller vers des solutions « non propriétaires, ouvertes et modifiables », il n’en reste pas moins que la domination de certains acteurs du marché du numérique est une réalité dont il est toujours très difficile de se défaire.
L’actualité politique internationale doit nous amener à réfléchir non pas sur tel ou tel produit, mais sur le sens et la direction que prend le monde actuel, troublé qu’il est par les déclarations intempestives de certains dirigeants…. basées sur leur souhait de grandeur…
Bruno Devauchelle
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