La rentrée scolaire sera encore une fois sanglante à Paris selon les organisations syndicales et les associations de parents d’élèves. Dans le 19e arrondissement, pour la deuxième année consécutive, ce sont 21 fermetures de postes dans le 1er degré qui ont été annoncées pour la rentrée 2024, faisant suite aux 19 suppressions de 2023, dont la plupart en éducation prioritaire. Alors parents et enseignants s’organisent. À l’école Cambrai, on se mobilise contre la fermeture de la classe. Au 5 mars, ils et elles organisaient un rassemblement le 5 mars devant le rectorat, une nuit à l’école le vendredi 8 mars, une flashmob devant l’école le mardi 14 mars et une grève prévue le 15 mars. À l’école Eva Kotchever, dans le 18e, parents et enseignant·es se mobilisent pour le classement en éducation prioritaire.
Fermeture de classe dans une école en éducation prioritaire
L’école maternelle Cambrai est une école en éducation prioritaire, située dans un quartier populaire du 19e arrondissement, elle multiplie les labels, REP, QPV, Cité éducative. Un des enseignantes parle d’une école maternelle de quartier dont le quotidien est de vivre ensemble qui fait le lien entre tous les habitants. «L’IPS est bas, il y a des situations complexes, mais l’école a une bonne réputation, il y a une certaine mixité sociale grâce à une équipe dynamique qui mène de nombreux projets, comme par exemple une classe de mer pour les Grandes Sections, classe poney pour les Moyennes Sections, journée à la ferme pour les Petites Sections, sans oublier la chorale, la danse, le partenariat avec le 104, structure artistique du quartier.» Pourtant, cette école est menacée par une suppression de poste. La fermeture d’une classe est liée à une baisse démographique conjoncturelle l’explique Virginie*, professeure dans cette école. Si dans le secteur approvisionnant l’école, une cité est bien en réhabilitation, avec « certaines familles sont relogées temporairement ailleurs », un ensemble immobilier également rattaché à l’école est sur le point d’être livré. « Or, la fermeture de la classe annoncée pour la rentrée 2024 ne prend pas cet aspect démographique conjoncturel ni les perspectives à très court terme », dénonce l’enseignante.
Alors, pour dénoncer la situation, parents et enseignants se sont adressés au Président de la République sur l’air de la chanson de Boris Vian, « «Monsieur le Président, je vous fais une lettre, que vous lirez peut-être, si vous avez le temps. Ma mère est en colère, ma maîtresse désespère, ça c’est la carte scolaire, encore une classe fermée! Monsieur le Président, Il ne faut pas le faire, en zone prioritaire, écoutez les enfants. C’est pas pour vous fâcher, ne faites pas de bêtises, ne fermez pas Cambrai. Touche pas à mon école, touche pas à ma maîtresse, si mon avenir s’envole, mes rêves disparaissent. Laissez-moi bien grandir, laissez-moi m’épanouir, développer mes talents et devenir Président!».
Dans le 18e, les parents exigent un classement en éducation prioritaire
À l’école Eva Kotchever dans le 18e arrondissement, c’est aussi le branle-bas de combat. Ici les parents ne se battent pas contre une fermeture de classe, mais pour le classement en éducation prioritaire de leur petite école. Située dans le Nord parisien, l’école primaire est sortie de terre il y a à peine cinq ans. Elle a été livrée dans le cadre du grand projet de réaménagement Chapelle Internationale de la porte de la chapelle. Si promoteurs et élus tablaient sur l’arrivée dans l’école des cadres supérieurs occupant une partie des logements, leurs espoirs sont déçus. Pour beaucoup, c’est l’une des deux écoles privées du secteur qui accueille leur enfant. Conséquence directe, très peu de mixité à l’école Eva Kotchever comme nous l’explique Marie Deschard, parent d’élève élue. « Cela fait 1290 jours que nous, parents d’élèves, élus et enseignants, nous nous battons pour obtenir le classement de notre école en Réseau d’Éducation prioritaire (REP) ». Pourtant l’école coche toutes les cases selon elle : quartier prioritaire de la ville, zone de cité éducative et près de la moitié des familles qui vivent en dessous du seuil de pauvreté. L’IPS est d’ailleurs de 81,7. Cette école, qui se trouve à 200 mètres du site olympique Adidas Arena, ne saurait avoir le précieux label – qui garantirait plus de moyens, de petits effectifs et de pérenniser les équipes grâce à une rémunération attractive, « sinon cela ferait fuir les CSP » a affirmé le Dasen en 2021. Parents et enseignant·es appellent à se mobiliser aujourd’hui à 9h, devant l’école.
Lilia Ben Hamouda et Djéhanne Gani