J-7 pour les élèves, J-4 pour les professeur.es : c’est la semaine de rentrée des syndicats, des personnels de l’Éducation nationale. Et à ce jour, la ministre de l’Éducation nationale est démissionnaire. Pourtant le ministère organise la conférence de presse de rentrée demain, mardi 27 août avec … Nicole Belloubet. A la veille d’une nomination -imminente ?- d’un ou une Premier ou Première Ministre, si Nicole Belloubet peut tenir une conférence de presse rue de Grenelle, c’est peut-être parce que quel que soit le ou la ministre du prochain gouvernement, la politique menée sera celle d’Emmanuel Macron. Le président n’a-t-il pas affirmé à la rentrée dernière que l’éducation était un domaine réservé ?
Une rentrée avec un 6e ministre de l’Éducation nationale du président Emmanuel Macron ?
Le deuxième mandat d’Emmanuel Macron se caractérise par une valse des ministres rue de Grenelle. En deux ans, quatre ministres ont défilé pour que rien ne change : Pap Ndiaye, Gabriel Attal, Amélie Oudéa Castéra, Nicole Belloubet. Depuis 2017, c’est une politique de la continuité avec des réformes qui vont bon train et des voix qui s’élèvent, côté syndical comme politique pour dénoncer le projet et les réformes imposées.
Depuis le premier quinquennat et l’ère Blanquer, le projet est le même avec un changement de méthode observé durant ce deuxième mandat. Si le départ de Nicole Belloubet -nommée en février- se confirme, le prochain ou la prochaine ministre changera-t-il ou t-elle de politique éducative ? Seul un ministre du Nouveau Front Populaire portera un programme de rupture. Le programme du NFP propose des mesures d’urgence qui abrogent les réformes de tri social mises en place par les ministres du président Macron. Il s’agit là de la réforme du collège de la rentrée, du choc des savoirs, mais aussi de Parcoursup, comme du SNU. Le programme du NFP propose aussi de baisser les effectifs des classes, d’investir dans la médecine scolaire, tout comme la revalorisation salariale des personnels. Il défend aussi la gratuité scolaire comme des mesures en faveur de la mixité sociale.
Une rentrée sans ministre, mais avec une feuille de route
Pour le moment, la rentrée se prépare sans ministre. Certes, la feuille de route d’Emmanuel Macron est connue, mais c’est au moins une trêve dans les déclarations ou les polémiques. La rentrée se prépare dans les établissements scolaires dès le printemps ou l’été précédant la rentrée, notamment avec les DHG dans les collèges et lycées. Caroline Pascal, nommée Dgesco au conseil des ministres le 17 juillet assure la continuité de la politique avec ses services. La circulaire de rentrée pour la réforme du choc des savoirs a été publiée le 26 juin 2024 par la ministre de l’Éducation nationale Nicole Belloubet.
Emmanuel Macron : des réformes qui vont bon train
On a assisté ces sept dernières années à une accélération de réformes structurantes et structurelles du système éducatif. Après la réforme du lycée professionnel, du lycée, du bac, c’est au tour du collège. Les réformes ouvrent la voie à un changement et recul historique qui entérine la logique de tri social en se dirigeant vers une orientation précoce. Les réformes du lycée, comme du lycée professionnel et désormais du collège séparent les élèves et détruisent le commun à l’École. C’est l’école commune, l’École du vivre et de l’apprendre ensemble, l’École inclusive qui s’éloigne dans les faits au profit d’une École de la séparation.
La réforme du lycée a cassé le groupe classe, au nom du libre choix, mais qui n’a pas endigué la reproduction des filières et leur répartition non seulement genrée mais sociale. La réforme de la voie professionnelle est également une réforme de l’assignation sociale et spatiale pour des élèves majoritairement issus des classes populaires. Cette vision de l’École n’entérine-t-elle pas une vision de la société de classes qui renonce à un projet démocratique de cohésion sociale et nationale ? L’esprit de la réforme du collège, c’est une École qui doit davantage trier et séparer selon leurs résultats les enfants dès 11 ans. Et au vu de la relation entre les trajectoires et résultats scolaires marquées par les inégalités et origines sociales, c’est une politique de ségrégation sociale et scolaire.
L’École du président Macron, c’est l’École du ressentiment anti-démocratique, une École dangereuse pour la société et la démocratie à l’heure où son avenir réside plus que jamais dans sa jeunesse. Une rentrée sans ministre et sans la communication associée -donc sans contrefeux vestimentaires- sera peut-être l’occasion de parler des véritables sujets de l’École.
Changer de cap, mettre fin aux réformes incessantes décidées sans concertation ni adhésion du terrain, voilà peut-être ce qui serait une bonne nouvelle pour la rentrée 2024 pour les personnels de l’Éducation nationale ?
Djéhanne Gani