La créativité peut-elle favoriser l’inclusion ? C’est ce que tend à démontrer le projet mené par Isabelle Kesler, professeure-documentaliste au collège Théophraste Renaudot de Saint-Benoît dans la Vienne. Sur le thème du printemps, les élèves de la section Unités Localisées pour l’Inclusion Scolaire (Ulis) ont écrit des haïkus, ces fulgurations poétiques cherchant à saisir une sensation éphémère. Les poèmes ont été ensuite enregistrés, puis valorisés sous la jolie forme d’un petit « arbre à haïkus sonores » dont les feuilles sont ornées de QR Codes. Rencontre avec une enseignante qui conçoit le CDI comme « un tiers-lieu interdisciplinaire inclusif et numérique, au service de projets en EMI notamment »…
En quoi consiste ce projet que vous avez présenté au Forum des Enseignants Innovants du Café pédagogique ?
Un projet tout simple : la réalisation d’un petit arbre à haïkus sonores par un système de feuilles sous forme de QR Code. L’arbre a ensuite été mis en salle de la section Ulis après une valorisation au CDI pendant 3 semaines environ.
Ce projet numérique était en co-animation avec l’ex coordonnatrice de la section Ulis, Justine Rabbin. Les élèves venaient une fois par semaine pendant deux heures. Différentes activités leur sont proposées à ce moment en concertation avec ma collègue : découverte du CDI, portail documentaire, expression créative à partir de livres, et des activités en EMI bien évidemment.
Quelle a été l’inspiration derrière le choix de faire travailler les élèves sur la rédaction de haïkus sonores en partant de leur vision du printemps ?
C’était une idée que j’avais depuis longtemps et qui enfin a pu se concrétiser. Une collègue intéressée et des élèves motivés.
Le Haïku est une forme courte facile à s’approprier pour des élèves à besoins particuliers. J’avais envie aussi de leur faire découvrir une autre culture. Leur montrer que leur représentation (ici le printemps) peut-être prise en compte et valorisée au sein du collège par la suite. Les élèves à besoins particuliers manquent souvent de confiance en eux et ont besoin d’être encouragés.
Comment cette idée s’est-elle intégrée dans le contexte interdisciplinaire de votre projet ?
En documentation, la circulaire de mission est très variée et permet la mise en place de projets avec des disciplines de tout horizon. Un des axes est l’EMI à travers la recherche documentaire (évaluation de l’information) mais aussi l’écriture médiatique , la création de médias et la problématique centrale de la publication en ligne.
Le fil conducteur c’est donc l’EMI à travers la découverte et l’utilisation d’outils numériques responsables. La mise en voix facilitée par des outils simples et la publication sur une plate-forme RGPD.
Pour la première séance, j’ai choisi tout simplement de leur présenter des ressources autour du printemps.
Pouvez-vous nous partager des détails sur la sélection des ressources utilisées ?
J’ai utilisé les ressources physiques et numériques du CDI . J’ai collecté des documents sur les animaux, les saisons etc. en utilisant notamment le portail documentaire Esidoc et le bouquet de presse en ligne “Cafeyn” pour étoffer le corpus avec des articles récents de périodiques ( La revue Salamandre , Wapiti ) . J’ai aussi trouvé un documentaire papier, un recueil d’haïkus sur la nature que ma collègue, Justine , a présenté en classe aux élèves.
J’avais donc sélectionné en amont les ressources pour gagner du temps et permettre aux élèves de commencer à écrire leurs poèmes . Ma collègue a travaillé sur l’écriture des Haïkus avec les élèves .
Au CDI ils ont mis en voix les poèmes et se sont entraînés à la lecture . L’enregistrement s’est fait en séquençant les phrases . J’ai eu la chance à ce moment d’avoir une stagiaire MEEF1, mention documentation, qui m’a beaucoup aidée pour enregistrer les élèves et gagner du temps .
Quels usages faites-vous des outils numériques ?
J’adapte les outils aux élèves avant tout . Logimix permet un mixage des sons très simplement . ( Sons déjà intégrés) et permet de récupérer les sons enregistrés avec Digirecord . Je préconise la version portable de Logimix sur clé USB si l’outil n’est pas installé sur le réseau de l’EPLE.
Ils permettent de valoriser le travail des élèves par notamment la publication des productions sur le site Esidoc du collège . Je prends aussi en compte l’environnement numérique de mon lieu de travail . Le CDI n’est pas encore bien équipé. Je suis donc obligé de contourner les obstacles : Utilisation de mon propre pc portable pour l’enregistrement. La suite numérique les outils de la digitale est particulièrement précieuse. Aucune inscription requise pour travailler. Digirecord , un enregistreur en ligne est très intuitif . J’essaie toujours d’utiliser si c’est possible des outils vertueux concernant les données personnelles ou bien RGPD .
Quels ont été les principaux obstacles que vous avez rencontrés pendant la mise en œuvre du projet ?
La mise en œuvre de l’écriture des haïkus : toute seule c’était impossible pour moi car je ne suis pas formée pour l’accompagnement individualisé des élèves à besoins particuliers. Travailler par projet est donc une évidence . C’est ma collègue qui a su motiver et accompagner pas à pas les élèves dans sa classe.
La logistique numérique au départ peu favorable. Comment faire enregistrer les élèves sans matériel ? Le Byod n’étant pas possible surtout avec des élèves à besoins particuliers.
J’ai donc décidé de faciliter la tâche au maximum à ma collègue pour la réalisation du projet et me concentrer sur le contenu. J’ai fait des recherches sur des sites professionnels et des sites académiques. J’ai utilisé les tutoriels de la SDRANE académique sur Apps Éducation pour être sûre de bien utiliser Portail Tube qui permet de génerer des QR Code directement . Désormais tous les sons de mes projets ( podcast, journal du collège etc…) sont hébergés sur cette plate-forme.
Ce projet était motivant car il m’a permis par son caractère interdisciplinaire de partager des pratiques . De faire découvrir au passage les outils de la Digitale et la plateforme Apps Education . Nuage, le service de Cloud , a permis de partager les sons enregistrés avec ma collègue dans un dossier avant de les publier en ligne.
Ce projet est à l’image du CDI est, un tiers-lieu interdisciplinaire inclusif et numérique, au service de projets en EMI notamment.
Propos recueillis par Julien Cabioch