« C’est un temps suspendu où on laisse un peu les copies et les tracas des cours pour un moment au cœur de sa passion ». « La ville » était le sujet des derniers rendez-vous de l’histoire de Blois. Pierre-Yvain Arnaud est professeur d’Histoire-géographie-EMC en collège depuis quinze ans. Il a enseigné d’abord dans le Val d’Oise en REP, il enseigne depuis quelques années dans les Hauts de Seine. Entre deux conférences, le Café pédagogique lui pose quelques questions.
Les Rendez-vous de l’histoire de Blois rdv incontournable pour les professeurs férus d’histoire ?
Nous avons la chance en Histoire, et en Géographie avec St Dié, d’avoir des grandes rencontres liées à notre champ d’enseignement. Mon collègue de Français regrettait de ne pas avoir cette opportunité.
Elles permettent de se connecter en un week-end à la recherche universitaire, par le biais des conférences liées au thème de l’année ou à des travaux de recherche parus récemment.
C’est un temps suspendu où on laisse un peu les copies et les tracas des cours pour un moment au cœur de sa passion. L’incontournable salon du livre s’ajoute à ce plaisir en déambulant dans un océan d’ouvrages que l’on voudrait tous dévorer.
Est-ce que ces journées nourrissent vos cours, pratiques ?
Oui et… non. Oui parce que certains thèmes sont directement en lien avec nos cours et que cela permet des mises à jour en direct ou une prise de recul salutaire. Cette année une conférence sur Détroit démontait le mythe du « renouveau » de la ville ou moins le questionnait beaucoup. Cela va directement intégrer mon cours de 4e.
Mais on peut aussi s’abstenir entièrement ou partiellement de cette visée scolaire et juste se plonger dans des champs de recherches encore invisibles dans nos enseignements, très pointus ou tout nouveaux. C’est cette diversité qui fait la force et le désespoir d’un séjour à Blois face à des choix cornéliens.
Vous venez souvent aux rdv histoire de Blois ? Pour quelles raisons ?
Les thèmes sur la guerre et les empires furent un déclencheur car ils m’intéressaient beaucoup. Blois c’est aussi une histoire d’amitiés pour moi car deux amis passionnés d’histoire étaient des habitués. On a commencé à réunir une bande venue de toute la France et d’Europe. Le dîner du samedi soir était un moment de retrouvailles pour débriefer nos conférences et débattre jusqu’au bout de la nuit. Organisant depuis quelques années un échange scolaire avec l’Allemagne à cette période je n’étais plus trop disponible. Mais j’avais cette année l’occasion d’y retourner.
Quelles autres difficultés ou freins pour venir à Blois ?
J’ai aussi un peu laissé tomber Blois car les week-ends sont denses en termes de travail et de vie personnelle. On est souvent jaloux des nombreux retraités et étudiants qui viennent en masse ! Les heurts des différents systèmes de réservation (encore cette année) peuvent aussi un peu décourager. Enfin (mais cela reste complexe à organiser) j’aimerais plus d’ouverture sur le monde de la recherche internationale avec des approches comparatistes ou des perspectives différentes issues de chercheurs étrangers.
Mais la principale raison et c’est très salutaire, c’est la forte croissance de l’offre numérique toute l’année via les podcasts par exemple, comme Parole d’Histoire ou les cafés virtuels de l’APHG. Blois a d’ailleurs multiplié les retransmissions et prises de sons. Les universités, le collège de France proposent aussi du contenu en ligne.
Blois devient alors surtout intéressant pour des conférences spécifiques liées à des tables rondes uniques sur le thème de l’année ou pour rencontrer les chercheurs en direct. Ou pour son ambiance unique où l’on retrouve sa « communauté ». Elle offre aussi un des rares espaces de formation pour le monde enseignant dépossédé de plus en plus de ce droit fondamental et vital pour notre métier. Mais, comme beaucoup de professeurs, en dehors de ceux de l’académie, je ne pourrai pas demander à avoir des jours de formation pour y aller. On regarde alors tristement les programmes du jeudi et du vendredi…
Quelles conférences avez-vous suivies ?
Cette année avec le système de réservation numérique rapidement saturé j’ai pris ce que j’ai pu par rapport à mes envies de base. Donc pas de conférence sur le monde nazi ou la ville idéale qui faisait un très bon lien avec les chapitres de 6e sur la ville de demain. Mais elles sont filmées donc j’aurai ma revanche. J’ai pu profiter de deux excellentes conférences sur le maintien de l’ordre et la justice en ville qui raisonnent beaucoup avec l’actualité. J’ai fait un tour à Rome au travers des siècles pour questionner le caractère exceptionnel de la ville, j’ai mieux compris le rôle de Savonarole à Florence et j’ai appris beaucoup de choses sur la dynamique de mon quartier à Paris lors de la croissance urbaine du XIXe siècle. De quoi alimenter la réflexion, les cours, et notre insatiable curiosité.
Propos recueillis par Djéhanne Gani
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