Deux bandes dessinées qui ont en commun d’avoir des filles entre enfance et adolescence qui vivent un changement de vie, qui se cherchent et cherchent à être acceptées. Des histoires qui nous font découvrir aussi d’autres cultures.
Anzu et le royaume des ténèbres, de Mai K. Nguyen, Ed. Kinaye
C’est le dernier jour d’Obon, fête bouddhiste japonaise honorant les esprits des ancêtres. Anzu, qui a perdu récemment sa grand-mère, n’arrive ni à se joindre à sa famille pour les rituels pourtant ludiques, ni à défaire les cartons d’un récent déménagement. Repliée sur elle-même, se sentant seule, différente, incomprise, sans amis, elle sort. La rencontre avec un chien noir qui lui vole un pendentif de sa mamie l’entraîne au royaume des ténèbres. Une folle aventure parmi les esprits, démons et divinités du monde de la mort, au cours de laquelle elle va devoir assumer ses choix, apprendre à se méfier de certains, accorder sa confiance à d’autres. Un voyage initiatique qui lui permettra de mieux s’accepter, d’aller vers de nouveaux amis, une nouvelle vie. Une aventure pleine d’action et de combats. Une plongée dans la culture japonaise, avec de nombreuses occurrences à des plats et boissons, qu’on décrypte grâce à un glossaire en fin d’album. De même, pour mieux comprendre l’histoire et le folklore japonais, on trouve également des explications pour chacune des créatures rencontrées. Le dessin, esprit manga, reste doux, s’y ajoute l’harmonie des couleurs, dans les teintes de violet et d’orange pour ce monde fantastique. Une petite Anzu courageuse qui apprend à accepter son nom et sa culture, à grandir, à se faire confiance : une héroïne attachante, dans un bel album aux thématiques profondes.
Akissi de Paris , de Marguerite Abouet, ill. Mathieu Sapin, Ed. Gallimard Bande dessinée
Akissi vient d’arriver à Paris avec son frère Fofana, chez Papi, leur grand-oncle. Tout y est bien différent de la vie à Abidjan ! L’album s’ouvre sur cette petite Africaine à la coiffure colorée, vêtue d’une jolie robe rose à volants, dans les rues de Paris : c’est le premier jour d’école et elle est déjà en retard. Tout l’étonne, les pigeons que personne ne mange, la rue à traverser… Ce n’est que le début de ses aventures parisiennes, elle va devoir s’adapter, parce que « c’est quoi ce pays, hein ? » et « personne ne m’aime dans ma classe », et puis « c’est pas bon la nourriture au collège »… Après une journée de classe, elle rentrerait bien au pays ! Les conseils de Papi vont se révéler utiles : « ils ne savent pas que vous venez d’un pays incroyable et que vous êtes des enfants extraordinaires »… Alors, comment faire pour que les autres aient envie d’être vos amis ? Akissi va trouver… Nouveaux codes, nouveaux amis, grisaille, et mauvaise humeur parisienne : un regard nouveau avec le décalage culturel sur le collège et sur la vie dans la capitale, avec des personnages secondaires qui posent plein de questions sur des thématiques sociétales, avec les thèmes du mal-être adolescent, de l’exclusion à travers le personnage d’Émile, le SDF, l’émancipation, mais aussi le déracinement. La joie de vivre de préado d’Akissi, sa maladresse, sa complicité-rivalité avec son frère en font un personnage qu’on a envie de suivre. Les rues de Paris ne sont pas aussi colorées que celles d’Abidjan mais très animées aussi sous le dessin de Mathieu Sapin, complice de Marguerite Abouet auteur de la fameuse Aya de Yopougon et dont la vie a inspiré cette histoire.
Marianne Baby