Que recouvre la technologie douce ? Comment transmettre aux élèves la notion d’impact environnemental faible ? Delphine Séchet, enseignante de SVT au lycée de l’Essouriau aux Ulis (91) « co-construit un support destiné à faciliter les révisions avant une évaluation de fin de séquence en terminale enseignement scientifique ». En lien avec l’INRIA, l’enseignante a choisi des outils qui utilisent des fichiers légers et qui limitent les transferts entre serveurs. Cela permet « une écriture sans distraction en séparant le fond de la forme ».
Qu’est-ce qu’une technologie douce ?
L’expression technologie douce est une traduction de low technologie que l’on retrouve souvent sous la forme « low tech ». Il s’agit en fait d’une démarche où on va chercher à respecter trois grands principes : la solution ou l’usage construit doit être utile en répondant aux besoins de personnes ou de collectifs, accessible facilement et au plus grand nombre, et durable. On pense souvent que c’est une démarche dans laquelle on n’utilise pas de technologies en particulier numériques. En fait, il s’agit, par exemple, de faire des choix en construisant des usages numériques efficaces tout en minimisant leur impact environnemental.
Comment expliquer ce projet en quelques mots ?
Avec ce projet on cherche à utiliser, avec les élèves, des technologies efficaces et faciles à prendre en main tout en ayant un faible impact environnemental. Le but est de co-construire un support destiné à faciliter les révisions avant une évaluation de fin de séquence en terminale enseignement scientifique. La stratégie choisie vise également à organiser un travail de groupe où les élèves sont amenés à compléter la partie questions/réponses d’un support de micro-learning (micro-apprentissage) en partie réalisé à partir des éléments travaillés en classe.
En quoi ce projet s’inclut-il dans le programme d’enseignement scientifique ?
On fait le choix de réaliser cette activité de consolidation pour traiter de la partie du programme de terminale enseignement scientifique sur la modélisation du climat du futur. Cela permet, tout en révisant les notions de montrer un usage numérique scolaire à la portée de tous et qui peut servir d’exemple pour la partie « énergie, choix de développement et futur climatique ». C’est important pour les élèves de terminale qui prennent conscience de l’urgence à agir pour limiter le réchauffement climatique et qui se trouvent parfois démunis pour mettre en place des actions concrètes. Ils utilisent finalement beaucoup de solutions numériques fournies par les collectivités territoriales et les académies sans pouvoir faire des choix. C’est également une façon d’enrichir leur réflexion et de montrer que des oppositions très simplifiées de type numérique/analogique ne sont pas forcément les plus pertinentes pour penser les changements à opérer.
Quels sont les outils utilisés ?
J’ai choisi d’utiliser des outils très faciles d’accès, gratuits et open source. Ces outils devaient également être faciles à utiliser et fonctionner en produisant des fichiers légers. Enfin les transferts de données entre serveurs et applications devaient être limités.
Tout d’abord, l’éditeur collaboratif CodiMd mis à disposition de tous les enseignants et agents de l’Education Nationale par la Direction du Numérique pour l’Education. Cet éditeur de notes et de diaporama utilise la syntaxe Markdown et permet une écriture sans distraction en séparant le fond de la forme. Cette syntaxe a la particularité d’être très simple et de pouvoir être maîtrisée en quelques minutes. Les pages auxquelles les élèves se sont connectés étaient déjà organisées à l’aide d’un modèle fourni par Cédric Eyssette, un collègue de Philosophie chargé de projets à la direction régionale du numérique éducatif de Lyon qui développe des applications, libres et gratuites pour les enseignants. Les groupes d’élèves pouvaient y construire leurs questions et réponses autour d’une partie de cours à réviser puis partager leur travail.
Pour le volet recherche de sobriété numérique l’avantage de la création de documents collaboratifs rédigés en markdown est la grande légèreté des documents produits.
Les questions/réponses partagées pouvaient ensuite être facilement corrigées et copiées dans l’éditeur du logiciel de micro-learning ePoc pour créer un micro-cours destiné aux révisions des élèves. La solution ePoc comporte également une application pour smartphone mise à disposition par l’INRIA. Elle héberge des modules courts, engageants et ludiques. Les élèves doivent installer l’application sur leur téléphone puis ajouter le fichier de chaque « ePoc » (Electronic Pocket Open Course) créé. L’ensemble représente quelques dizaines de Mo seulement. Cette application ne collecte aucune donnée personnelle et ne nécessite pas d’accès à internet une fois les fichiers chargés.
Pour quels retours des élèves ?
Pendant la séance les élèves ont apprécié de retrouver les contenus de cours organisés sous la forme d’un micro-cours mis en démonstration sur des tablettes et de pouvoir vérifier leur maîtrise de points de cours précis. Ils ont tous pu rédiger des ensembles de questions et de réponses et la prise en main de l’application CodiMd a été rapide. La perspective de réaliser une ressource utile à leurs révisions a contribué à leur engagement. Le travail de groupe a également suscité de nombreuses discussions et fait émerger chez certains élèves des représentations initiales (souvent relatives au trou dans la couche d’ozone) qui n’avaient pas encore été remplacées par un système explicatif en cohérence avec les connaissances scientifiques actuelles. Le groupe a alors pu travailler sur de meilleures formulations. Certains élèves ont demandé à télécharger l’application sur leur smartphone immédiatement et l’ont utilisée tout de suite. Ils ont apprécié la facilité d’utilisation et l’ergonomie de son interface.
L’expérimentation a eu lieu en fin d’année scolaire et doit être poursuivie cette année. Il est prévu de recueillir par un questionnaire des données plus précises sur l’utilisation réelle de l’application dans le cadre de révisions.
Des conseils à donner pour des enseignants qui souhaitent se lancer ?
La prise en main de l’application smartphone/tablettes ePoc peut se faire en explorant les mini-cours mis à disposition par l’INRIA comme par exemple : le smartphone et la planète. La création d’un ePoc avec l’éditeur installé sur un ordinateur est simple et de nombreuses vidéos d’accompagnement sont disponibles dont celles de S. Bergeot sur le site SVT de l’académie de Versailles. Par ailleurs un salon de discussion sur la messagerie instantanée Tchap permet de trouver de l’aide et de partager ses productions.
CodiMd peut être utilisé pour ce projet mais également pour de nombreux autres usages. Les modèles mis à disposition par Cédric Esseytte peuvent être utilisés tels quels ou adaptés avant d’être enrichis par les contributions des élèves. Un tutoriel de CodiMd est également disponible.
Je recommande de commencer par produire une ressource très courte et de la faire tester aux élèves, plutôt en début d’année, avant de leur faire co-construire les questions et les réponses d’un mini-cours.
Propos recueillis par Julien Cabioch