L’autorité en classe est souvent perçue négativement, associée à l’autoritarisme et à la soumission. Cependant, une conception plus nuancée et constructive de l’autorité, celle de l’autorité éducative, permet de structurer l’environnement d’apprentissage tout en respectant la dignité et les droits des élèves. Le dernier numéro d’Edubref, réalisé par Marie Gaussel, explore comment cette forme d’autorité, loin d’être permissive ou punitive, peut créer un climat favorable à l’apprentissage et à la réussite scolaire.
Redéfinir l’autorité éducative
L’autorité en classe est souvent perçue de manière négative, associée à l’autoritarisme et à la soumission. Cependant, une conception plus nuancée et constructive de l’autorité peut être mise en avant : celle de l’autorité éducative. Cette dernière, loin d’être permissive ou punitive, se place au cœur des relations d’enseignement et vise à instaurer un climat favorable à l’apprentissage et à la réussite scolaire.
Historiquement, le terme « autorité » a évolué et ses connotations ont varié nous rappelle Marie Gaussel. L’étymologie latine du mot, « auctoritas », suggère une capacité à guider, inspirer, conseiller, et autoriser. Ainsi, l’autorité éducative se présente comme une force qui permet de structurer l’environnement d’apprentissage tout en respectant la dignité et les droits des élèves.
Concevoir l’autorité uniquement à travers le prisme de l’obéissance et de la soumission occulte la dimension altruiste de la relation d’enseignement-apprentissage. L’autorité éducative implique de savoir quand imposer, sanctionner, convaincre, et quand autoriser, concéder, négocier. Cette flexibilité permet de maintenir des modalités optimales d’apprentissage. Cependant, pour que cette autorité soit légitime, elle doit être pratiquée de manière équitable et acceptée par l’ensemble de la communauté éducative, y compris les élèves.
L’autorité, source de malentendus et de normes
Le concept d’autorité en classe est une source fréquente de malentendus. Les enseignants doivent constamment se poser la question de ce qui est juste et bon, cherchant à créer des conditions propices aux apprentissages des élèves. L’autorité ne doit pas être confondue avec la domination ou l’imposition de décisions arbitraires. Elle doit au contraire être perçue comme une forme de médiation éthique entre les individus, permettant de restaurer les liens sociaux et de faciliter la prise de conscience des règles par les élèves.
Pour fonctionner efficacement, l’autorité en classe repose sur un ensemble de normes instituées. Les enseignants, investis de la compétence d’enseigner, exercent un pouvoir statutaire qui génère un rapport de force asymétrique, considéré comme nécessaire pour tout acte éducatif. Ce pouvoir doit être utilisé de manière réfléchie et éthique pour être accepté et respecté par les élèves.
L’autorité en classe vise également à normaliser les comportements des élèves, à travers l’adoption de normes d’obéissance et de respect des règles scolaires. Ce processus, parfois implicite et conflictuel, est essentiel pour établir un climat de classe harmonieux et propice au travail. Il s’agit de permettre aux élèves de développer les compétences nécessaires à leur intégration et à leur réussite à l’école.
Une autorité bienveillante pour l’autonomie des élèves
Pour les enseignants, il est crucial d’articuler posture autoritaire et posture bienveillante. L’autorité bienveillante tisse un lien de confiance entre l’enseignant et l’élève, sans occulter la dimension asymétrique de la relation éducative. Cette autorité vise à accompagner les élèves vers une autonomie fonctionnelle, morale et intellectuelle, en les guidant sans les soumettre ni les laisser chercher seuls leurs propres limites.
Cette approche repose sur un positionnement éthique fort, qui prend en compte les capacités et les besoins des élèves, tout en maintenant un cadre éducatif structuré. L’autorité bienveillante se base sur la confiance réciproque et la reconnaissance de l’élève comme une personne capable d’apprendre et de se développer de manière autonome.
Ainsi, la construction de l’autorité éducative est un processus itératif qui s’inscrit dans la durée. Les enseignants développent leur compétence d’autorité à partir d’un ensemble d’expériences vécues en classe, ajustant continuellement leur pratique pour répondre aux besoins des élèves et favoriser un climat d’apprentissage positif.
Loin des discours actuels sur l’autorité du Premier ministre, ce dernier numéro d’Édubref appelle à redéfinir l’autorité en classe comme une force bienveillante et structurante qui permet de créer un environnement où les élèves peuvent s’épanouir et devenir autonomes. Penser l’autorité comme une autorité éthique – qui respecte la dignité des élèves et les guide vers une meilleure compréhension et respect des règles, tout en favorisant leur développement personnel et académique – c’est là le véritable enjeu de l’autorité à l’école. On voit mal les annonces de la ministre en la matière s’inscrire dans cette vision légitime de l’autorité.
Lilia Ben Hamouda