Qu’est-ce qu’une aire éducative ? Commet s’appuyer sur le terrain pour donner du sens aux apprentissages ? Ségolène Paris-Lefel, enseignante de SVT au collège Julien Lambot de Trignac (44) ne manque pas d’idées et travaille la biodiversité avec ses élèves autour d’une aire éducative. Classe en dehors et chasse au trésor emballent ses collégiens. « Laissez libre cours à vos envies, insufflez de vos passions dans vos enseignements, ne vous mettez pas de barrières », conseille l’enseignante.
Comment expliquer en quelques mots ce projet annuel d’aire éducative ?
Il s’agit de s’appuyer sur notre aire éducative, « le crassier » (l’ancienne zone de dépôt des résidus des hauts fourneaux de Trignac, laissée à l’abandon), pour développer tout le programme de sciences de 6e, puisque j’enseigne la partie SVT et PC. Cette aire éducative sert d’accroche pour la problématisation des chapitres et donne du sens aux apprentissages. C’est aussi l’occasion de faire l’école du dehors, une pratique qui m’attire beaucoup (je suis très engagée pour l’EDD, animatrice du réseau académique de formateurs EDD) et qui n’est pas commune dans le secondaire. A ce titre, j’ai rédigé un guide complet sur l’école du dehors pour la plateforme « être prof », à consulter gratuitement.
En quoi la programmation annuelle est-elle ludifiée ?
Pour engager encore plus mes élèves, mais aussi pour les inciter à faire leurs devoirs, j’ai imaginé que les élèves allaient gagner, chaque fois qu’ils ont fait leur travail à la maison, un morceau du visuel de la programmation annuelle sur lequel un message secret est noté de façon subtile… et il commence par l’évocation d’un trésor… évidemment les élèves ont tout de suite accroché ! Ils ont déjà hâte d’avoir les devoirs du 2e chapitre pour gagner le second morceau… A l’endroit indiqué, ils trouveront un QR code amenant à un cadenas virtuel. Une fois ouvert, ils découvriront que le trésor est la connaissance et la préservation de la biodiversité, fil rouge de notre travail sur l’ATE. Et pour allier l’utile à l’agréable, ils pourront me montrer leur puzzle complet pour gagner quelques friandises !
C’est aussi une programmation ludifiée car j’utilise, en général, un jeu par chapitre. Je suis en effet convaincue des bienfaits de la ludopédagogie.
Quelles sont les sorties prévues sur le terrain avec les élèves ?
Vous retrouverez le détail dans l’article sur mon blog où je liste pour chaque chapitre les situations-problèmes et les sorties prévues. A titre d’exemple, nous commençons l’année par explorer le site (immense) et lister les composantes de l’environnement observé au fil de notre déambulation. Nous partons aussi à la recherche des animaux en novembre, constatant que plusieurs ne sont plus là… c’est l’occasion de parler du comportement des animaux au fil des saisons. Découvrir la biodiversité végétale, étudier la centrale solaire en construction ou créer des petits aménagements pour favoriser la biodiversité, voici d’autres pistes de sorties de terrain.
En quoi ce projet s’articule-t-il avec le programme de sciences ?
J’ai réussi à faire des liens pour l’ensemble des notions du programme de sciences de 6e, excepté la partie puberté/reproduction qui est traitée depuis des années dans le cadre d’un projet d’établissement avec une exposition créé localement « sang gène ». Dans l’article sur mon blog, j’ai identifié le chapitre concerné pour tous attendus de fin de cycle afin de donner à voir le découpage que j’ai choisi.
Vous dites avoir besoin de changer de projet annuel pour « ne pas se lasser et garder la flamme ». Quel regard avez-vous sur le métier et cette routine qui peut s’installer ? Des conseils à donner pour les collègues en milieu de carrière ?
Je crois que la plupart des expériences que je réalise en classe ne sont pas les TP pour les élèves mais bel et bien mes essais, tâtonnements et analyses pédagogiques. J’aime cet aspect du métier mais aussi développer ma créativité au service des apprentissages. C’est un élément qui me permet de garder l’envie intacte, de mettre du peps dans mon quotidien au même titre que de m’engager dans divers projets. La formation continue et la création de ressource font partie de notre métier. C’est dans nos missions et je trouve que c’est bien mieux que d’être une simple exécutante !
Je dis souvent aux collègues que la créativité, cela se travaille comme tout le reste, pour nous, enseignant.es mais aussi pour les élèves. Alors, laissez libre cours à vos envies, insufflez de vos passions dans vos enseignements, ne vous mettez pas de barrières. C’est là aussi un excellent moyen de favoriser les apprentissages, car être une prof heureuse et investie dans son travail a des répercussions sur l’ambiance de classe et l’on sait d’après la méta-analyse de Hattie que c’est un facteur favorisant la réussite.
Propos recueillis par Julien Cabioch
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