C’était le 23 janvier, la ville de Trappes lançait les Assises de la Cité éducative – un cadre et des temps communs de réflexion pour faire Cité autour de l’École. Un événement qui a rassemblé des (co)acteurs éducatifs de différents champs : personnels de l’Éducation nationale des 1er et 2d degrés, des familles, des associations d’éducation culturelle, artistique et sportive, des agents et des élus de la ville. Ali Rabeh, le maire de Trappes, a placé l’éducation au cœur de son mandat et au cœur de sa ville: l’éducation, l’affaire de tous, et ce tout au long de la vie, n’est-elle pas un défi politique, mais aussi individuel et collectif ? Si la ville est un des acteurs éducatifs, n’est-elle pas aussi éducatrice, «faisant» le citoyen dans l’École comme dans la Cité? L’enjeu ne serait-il pas d’étendre la communauté éducative à chacune et chacun, et ce tout au long de la vie ?
L’École et la Cité, des fabriques de citoyennetés actives
Le lancement des Assisses de la Cité éducative a réuni 200 personnes en plénière, ensuite réparties en petits ateliers participatifs permettant à chaque personne de s’exprimer et « coconstruire la politique éducative au service de nos enfants », comme l’expose le Maire de Trappes en introduction. Ce lancement incarne l’ambition et le défi engagés par la Mairie pour les Trappistes. L’objectif comme la méthode sont des vecteurs d’émancipation et de construction citoyenne, dans l’école et durant le temps de la scolarité, mais aussi au-delà, ferments et ciments de la démocratie d’aujourd’hui comme de demain. Et l’enjeu à venir est de taille : la jeunesse est en effet un enjeu essentiel pour Trappes : 1 habitant sur 2 a moins de 30 ans dans cette ville qui compte environ 7500 élèves dans les 34 écoles, les 3 collèges et 3 lycées.
Le Maire de Trappes affirme à l’assemblée réunie son « engagement durable pour l’École publique, gratuite et laïque». Celui qui dit « tout devoir à l’École de la République souhaite faire de l’École publique laïque une belle maison», qu’il qualifie de «maison magique » sans en masquer les limites et insuffisances. Ali Rabeh évoque les conditions particulièrement dégradées d’apprentissage dans «des territoires parfois abandonnés par la République», le système élitiste, inégalitaire qui reproduit les inégalités de départ, et «une École fragilisée, vulnérable, soumise à des pressions. » Mais ce constat n’altère pas sa conviction que l’École, «maison magique», peut « faire des miracles».
Trappes, Cité éducative
Si ces Assises de l’éducation résultent de l’ambition d’un Maire engagé pour l’éducation, le dispositif de la Cité éducative vient offrir un outil et une méthode, comme cela a été rappelé par Sandrine Lair, directrice académique des services de l’Éducation nationale. Parce que la réussite éducative est un objectif commun à différentes institutions -services municipaux, académiques, de la préfecture- , des familles et des différents partenaires, en travaillant de concert dans la cité éducative et de manière coordonnée, ils peuvent offrir le meilleur aux enfants trappistes.
Sandrine Lair rappelle que la Cité éducative vient conforter les moyens éducatifs dans des alliances quotidiennes pour que «la jeunesse se tienne debout demain», pour élargir les horizons des possibles des enfants. Elle achève son discours par un hommage aux enseignants qui exercent «un métier difficile». Pascal Courtade, préfet délégué pour l’égalité des chances, rappelle que l’une des priorités de la politique de la ville est la réussite des enfants. La convergence des institutions et des acteurs autour d’un projet partagé permet de faire du lien au service des jeunes Trappistes.
Une politique éducative volontariste
La Cité éducative, en rassemblant les acteurs, renforce leur lien de confiance, leur champ d’action pour lutter contre les inégalités et donner les moyens à chaque enfant de son épanouissement. Ce travail commun et complémentaire entre les institutions permet de mener une politique éducative ambitieuse à partir d’un objectif partagé, garant et condition d’une politique éducative durable. Une priorité de Trappes depuis 3 ans est de faire tomber les barrières. À cette fin, l’éducation artistique et culturelle, par leurs pratiques et l’accès à l’art ont été développés avec les structures locales, un cinéma, un conservatoire, un théâtre. Sandrine Grandgambe, adjointe à l’éducation et à la culture de Trappes souligne le lien fort entre éducation et culture et présente les dispositifs de promotion des pratiques artistiques.
Un projet ambitieux à l’échelle de la ville est la mise en place d’une mobilité internationale de tous les collégiens de Trappes, soit tous les élèves de 4e des trois collèges publics de Trappes. Cette mobilité européenne vient ouvrir les horizons des élèves et sera certainement un des souvenirs marquants de leur scolarité, comme les témoignages de certains participants après la découverte de Rotterdam pouvaient en attester. Le témoignage du principal du collège Le Village évoque le rôle capital de ce projet dans la vie des collégiens, dans leur motivation, qui a des effets positifs sur l’absentéisme des élèves.
Les élèves bénéficient également d’un soutien scolaire gratuit pour tous les enfants. La Ville déploie un plan lecture pour mettre toute la population en contact avec le livre. Le temps extrascolaire est également investi: le mercredi matin, six centres accueillent gratuitement les enfants de 6 à 11 ans et proposent divers ateliers, comme l’anglais ludique, la robotique, ou encore le théâtre.
La première unité d’enseignement autisme a été inaugurée et donne de la réalité à l’école inclusive. Le partenariat avec l’ESAT autour d’un potager permet d’apporter un regard différent sur le handicap et de rendre l’inclusion « active ». Ces projets dans et hors de l’école publique attestent de sa vitalité. Comme le formule Ali Rabeh , oui «on peut parfois être exaspéré par l’état de l’École, mais pas désespéré ».
En donnant voix aux Trappistes tout comme en donnant aux élèves les moyens de leur émancipation, Trappes est une fabrique du citoyen. La politique éducative menée à l’école et pour l’école publique est une éducation à la démocratie en acte. À l’heure de la défiance, d’une abstention forte, n’est-ce pas ce qui peut renouer la confiance avec les institutions de la République. Aucune école n’a été détériorée en juin 2023, peut-être n’est-ce pas un hasard.
Djéhanne Gani