« Favoriser la prise de décision des enfants améliore leur bien-être, leur estime de soi et leurs capacités de leadership dans l’objectif de forger leurs compétences et leur confiance en tant que membres à part entière de la société ». Ce ne sont pas les enseignants, les syndicats ou même « pédagogistes » qui le disent, c’est l’OCDE dans son dernier rapport. Claude Lelièvre fait le lien dans cette tribune entre cette préconisation et la « grande concertation » sur l’autorité voulue par Gabriel Attal. Pourtant, les propositions pour tendre vers cette préconisation onusienne ne manquent pas, le dernier livre « Manifeste pour les collèges. (P)oser les vrais problèmes » de Roger-François Gauthier et Jean-Pierre Véran n’en manque pas comme le souligne Claude Lelièvre.
Les organisations syndicales représentatives de l’enseignement privé sous contrat ont « décidé un boycott unanime de la concertation sur l’autorité à l’École » après celles de l’Éducation nationale (à l’exception du SNALC). Il est sans doute bel et bon qu’il en soit ainsi, cette parodie de concertation se faisant sur fond d’autoritarisme affiché, notamment par le Premier ministre Gabriel Attal.
Il reste que l’École devrait progresser dans la formation des élèves à la responsabilité
Et cela n’a pas été vraiment le cas jusqu’ici en dépit de l’orientation très claire qui avait été proclamée il y a plus de 70 ans par le Plan Langevin-Wallon et par Paul Langevin lui-même : « Ainsi se dégage la notion du groupe scolaire à structure démocratique auquel l’enfant participe comme futur citoyen et où peuvent se former en lui, non par les cours et les discours, mais par la vie et l’expérience, les vertus civiques fondamentales : sens de la responsabilité, discipline consentie, sacrifice à l’intérêt général, activités concertées et où on utilisera les diverses expériences de “self-government” dans la vie scolaire. »
OCDE : « Favoriser la prise de décision des enfants » ?
Il se trouve que dans son rapport sur l’« empowerment » publié le 15 mai dernier, l’OCDE a mis en valeur que « favoriser la prise de décision des enfants améliore leur bien-être, leur estime de soi et leurs capacités de leadership dans l’objectif de forger leurs compétences et leur confiance en tant que membres à part entière de la société ». Et le secrétaire général de l’organisation internationale Mathias Corman a souligné dans sa conférence de presse qu’« avoir un impact sur les décisions qui les concernent permettrait aux jeunes d’agir sur des sujets qui les concernent directement et servir les enfants en matière de compétences sociales »
Dans leur « Manifeste pour les collèges. (P)oser les vrais problèmes » – qui vient d’être publié par Librinova, Roger-François Gauthier et Jean-Pierre Véran proposent toute une panoplie d’actions à envisager pour aller dans le sens de la voie indiqué par Paul Langevin dont ils se réclament explicitement – signe des temps, de notre temps, enfin ?
« Voici des axes d’actions à envisager dans le domaine de la ‘’vie scolaire’’ » : remplacer les formules rebutantes de style ‘’règlement intérieur’’ par l’élaboration collective de ‘’constitutions’’ de chaque collège traitant de l’ensemble des missions de celui-ci ; éviter l’accaparement des fonctions électives et de délégation par un petit nombre d’élèves en multipliant les rôles (dans les domaines de la documentation, de l’administration, de l’intendance, etc.) tout en les faisant tourner et en accompagnant les élèves dans la maîtrise de ces fonctions diverses (inspiration de la pédagogie Freinet).
Dans le domaine du pilotage général du fonctionnement du collège, plusieurs pistes sont envisageables : veiller à ce que les diverses fonctions de direction (des équipes techniques, de l’établissement lui-même, de ses conseils, des rapports avec les hiérarchies) soient partagées à tour de rôle avec des élèves, grâce à la constitution possible, pour des temps limités, de ‘’gouvernements d’élèves’’ ; instaurer une évaluation et des moments de réflexion sur les fonctionnements collectifs : heure de vie de classe à pratiquer régulièrement et à faire évaluer ; contribution effective des conseils de vie collégienne à la prise en compte des points de vues et initiatives des élèves, en particulier sur les questions débattues au Conseil d’administration, à l’ordre du jour duquel ils auront part ; ‘’journée d’évaluation de la démocratie’’ dans l’établissement ; favoriser de manière continue les coopérations entre élèves et groupes d’élèves, entre élèves et personnels, entre élèves, parents et personnels, et avec tous les partenaires locaux du collège, dans le cadre des enseignements comme dans celui plus large de la vie du collège dans son territoire […]
Inciter et former les collégiens à s’engager dans la vie sociale et civique du territoire (bénévolat associatif, conseils de jeunes, etc.) et tenir compte, dans l’évaluation de leurs acquis, de la part effective de cet engagement dans leur curriculum ; tenir dans chaque collège un livre de bord sur la fréquence, les contenus, la prise en compte dans les évaluations, des enseignements touchant aux valeurs démocratiques et à la citoyenneté et leur ‘’prise’’ sur les élèves »
Claude Lelièvre