Deux albums primés « spécial jeunesse » et « jeunesse » par le Festival d’Angoulême, avec de jeunes héroïnes pleines de vie, d’énergie, de projets, d’aventures et de réussites. Un vrai bonheur !
C’est peu de dire qu’une fois encore la plume et l’humour de Magali Le Huche font mouche ! Dès la première de couverture, le feu d’artifice derrière les trois gamines à vélo donne le ton : l’album tout entier pétille. Et la banderole, discrète dans le coin en bas à droite « Vive les 3 boudins ! » est un petit clignotant pour la suite. Adapté du roman de Clémentine Beauvais, voici l’histoire de Mireille. Elue « Boudin de bronze » par un jury de garçons de son collège, elle fait équipe avec les Boudins d’or et d’argent ( Astrid et Halima) pour monter un projet un peu fou : aller en vélo à Paris à la garden-party du 14 juillet à l’Elysée. Chacune a une bonne raison de s’y rendre, et elles vont surmonter tous les obstacles pour mener à bien leur entreprise… en vendant, en chemin des boudins pour financer le voyage. Accompagnées par Kader, le grand frère d’Hakima, beau comme un dieu et en fauteuil roulant, vont-elles parvenir à leurs fins ? Leur périple attire l’attention des médias, et leur célébrité ne cesse de grandir au fil des kilomètres. Cette odyssée féminine à vélo est drôle et réjouissante, tout en traitant du harcèlement et des réseaux sociaux, thèmes habituellement plutôt « plombants ». Et c’est là toute la force de ce récit, où les victimes transforment la méchanceté des autres à l’égard de leur physique (pas si) ingrat (que ça) en force de rires, de rêveries, et de coups de pédales pour aller au bout de leur route. Savoureuse, épique, féministe, sportive, la revanche des boudins est un régal de bout en bout.
L’histoire de l’incroyable mademoiselle Bang commence avant sa naissance : « il y avait une fois un vieux couple de nobles qui n’avaient jamais eu d’enfants ». cela commence donc comme certains contes bien connus, avec l’arrivée, très tardive d’un bébé dans un couple déjà très âgé. Contrairement aux espoirs des proches, c’est une petite fille qui nait. Mais ce bébé adore les habits de garçon préparés pour la naissance et ne les quittera plus, et avec la complicité totale de son père ravi que les autres croient qu’il ait un fils. C’est quand même bien plus simple pour un garçon d’apprendre à lire et écrire, d’ailleurs seuls les garçons ont le privilège de devenir fonctionnaire et de servir le roi. La vie de mademoiselle Bang se déroule donc sous cette imposture, au grand dam de la servante qui dès le début essaie de contrecarrer la détermination de l’enfant. Que se passera-t-il lorsqu’elle réussira le grand concours de fonctionnaire ? lorsqu’elle se mariera ? Le graphisme original et les couleurs douces nous plongent dans la Chine impériale qui n’est pas toute de tendresse, tout en nous racontant une histoire où les questions actuelles de genre, de couple de femmes, de privilèges et domination masculine sont traitées sans en avoir l’air. C’est drôle, on s’attache à cette héroïne qui trace son chemin sans hésitation, et comme elle le répond à la servante dès son plus jeune âge : « on dit « monsieur » ». Un régal au pays des pagodes et des dragons.
Marianne Baby
