« On vend des gâteaux à 1 euro pour se payer un enseignant » lance Saby devant le rectorat de Paris. Mardi 11 février 2025, la mobilisation était historique à Paris, 1300 personnes étaient rassemblées devant le rectorat, près de 60% des professeur.es des écoles de la capitale étaient en grève et au moins 170 écoles fermées. Les personnels et les familles dénoncent une saignée brutale pour l’école publique à Paris. Un quart des suppressions de postes dans le Premier degré concerne Paris. A ces suppressions s’ajoute la volonté de revenir sur les décharges de direction. Pourtant la capitale est en état d’alerte. Sans action volontariste des politiques publiques, elle verrait dans dix ans plus de la moitié des élèves scolarisés dans le privé sous contrat, selon les travaux de Julien Grenet qui posait la question l’an passé « l’école publique a-t-elle encore un avenir à Paris ? »
198 fermetures de classes à la rentrée à Paris
Pour la rentrée, 110 suppressions de postes de la carte scolaire ont été annoncées pour Paris, soit 198 fermetures de classes dans les écoles publiques parisiennes. Le Snuipp-FSU estime à 200 postes le nombre de postes qu’il faudrait créer pour répondre aux besoins. Ces 110 suppressions de postes annoncées pour la rentrée 2025 à Paris sur les 470 au niveau national sont « une purge dans les écoles publiques » pour la FCPE de Paris. Elle tire la sonnette d’alarme : avec 198 fermetures de classes, ce sont 20 % des suppressions nationales concentrées à Paris alors que la capitale ne représente que 4 % de la baisse démographique nationale, souligne-t-elle. « Pourquoi Paris est-elle autant pénalisée ? » interroge la FCPE Paris. Pour elle, l’argument du rectorat de Paris d’une académie « très bien dotée » depuis des années est rejeté en bloc. « On nous dit que nous sommes privilégiés, mais la réalité, c’est une école publique qui souffre et qui se vide de ses moyens dans l’académie la plus ségréguée de France », s’indigne Martin RAFFET, président de la FCPE Paris. Des parents d’élèves ont manifesté mardi matin devant le rectorat de Paris avec les personnels dénonçant les fermetures de classes.
« On vend des gâteaux à 1 euro pour se payer un enseignant »
« On vend des gâteaux à 1 euro pour se payer un enseignant » explique Savy en montrant sa pancarte. Parente déléguée d’une école du 20e arrondissement, elle se dit « volée d’une classe à la rentrée par un gouvernement démissionnaire ». Une délégation de l’école Pelleport a été reçue au rectorat par le Dasen racontet-elle : « Il nous a dit dans les yeux, vous avez raison, mais on n’a pas de budget ». Elle décrit une école qui fonctionne mal, quand une professeure est malade, les classes passent à 30 : « C’est une expérience malheureuse pour les parents et les enfants ». Les parents et les enseignants voient se multiplier les classes surchargées, les absences non remplacées et la dégradation des conditions d’accueil s’accentuer, explique-t-elle.
« Toutes les classes à 18 ou 20 élèves max ! »
Des professeures des écoles du 19e arrondissement se disent fatiguées d’être toujours contre des mesures ou décisions et elles rappellent les revendications des professeurs : « Toutes les classes à 18 ou 20 élèves max ! ». Dans la mobilisation devant le rectorat de Paris, une directrice parle de la suppression de décharge des directions : « Nos journées sont remplies, notre métier, c’est plein de petits riens pour que ça tienne, du suivi des élèves, réparer le chauffage, le lien aux familles, en plus du travail administratif qu’on fait souvent en-dehors de nos heures ». Pour elle, retourner en classe, « ça veut dire qu’on fera mal quelque chose, et sûrement pas la classe ».
Accompagner la baisse démographique à un maintien de moyen pour améliorer les conditions d’enseignement
Pour le Snuipp-FSU, syndicat majoritaire du Premier Degré, « la baisse démographique, à Paris comme dans tous les départements devrait permettre d’améliorer les conditions d’enseignement en garantissant des effectifs raisonnables dans toutes les classes, en créant les postes nécessaires de remplaçant.es, d’enseignant.es spécialisé.es et de formateur-trices ».
Répartir les suppressions de classes dans le privé et le public
Pour la FCPE, l’État saborde l’école publique et pendant ce temps, l’enseignement privé ne ferme aucune classe. « Nous exigeons une répartition équitable des efforts et demandons au minimum autant de suppressions dans le privé que dans le public. Pourquoi le privé serait-il épargné des restrictions budgétaires ? Nous demandons que les chiffres d’ouvertures et de fermetures dans les écoles privées soient rendus publics, et que cela se concrétise par de véritables fermetures de classes et une diminution du nombre d’élèves qui y sont scolarisés. » déclare Martin Raffet.
Les familles, les personnels, les syndicats s’inquiètent des fermetures de classes dans un contexte d’affaiblissement de l’école publique. La perte des moyens pèse sur l’attractivité des écoles publiques fortement concurrencées par les écoles subventionnées par l’Etat à 76%. Au regard de Paris, ne voit-on pas l’urgence à protéger l’école publique en lui donnant ou laissant des moyens nécessaires ?
Djéhanne Gani