C’est dans un Bulletin Officiel spécial qu’est parue la note de service « organiser les enseignements de français et de mathématiques en groupes afin d’élever le niveau de tous les élèves ». Si la publication au Journal Officiel a donné les grandes lignes de la nouvelle organisation du collège dès la prochaine rentrée, celle au Bulletin Officiel est beaucoup plus détaillée. La souplesse promise par Nicole Belloubet y est bien indiquée. Quant au combat sémantique groupe de niveau/groupe de besoin, la ministre de l’Éducation l’emporte sur son Premier ministre.
« Un enseignement organisé en groupes de besoins est instauré en français et en mathématiques pour les classes de sixième et de cinquième à la rentrée 2024 et à compter de la rentrée scolaire 2025 pour les classes de quatrième et de troisième » indique la note de service – qui « précise les objectifs et modalités de mise en œuvre de ces groupes » – datée du 15 mars et publiée le 18 mars dans un BO spécial. « Les enseignements de mathématiques et de français sont organisés en groupes, communs à plusieurs classes, sur la totalité de l’horaire hebdomadaire », confirme le texte. Si le Journal Officiel n’indique pas de limite au nombre d’élèves maximum dans le groupe des élèves en difficulté, la note de service évoque de « effectifs réduits ». « Le nombre d’une quinzaine d’élèves pouvant, à cet égard, constituer un objectif pertinent », préconise-t-elle.
Des groupes fondés sur « l’expertise des professeurs »
La composition des groupes s’appuie sur l’analyse par le chef d’établissement et les équipes pédagogiques des besoins spécifiques de chaque élève. Les indicateurs sur lesquels devront s’appuyer ces derniers sont, certes, les évaluations nationales comme annoncé, mais les conseils école-collège et l’expertise des professeurs sont aussi mentionnés. « Grâce à leur expertise, les équipes pédagogiques constituent les groupes en fonction des besoins des élèves » est-il encore indiqué.
Comme promis, la composition des groupes n’est pas figée, elle pourra être réexaminée au cours de l’année scolaire « afin de tenir compte de la progression et de la diversité des besoins des élèves, selon les disciplines, mais aussi, par exemple, les chapitres des programmes ».
Une dérogation que semble préconiser le texte
« Par dérogation à cette organisation générale, les élèves peuvent être regroupés conformément à leur classe de référence, pour une ou plusieurs périodes, sur une à dix semaines dans l’année ». Si le système de regroupement est mentionné comme dérogatoire, le texte semble tout de même largement y inciter. Ces temps permettent « d’alterner, toujours en référence aux programmes, les temps en groupes pour répondre aux besoins des élèves, qui ciblent des connaissances et des compétences précises, et des temps en « groupe classe » » est-il écrit. « Le premier temps de l’année peut être nécessaire pour mieux observer les élèves dans la classe et dans l’acquisition des apprentissages de manière à comprendre leur profil et à identifier les besoins. En cours d’année, le retour à un enseignement en classe et non plus en groupes, durant un temps à définir par les équipes, mais qui doit demeurer l’exception au regard du principe, permet de réexaminer le niveau atteint par les élèves et leurs besoins, et la composition des groupes pour les périodes suivantes ».
L’alternance entre groupes et classe entière doit s’opérer « sur un ensemble de semaines ou par période et, en aucune manière, en fragmentant l’horaire hebdomadaire », précise la note de service. Ce sont les établissements qui apprécient « la fréquence la plus adaptée pour ajuster la composition des groupes (changement de chapitre des programmes, périodes, trimestres) ».
Le texte prévoit aussi, dans les rares situations où il y aurait plus de groupes que de divisions, que « lors des périodes en regroupement des élèves dans leur classe de référence, le professeur supplémentaire peut intervenir en co-enseignement aux côtés de ses collègues ».
Un travail collectif sans temps dédié dans l’année
Du côté pédagogique, le texte indique qu’enseigner en groupes « repose sur un travail collectif des équipes pédagogiques, condition indispensable du progrès des élèves ». Un travail collectif qui doit être accompagné par les chefs d’établissement qui organisent des réunions régulières. Sur quel temps ? La note ne le précise pas. Avant le mois de juin, deux demi-journées seront banalisées afin que les professeurs définissent des objectifs d’apprentissage communs par période sur lesquels repose la progression de chacun des professeurs.
Cette organisation serait censée permettre le passage d’un groupe à l’autre des élèves en cours d’année… Pourtant, peu de chance que le groupe des « bons » aille à la même allure que le groupe des moins bons. « L’organisation retenue doit permettre de se prémunir de tout risque d’assignation des élèves », prévient pourtant le texte. « Il ne s’agit pas d’affecter un élève dans un groupe fixe toute l’année, mais de constituer des groupes évolutifs en fonction des besoins et compétences des élèves, sans que d’autres critères, tels que la situation de handicap, n’entrent en ligne de compte ».
Des professeurs des écoles qui peuvent intervenir en co-enseignement
Les heures des enseignements de français et de mathématiques seront alignées dans l’emploi du temps, « de manière commune à plusieurs classes, sur la totalité de l’horaire hebdomadaire, ce qui permet de composer des groupes avec des élèves issus de différentes classes et partageant les mêmes besoins ». « En fonction de son contexte propre », chaque établissement pourra déterminer le nombre d’alignements de classes à réaliser.
Quant aux moyens, le texte ne manque pas d’ironie. Il évoque des moyens supplémentaires qui « offrent des conditions d’enseignement optimales aux élèves les plus en difficulté ».
Les professeurs des écoles – jamais évoqués par le ministère dans cette nouvelle organisation – peuvent « intervenir en co-enseignement dans le cadre des enseignements de français et de mathématiques » dans le cadre du Pacte nous apprend la note.
La note se termine sur la possibilité de consulter des documents ressources sur le site Eduscol. Documents qui ne sont pas encore disponible, indique le site, « un ensemble de ressources pédagogiques et organisationnelles viendra compléter l’information nécessaire à la mise en œuvre : des diaporamas à l’attention des personnels, des fiches pratiques pour les professeurs, un vademecum ».
Lilia Ben Hamouda