Comment construire des ponts entre l’école et les familles ? Comme rendre explicites les savoirs scolaires ? Corinne Gentilhomme, Nicole Béha, Muriel Ceccheto, Laura Muller, Marie-Odile Ott, Alice Marchal, Carine Christen, Magali Schreck, Jacqueline Kiechel, Anne Burgy et Laurence Prévost réfléchissent à ces questions, sur leur temps libre, depuis plus de vingt ans. De ces moments de réflexion sont nés les sacs à savoir. Des petits sacs contenant des livres, des jeux, des activités que l’élève apporte à la maison.
Le projet « sac à savoirs » est né de la persévérance de Corinne Gentilhomme, inspectrice de l’éducation nationale (IEN), et de plusieurs enseignantes volontaires qui se réunissent hors des temps institutionnel environ une fois par période, et ce, depuis une vingtaine d’années. Le projet des « sacs à savoirs » rassemblent des enseignantes de maternelle – dont certaines en Rep+, de sept circonscriptions du département du Haut-Rhin. Nicole Béha, Muriel Ceccheto, Laura Muller, Marie-Odile Ott, Alice Marchal, Carine Christen exercent dans les trois circonscriptions de Mulhouse. Magali Schreck à Colmar, Jacqueline Kiechel à Riedisheim, Anne Burgy à Wittenheim et Laurence Prévost à Illfurth.
L’IEN, aujourd’hui à la retraite, encadre ce groupe depuis le début. « Elle impulse, formalise et valorise les productions et les recherches par une mise en ligne régulière », expliquent les enseignantes.
Mais qu’est-ce donc que ces sacs à savoirs ? Ce sont de jolis sacs dans lesquels les enseignantes placent des jeux, des activités, des livres en lien avec un savoir travaillé en classe. « Chaque sac est construit au fil des apprentissages menés en classe. La stabilité des gestes professionnels et des outils /supports utilisés contribue à une meilleure conscientisation des savoirs par les élèves et une appropriation progressive de l’usage des critères de réussite ». Les élèves sont les acteurs principaux : selon l’âge, la composition des sacs se fera d’une manière plus ou moins autonome. Quant au choix des contenus des sacs, il se fait collectivement. « Il est important que les enfants se soient bien approprié les contenus avant le prêt », précise l’IEN. Pour les plus grands cette appropriation passe par une prise de notes au tableau des propositions des élèves avec une programmation des supports à construire, à partir des cartes des savoirs avec des affichages structurants… Pour les plus jeunes, cela passe par la verbalisation des apprentissages par l’enseignant et l’explicitation des contenus du sac en vue du prêt.
Chaque sac à savoirs est l’aboutissement d’un projet d’apprentissage – un par niveau – destiné à voyager dans les familles sous la forme de prêt. « Nous sommes dans une réflexion autour de la parentalité et la conception d’outils opérationnels », explique Corinne Gentilhomme. « Pour les parents, il s’agit de prendre conscience que les enfants apprennent au-delà du « faire ». Pour les enfants, c’est la possibilité de s’entraîner encore, de réussir et partager/expliciter ce qui a été appris en classe. Le vecteur langage est de ce point de vue essentiel ».
Sur le Digipad conçu par les enseignantes et l’IEN, plusieurs entrées sont possibles : par domaine, par thématique et par projets. « Les trois entrées correspondent aux choix de l’enseignant en lien avec sa programmation d’apprentissages ». Pour l’entrée « un domaine », il s’agit d’apprentissages ciblés – par exemple, les aimants, les pinces, l’alphabet – dans un seul domaine. L’entrée « domaines et thématique » se rapproche davantage du travail connu autour d’un thème – l’automne, l’hiver, la rentrée… – permettant de construire des apprentissages dans plusieurs domaines d’activités et ce, dans un temps imparti. Enfin, l’entrée par « projets » renvoie à un projet à plus long terme, souvent sur l’année scolaire.
« Ces différentes entrées permettent de ne pas uniquement travailler autour de thématiques comme c’est souvent le cas. Les sacs à savoirs assurent la lisibilité des apprentissages aux familles et une compréhension progressive des domaines d’apprentissage de l’école maternelle », explique Corinne Gentilhomme.
Le projet de sacs à savoirs, c’est la concrétisation d’un travail de réflexion sur les gestes professionnels pour mettre en œuvre une pédagogie explicite, c’est-à-dire « une conduite des séances d’apprentissage mobilisant les élèves au niveau cognitif, l’utilisation de supports et la conception de traces des apprentissages : cartes des attendus, cartes des savoirs, affichages, critères de réussite et évaluation positive… ».
Et pour que les savoirs restent vivaces, chaque sac continue à circuler tout au long de l’année, afin que les élèves réinvestissent régulièrement les apprentissages.
Lilia Ben Hamouda