Lister, trier les nombres premiers mais aussi décomposer un nombre en facteurs premiers sont les possibles des logiciels d’Alain Barnier. Ce professeur de mathématiques retraité et membre actif de l’APMEP à Marseille, propose des logiciels accessibles à tous. « Ces programmes concernant les mathématiques peuvent être utiles à ses collègues en activité ». Son but est de « faire en sorte que les élèves aient du plaisir à travailler et trouvent de l’intérêt dans ce qu’on leur enseigne ».
Qu’est-ce que ce logiciel sur les nombres premiers ? À qui s’adresse-t-il ?
Ce logiciel permet de calculer et lister rapidement les nombres premiers jusqu’à de grandes valeurs ou rangs et aussi d’en afficher des séquences entre deux rangs ou deux valeurs.
Chaque nombre affiché y est accompagné de son rang. Il permet aussi de décomposer les nombres entiers en facteurs premiers, ceci dans la même cession du logiciel.
Tous les nombres premiers calculés ou utilisés pendant une session sont mémorisés, mais sont effacés de la mémoire vive à la fin de celle-ci. Évidemment, il y a des limites à respecter pour que les calculs ne soient pas trop longs. Il existe des versions du logiciel qui utilisent des fichiers de nombres premiers pré-calculés.
Une option permet d’étudier les couples de nombres premiers consécutifs dont l’écart est constant. Les nombres jumeaux, par exemple.
Tous les programmes que j’ai écrits le sont en C++. Les entrées sont sécurisées : une entrée incompatible et redemandée mais ne plante pas le logiciel. Les commandes sont simples et leur signification est expliquée et rappelée en cours d’utilisation. Ils sont tous téléchargeables et libres d’utilisation.
Ce logiciel, facile d’emploi, peut être utilisé chaque fois que les nombres premiers figurent dans un programme (collège, lycée ou supérieur). Il permet une approche expérimentale de cette notion à différents niveaux et pour de grandes valeurs à notre échelle.
Qu’est-ce qui vous a motivé à écrire vos logiciels et programmes autour des mathématiques ?
Comme beaucoup qui n’ont plus la « tête dans le guidon », ou qui ne l’ont jamais eu, je me mets à rêver.
La vie en société, mes pratiques professionnelles dont celle de l’enseignement m’ont amené à penser que :
- L’éducation et l’enseignement vont de pair dans toute société et sont fondamentaux. Un groupe ou une nation dans laquelle chacun adhère à des valeurs morales bien choisies, dont le goût du travail et de l’effort, le sens du partage et de l’entraide, se gère ou s’autogère plus heureusement que dans le cas contraire. Un climat de confiance s’y établira. Les individus d’un groupe qui n’ont pas ces qualités et dont les dirigeants ne les ont peut-être pas toujours non plus, cherchent à contourner les règles qu’on veut leur imposer.
- Le stress des élèves, vis-à-vis des examens, en paralyse beaucoup en les conduisant à privilégier l’obtention « d’une bonne note », même en trichant, aux dépens d’un travail et d’une recherche effectifs.
- Pour beaucoup de classes, les programmes sont pléthoriques et difficiles à appliquer.
On doit essayer de :
- Faire en sorte que les élèves aient du plaisir à travailler et trouvent de l’intérêt dans ce qu’on leur enseigne.
- Combattre les addictions qui guettent les enfants et adolescents dès le plus jeune âge dans de nombreux domaines, notamment celle dite des « écrans ».
- Ne pas fuir l’évolution des technologies, mais s’y adapter et y adapter l’enseignement.
En mathématiques entre autres :
- L’expérimentation est nécessaire pour la plupart d’entre nous et pour nos élèves.
- La recherche et la résolution de problèmes est très profitable, bien plus que les cours ou l’élève est spectateur des démonstrations faites au tableau.
C’est pour toutes ces raisons que, lorsqu’un collègue et ami, professeur de mathématiques à la retraite également, m’a demandé d’écrire des programmes pour l’aider dans ses recherches d’amateur, j’ai essayé de les développer de façon à ce qu’ils puissent servir aussi dans l’enseignement.
Pouvez-vous nous expliquer comment les jeux d’allumettes, tels que le jeu de NIM et le jeu de Marienbad, peuvent être utilisés pour enseigner l’arithmétique et la numération binaire ?
Les jeux d’allumettes dits de Nim sont des jeux de stratégie pure à deux joueurs, où le hasard n’intervient pas. La principale caractéristique de ces jeux est qu’il est toujours possible de déterminer une stratégie gagnante, soit pour le joueur qui commence la partie, soit pour celui qui joue en second.
Rappelons la version basique du premier : on part d’un tas de 16 allumettes, chaque joueur enlève à son tour 1, 2 ou 3 allumettes. Celui qui prend la dernière, a perdu ou a gagné selon la règle adoptée au départ.
Le jeu de Marienbad, dans sa version basique, a une configuration de départ de 4 tas de 1, 3, 5 et 7 allumettes. A chaque coup le joueur prend autant d’allumettes qu’il veut, mais dans un seul tas. Celui qui prend la dernière, perd ou gagne selon la règle adoptée au départ.
Dans les deux cas, le logiciel permet de jouer contre la machine. La machine adopte la stratégie gagnante dès qu’elle le peut. Une partie jouée peut être recommencée dans les mêmes conditions.
Il est possible de jouer en calculant ses coups comme aux dames ou aux échecs. On peut même devenir un champion de cette façon. Mais, pour ces deux jeux, leurs stratégies gagnantes sont formulables mathématiquement.
L’intérêt pour l’enseignement des mathématiques se trouve dans la recherche et la formulation de cette stratégie par les élèves pour le premier de ces jeux. Cette recherche fait appel notamment à la division entière en arithmétique. C’est possible dès le collège. Cet intérêt se trouve aussi dans l’utilisation nécessaire de la numération binaire pour appliquer et comprendre la stratégie avec le jeu de Marienbad (plutôt au lycée).
Une option permet d’afficher de l’aide, sans dévoiler les stratégies pour le premier jeu, par la disposition des allumettes, pour le jeu de Marienbad, en affichant les effectifs de chaque tas en numération binaire.
Une fois l’exercice réalisé, vous pouvez le compliquer suivant le niveau des classes en changeant les paramètres de départ (nombre d’allumettes du ou des tas, entre autres).
Quelle est la valeur pédagogique de ces jeux ?
Nos inspecteurs et le bon sens nous incitent à modifier notre façon d’enseigner en mettant le plus possible nos élèves « au pied du mur ». En leur faisant chercher des problèmes ou exercices, seuls ou en groupes, ceci pendant le temps de classe. Et aussi à privilégier les phases de recherche et d’expérimentation avant d’arriver à une formulation rigoureuse. Évidemment, il nous faut concilier la réalisation du programme avec ces temps de recherche. Ce qui est loin d’être évident
Ces jeux de NIM, avec ou sans logiciels, me semblent être un bon exemple d’activités pour la mise en œuvre d’une telle démarche.
Leur côté « ludique » permettra peut-être de motiver un peu plus de récalcitrants à la pratique des mathématiques.
Propos recueillis par Julien Cabioch
Pour le lien de téléchargement, c’est par ici