Bernadette Kervyn est maîtresse de conférences à l’université de Bordeaux, spécialiste et passionnée des questions d’enseignement et d’apprentissage de l’écrit(ure). Elle est aussi vice-présidente de l’AIRDF – Association Internationale de Recherche en Didactique du Français. Elle a accepté d’analyser pour le Café pédagogique le récent rapport de l’IGESR « L’enseignement de la production d’écrits : état des lieux et besoins ». Un rapport en trois parties, la première avec une focale sur la moyenne section, la deuxième sur le CE2 et la troisième sur le pilotage pédagogique. Pas moins de 137 pages que la chercheuse synthétise puis discute. Un article long, à lire en une seule fois ou en plusieurs…
Présentation synthétique du rapport
La mission enseignement primaire de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGÉSR) a choisi en 2022–2023 de s’intéresser aux enseignements de l’écriture et de la production d’écrits aux cycles 1 et 2. En découle la publication récente d’un rapport, organisé en trois livrets complémentaires, consacré principalement à l’enseignement de la production d’écrits. Les deux premiers livrets proposent un état des lieux et des besoins respectivement en MS (« niveau où doivent commencer les premiers enseignements de l’écriture, structurés et pensés en équipe ») et en CE2 (« en tant que dernière année du cycle 2 »). Le troisième livret est quant à lui consacré au « pilotage pédagogique de l’enseignement de la production d’écrits aux cycles 1 et 2 ». Comme noté dans l’introduction de ce document, cette focale sur l’écriture et la production d’écrits se justifie par le fait qu´ « écrire et lire sont deux compétences interdépendantes qui s’enrichissent et se nourrissent mutuellement ». De ce fait, en accord avec les auteurs de ce rapport, on ne peut que se réjouir de cette attention portée à l’écriture, après plusieurs années où les discours sur l’enseignement et l’apprentissage de l’écrit concernaient avant tout la lecture. Selon les équipes de circonscription interrogées pour cette enquête ministérielle, cette focalisation sur la lecture et l’absence d’items relatifs à la production d’écrits dans les évaluations nationales ne sont d’ailleurs pas sans incidence sur les pratiques de classe : elles expliquent pour partie le fait que les enseignants « n’en font pas une priorité et sont plutôt centrés sur la lecture et le calcul », malgré la place allouée à l’écriture dans les programmes de l’école primaire. Que le ministère, par la voie des IG, accorde aujourd’hui plus d’attention à l’écriture et à la production d’écrits dès le début de l’école primaire est donc crucial.
Pour réaliser ce rapport, la mission a visité 207 classes dans 103 circonscriptions du premier degré situées dans 25 académies, entre septembre 2022 et mai 2023, et a veillé à croiser les points de vue des enseignants, des inspecteurs et de leurs équipes de circonscription. Le protocole d’enquête, fourni en annexes, montre une prise en compte de différents paramètres impliqués dans l’enseignement et l’apprentissage de l’écriture ainsi que dans la formation : les tâches d’écriture et le temps qui leur est consacré, les affichages dans la classe, les supports et outils d’écriture, les corrections et évaluations des écrits effectuées, l’ancrage dans les disciplines, la progression et programmation au sein du cycle et l’articulation entre ceux-ci, les gestes professionnels, les réussites et les difficultés des élèves, la différenciation et les ajustements pour les élèves à besoins éducatifs particuliers, les besoins en termes de formation et celles réalisées notamment en lien avec les constellations. En ressort un état des lieux des pratiques effectives dans les classes observées (points forts, difficultés, besoins) rendant compte de constats globaux et de pratiques ponctuelles dont la fonction est notamment d’illustrer le propos et de pointer de bonnes ou mauvaises pratiques. Cet état des lieux, régulièrement mis en résonance avec le prescrit (programmes, SCCC) ou d’autres références (conférences de consensus, documents Eduscol, rapports antérieurs, résultats de recherche en psychologie cognitive principalement) est assorti de conseils, de points de vigilance et de propositions pour le pilotage pédagogique et la formation.
État des lieux et préconisations pour la MS
Sans exhaustivité, parmi les éléments mis en exergue pour la MS, on peut noter
- l’importance des espaces à dédier aux activités d’écriture (voire de graphisme et d’écriture) dans la classe (« [l]a mission a constaté que dans une majorité de classes, l’utilisation de l’espace ne traduit pas une attention particulière apportée à l’apprentissage de l’écrit ») ;
- le besoin d’une présentation explicite et d’un usage fréquent voire quotidien des outils et supports d’écriture pour qu’ils deviennent des références et des appuis pour les tout jeunes apprentis scripteurs (par exemple « les affichages sont généralement lisibles pour les élèves, plutôt évolutifs mais finalement peu utilisés. Il s’agit donc d’intégrer plus nettement leur usage dans les habitudes de travail avec les élèves ») ;
- l’intérêt, outre les supports collectifs (type cahier de vie de la classe), des supports individuels (type cahier de suivi des apprentissages) gardant trace des essais et des progrès de chaque élève (« [e]n MS puis en GS, l’usage d’un cahier dédié aux activités d’écriture devient indispensable pour conserver les traces et permettre à l’enfant d’observer ses propres progrès, commentés par l’enseignant, et d’éprouver sa capacité à apprendre »).
Si une grande attention à la matérialité de l’écrit (outils, supports, espaces…) et à son enseignement est primordiale dès l’école maternelle, elle va de pair avec une interrogation sur les dimensions à enseigner, les activités à privilégier ou à renforcer et les manières de les mettre en œuvre. À ce propos, les auteurs du rapport reviennent sur :
- la nécessaire distinction entre dessin, activités graphiques (appelées « activités préparatoires à l’écriture ») et écriture ;
- l’articulation à renforcer et l’équilibre à trouver entre activités graphomotrices et linguistiques, entre lecture et écriture ;
- la mise en exergue indispensable des usages et fonctions de l’écriture et des écrits (fonctions « pas toujours bien identifiée[s] et partagée[s] avec les élèves ») ;
- l’intérêt de la dictée à l’adulte, pour autant que les modalités de mise en œuvre permettent d’atteindre les objectifs fixés (« dans certains cas, les modalités choisies et la maitrise encore hésitante de la technique propre à l’exercice font perdre tout intérêt didactique à la situation ») ;
- le peu de place accordée aux essais d’écriture (seulement 17% des classes observées pratiquent des ateliers d’écriture approchée ou tâtonnée), pourtant mobilisateurs quand ils font l’objet d’une ritualisation et d’un guidage précis de la part de l’enseignant, en appui avec les supports de la classe ;
- le besoin d’un enseignement progressif, explicite, structuré et régulier, mis en place au travers de tâches ritualisées, guidées, ajustées, en cohérence avec des objectifs identifiés (« [l]a mission a souvent constaté une suite de micro-activités, plus ou moins fréquentes, plus ou moins suivies, dont il convient d’interroger l’efficacité »).
Enfin, les IG soulignent que l’efficacité (ici supposée car non mesurée dans le cadre des données recueillies) des séances d’enseignement passe par le développement de gestes professionnels ajustés et pour partie spécifiques (« [l]es gestes professionnels doivent impérativement gagner en efficacité dans le champ de l’enseignement de l’écriture et de la production d’écrits »). Ce levier, atteignable par un renforcement de la formation et par un travail d’équipe, permettrait, selon les auteurs du rapport, que dans les séances sur l’enseignement de l’écriture menées, les apprentissages attendus soient effectivement travaillés. En effet, dans les observations faites, seul un tiers des séances effectuées semblent répondre à cette exigence. Parmi les gestes à améliorer, le rapport pointe la qualité du guidage par l’enseignant pour que les élèves fassent du lien entre lettre, son et graphie, et pour qu’ils apprennent le geste d’écriture ou l’usage des outils de travail. Il cite aussi l’observation ajustée des réalisations des élèves (manière de faire et écrits produits par ceux-ci) dans une optique d’évaluation des progrès, tout en soulignant la qualité réelle de l’accompagnement langagier observé dans la plupart des classes. L’effet-enseignant, dont on sait qu’il est particulièrement déterminant en matière d’écriture (voir les résultats de la recherche IFÉ Lire et écrire au CP dirigée par R. Goigoux) sans doute parce que celle-ci s’apprend avant tout dans le cadre scolaire, explique aussi que la mission a assisté à des séances « avec des élèves dont les acquis étaient, grâce à l’enseignement reçu, bien supérieurs à ce que l’on peut spontanément associer à un IPS faible […]. Inversement, dans des classes plus favorisées, certaines des séances observées ne permettaient pas les acquisitions attendues du fait d’un enseignement de moindre qualité ».
État des lieux et préconisations pour le CE2
Les constats sur les pratiques et les besoins au CE2 recoupent en différents points ceux formulés pour la MS. Les premières observations concernent ici aussi la matérialité de l’écriture, d’ailleurs centrale dans une perspective littéracique, où l’écriture en tant que pratiques sociales est envisagée au travers d’usages de supports et d’outils, situés dans des lieux et une temporalité. Sur ce sujet, les auteurs de ce rapport mettent en avant :
- le « peu d’enseignants organis[ant] leur classe pour créer les conditions propices à l’écriture ». Est ainsi préconisée la mise en place d’un espace dédié à l’écriture (ou à la lecture-écriture) « dans lequel seront regroupés et accessibles tous les écrits de référence, les outils d’aide, les ordinateurs ou tablettes numériques ». Cette proposition, pas toujours aisée à organiser dans les classes et limitée à quelques élèves à la fois, gagnerait à être complétée par l’enseignement aux élèves de la préparation de leur matériel et espace de travail avant de passer à l’écriture, en complément du repérage des aides disponibles dans le classe ;
- la gestion des affichages qui, pour devenir des outils de référence, devraient être lisibles, évolutifs, organisés, non surchargés, et utilisés grâce à l’explicitation de leur usage (conditions non relevées dans 60% des classes observées) ;
- le rôle prépondérant, vu la complexité de l’activité scripturale et les compétences en construction des scripteurs novices, des outils pour aider à écrire et à réviser son écrit. Concernant ces ressources, la mission souligne d’une part leur variété de formes et de fonctions (code pour se corriger, liste de mots classés pour enrichir la production et bien orthographier, affiche reprenant une démarche méthodique pour réaliser l’écrit visé…). D’autre part, les auteurs s’étonnent que, si dans trois-quarts des classes de CE2 visitées ces outils sont présents et utiles, dans le quart restant de telles aides ne sont pas identifiées, malgré leur importance ;
- le choix des supports d’écriture dont le rapport pointe la variété (cahier du jour, cahier de brouillon, cahier de devoir, cahier de lecture, classeur de fluence…) et parfois l’excès entrainant un cloisonnement des apprentissages aux yeux des élèves. Est également épinglée l’incidence du choix des supports sur les occasions d’écrire données aux élèves (« l’écriture manuscrite des élèves est souvent trop limitée », même si, au vu du rapport, on ne peut incriminer le recours aux photocopies « rarement systématique »).
Concernant les activités d’écriture et leur mise en œuvre au CE2, l’observation croisée des séances de classe (80% de séances de français observées et 20% d’autres disciplines), des cahiers et classeurs des élèves et des documents de préparation des enseignants fait ressortir :
- une prédominance nette pour les écrits courts (« [l]a fréquence des écrits longs est beaucoup plus incertaine, selon un empan qui va de 2 par an, souvent en lien avec un projet particulier, à 2 ou 3 par période »). Selon les données considérées par les auteurs, 25% des classes ne produiraient pas d’écrits longs, inscrits ou non dans des projets qui motivent et donnent sens à l’écriture. Ce constat amène à recommander « d’investir la production d’écrits longs et la mise en œuvre de différentes phases de production d’écrits » (planification/préparation – mise en texte – révision – et parfois édition/diffusion mise en valeur) ;
- une pratique régulière de la dictée, quotidienne dans 41% des classes visitées et hebdomadaire dans la moitié (selon le graphique donné p. 20) ;
- un enseignement de la copie rarement présent alors que celle-ci donne l’occasion aux élèves d’apprendre et d’exercer différentes dimensions de l’écriture (par exemple l’attention visuelle, le geste et la rapidité de l’écriture, la mémoire et la vigilance orthographique, les stratégies de relecture, le découpage en mots…). À titre d’information, la copie est quotidienne dans un tiers des séances observées et hebdomadaire dans environ 20%, même s’il est important de distinguer l’enseignement de la copie d’une simple pratique de la copie ;
- un usage du brouillon présent dans à peu près 60% des classes de l’échantillon (sans compter le brouillonnage sur ardoise ou à l’oral dont les traces ne sont pas conservées). De façon plus générale, la phase préparatoire dont on sait qu’elle améliore la qualité des écrits produits et qu’elle est une « phase aussi importante que la phase de révision », fait l’objet d’une grande variété de pratiques et de contenus (planification, apport méthodologique pour utiliser les outils, explicitation des critères de réussite…). Sa mise en œuvre pourrait être mieux gérée d’après les auteurs du rapport ;
- un déséquilibre et une interaction à renforcer entre la lecture et l’écriture, notamment lors des activités pédagogiques complémentaires (APC) réservées à la lecture. « Les enseignants pourraient [y] conforter la lecture par l’écriture, ou préparer la lecture par l’écriture, ou encore la prolonger » ;
- le besoin de travailler davantage l’écriture dans toutes les disciplines pour entre autres donner du sens à l’écrit. En effet, il semble que « les élèves écrivent surtout en français pour appliquer les apprentissages réalisés en étude de la langue, et pour s’exercer à la narration ». « Ecrire dans toutes les disciplines est rarement identifié comme possible, souvent par manque de temps » ;
- une pratique du jogging d’écriture à repenser selon plusieurs conditions pour viser les progrès des élèves : relier l’activité au réel de la classe, énoncer les attentes ou objectifs, recourir au brouillon et aux feedbacks correctifs pendant la séance, limiter le temps consacré à cette activité ;
- la nécessité de faire écrire fréquemment, de rendre habituel le recours à l’écriture dans diverses situations et discipline en veillant à ce que les élèves puissent écrire régulièrement individuellement. Les auteurs du rapport rappellent que cette place quotidienne à accorder à l’écriture doit s’accompagner d’une progressivité au niveau des activités proposées, pour certaines ritualisées. Construire pour la classe, et pourquoi pas en équipe, des repères de progressivité nécessite d’identifier des objectifs et des critères de réussite ciblés et évolutifs qui vont permettre de pointer les progrès ou les difficultés des élèves, et de les accompagner au plus près de leurs besoins.
Comme pour la MS, l’effet enseignant ou l’efficacité supposée dépend en partie de gestes professionnels variés. À titre d’exemple, on peut citer le fait :
- d’étayer à l’aide d’outils adaptés à la tâche d’écriture et au niveau des élèves ;
- d’expliciter notamment le sens des activités, les objectifs, les aides disponibles ;
- de guider si besoin le geste d’écriture ;
- d’accompagner à l’oral de façon précise ;
- d’encourager avec bienveillance les essais et de considérer l’erreur comme nécessaire à l’apprentissage ;
- de lire les écrits des élèves et de mettre en œuvre une correction de ces écrits qui contribue à faire progresser ces apprentis scripteurs. Entre la non-correction, la correction uniquement dans certaines disciplines ou certains cahiers, l’attention uniquement aux dimensions formelles (orthographe, ponctuation, temps des verbes…) ou aussi au contenu, la correction par l’enseignant ou entre élèves ou collective, le recours ou non à des aides ou à des codes partagés en équipe ou variables d’une classe à l’autre, force est de constater que la diversité des pratiques est réelle et que celles-ci sont parfois insuffisamment interrogées ou travaillées en formation pour constituer un levier de progrès pour les élèves.
Les IG insistent sur ces compétences professionnelles car, selon eux, certains axes structurant la pratique enseignante sont à renforcer lors du travail d’écriture. Ainsi, l’adaptation aux progrès des élèves et la différenciation sont bien présentes dans presque la moitié des classes de l’échantillon mais insuffisantes dans 40% et non observées dans 12,60%. De même, seulement 34% des séances analysées permettraient de construire les apprentissages attendus. Ce pourcentage s’explique, d’après les auteurs du rapport, par différents types de difficulté, à prendre en considération pour faire évoluer les pratiques. Parmi celles-ci, on trouve :
- une mauvaise estimation des capacités des élèves et une différenciation inappropriée ou insuffisante ;
- un manque de temps corrélé à une vision de l’écriture comme activité particulièrement chronophage ;
- une difficulté à apprendre aux élèves le geste graphique ;
- une difficulté à expliciter les attendus et à penser en amont de la séance les outils et la progression ;
- une inclusion complexe des élèves à besoin éducatif particulier.
Préconisations pour le pilotage pédagogique
Cibler des leviers de pilotage en dialogue avec les IEN et leurs équipes de circonscription, et en prenant appui sur les constats réalisés dans les classes et en formation, est une ambition salutaire pour espérer dynamiser et enrichir l’enseignement de l’écriture et de la production d’écrits. Comme suggéré dans le livret 3 du rapport, le travail sur des axes de progrès potentiels passe par l’identification à la fois de réussites et de points de vigilance, de contraintes ou de difficultés récurrentes.
Outre les éléments déjà signalés, notons qu’un axe de progrès d’emblée épinglé concerne la nécessaire réflexion en équipe (par exemple définir des objectifs et une programmation à l’échelle du cycle, harmoniser les outils, penser de façon spiralaire les situations d’écriture pour peu à peu stabiliser et développer les compétences visées). Dans cette optique « [l]’accompagnement et la formation des équipes pédagogiques font incontestablement partie des leviers à mobiliser pour faire évoluer les pratiques au cœur même de la classe, à l’échelle individuelle (enseignant), mais également à une échelle collective, au sein de l’école et entre les écoles ». Ce levier correspond à certaines recommandations finales où il est question de formation sur l’enseignement de la production d’écrits à destination des cadres, des formateurs et des enseignants.
Pour ce qui est des freins ou points de vigilance, le point de vue des IEN et des CPC rejoint très souvent mais nuance et enrichit aussi parfois les observations faites dans les classes par les IG auprès des enseignants. Ils confirment ainsi que « pour les enseignants, l’écriture et la production d’écrits ne sont pas identifiées comme des priorités » malgré les difficultés qu’ils rencontrent dans leur enseignement.
Pour la maternelle, ils signalent que l’écriture fait l’objet d’une attention plus soutenue en GS. Les essais d’écriture, par exemple, y sont d’après eux un peu plus présents. Pour ce qui est de la dictée à l’adulte, ils relèvent à leur tour qu’elle devrait être une pratique centrale mais qu’elle est peu fréquente et perçue comme difficile à mettre en œuvre.
Concernant la différenciation, elle reste selon eux « en deçà des besoins des élèves » et régulièrement « aléatoire dans le champ de la production d’écrits ». Ils mettent entre autres en avant l’accompagnement des élèves allophones (« souvent pensé en termes de remédiation à posteriori et peu préparé par une différenciation à priori ») et le peu d’attention porté aux élèves intellectuellement précoces.
Au sujet du geste graphique au cycle 2, les CPC « font état d’une dégradation manifeste de la tenue du crayon ou stylo […] et d’un manque global de soin apporté à l’écriture, signe d’une attention moindre, ou trop irrégulière, accordée par certains enseignants à cet apprentissage ».
Leur regard sur la pratique du jogging d’écriture parmi les écrits courts est assez critique : « activité inutile », qui « tourne un peu à vide », qui correspond « davantage à l’intérêt des enseignants qu’aux besoins des élèves », même si certains mentionnent un caractère ludique intéressant. Par rapport à la longueur des écrits, quand ils plébiscitent les écrits courts, ce n’est pas en reniant l’entrée dans les écrits longs. Ils regrettent plus globalement « le manque de tâches complexes proposées aux élèves, qui sont essentiellement mobilisés sur des mono-tâches et peu de situations engageantes », malgré l’intérêt que présente la mise en œuvre par exemple d’un projet d’écriture au long cours.
La problématique du temps est aussi évoquée : « [l]es équipes de circonscription rapportent, de manière unanime, les difficultés que nombre d’enseignants ressentent lorsqu’il s’agit de consacrer un temps suffisant au travail sur la production d’écrits. Ils jugent la production d’écrits très chronophage et ne se sentent pas en capacité d’accorder le temps nécessaire à cet apprentissage ». Dans le propos des CPC, on retrouve une perception de la production d’écrits inscrite dans une temporalité étirée et la tension avec le manque de temps signalé par les collègues pour réaliser le programme. Alors que la demande de production nécessite de tâtonner, de brouillonner, pour certains enseignants « laisser du temps, c’est perdre du temps ». Cette difficulté à consacrer du temps à l’écriture des élèves explique partiellement l’usage, selon eux massif, des photocopies pour les leçons.
Un autre constat concerne l’enseignement et la mise en place d’une démarche d’écriture ou de production d’écrits, à leurs yeux non consolidés : différentes phases de l’écriture rarement visibles, manque de planification du travail écrit, peu d’écrits intermédiaires et de lecture à voix haute du texte rédigé par l’élève, correction limitée à la langue ou qui pose problème à beaucoup d’enseignants.
La nécessité de la lecture à voix haute, ainsi que le besoin de formulation ou de reformulation à l’oral et de progression en langage oral, font ressortir le lien crucial entre l’oral et l’écrit, complémentaire du lien entre l’écriture, la lecture et l’étude de la langue, souligné par les IG.
Parmi les contraintes relevées qui orientent l’action pédagogique, figure l’inscription du travail des circonscriptions dans un cadre départemental. À cet échelon, « [l]’écriture et la production d’écrits ne sont plus identifiées comme des entrées de formation nécessaires comme le sont la lecture, la compréhension et le lexique ». « Les thématiques de formations [étant] étroitement corrélées aux items constitutifs des évaluations nationales, les IEN peinent à les enrichir d’un travail spécifique avec les équipes sur la question de la production d’écrits ».
Au vu de ces constats, une des recommandations finales est « d’introduire des items spécifiques pour évaluer les compétences en écriture et en production d’écrits dans le protocole des évaluations nationales dès le CP ».
Ces orientations à l’échelle départementale voire nationale entrainent de forts contrastes en matière de pilotage pédagogique sur la production d’écrits qui n’est pas identifiée comme une priorité pour environ 20% des IEN. À l’inverse, certaines équipes de circonscription « conduisent un pilotage pédagogique volontariste en articulant, dans les temps de formation en constellations, écriture et lecture, écrit et oral, sans fractionner les composantes de l’écrit ». Si globalement l’écriture et la production d’écrits ne sont que peu travaillées dans le cadre des plans français, maternelle et mathématiques, un certain nombre de circonscriptions inscrivent ces thématiques dans les 6 heures d’animation pédagogique pour lesquels une adaptation des contenus existe selon les départements.
Dans l’ensemble, il ressort du rapport de nombreuses prescriptions contradictoires qui pèsent sur les circonscriptions et rendent le travail des formateurs (et des enseignants) très complexe. Malgré ces tensions, il existe diverses initiatives localisées où le travail sur la production d’écrits est mis en avant. À titre d’exemple, un IEN a identifié quatre axes de formation dont s’est saisi l’équipe de formateurs : renforcer la pratique quotidienne, donner du sens à la production d’écrits, penser la construction d’automatismes, enseigner aux élèves à produire des écrits. Le rapport stipule que « lorsque des priorités de pilotage existent en circonscription sur la production d’écrits, certaines donnent lieu à une mise en œuvre de qualité ».
Néanmoins, la mise en œuvre de ces initiatives est parfois limitée par le manque de remplaçants : alors que le format des constellations est apprécié des équipes pédagogiques et des formateurs, « le non-remplacement des enseignants impliqués dans les constellations peut provoquer l’interruption des parcours de formation ». Une autre difficulté évoquée concerne la durée des formations : 6 heures seulement pour les animations pédagogiques et l’engagement des enseignants en constellations durant une année qui « fait rarement l’objet d’un prolongement les années suivantes, souvent par manque de temps, ou en raison de l’implication des formateurs dans les nouvelles constellations ».
Un axe central du pilotage pédagogique proposé est la montée en puissance voire la généralisation d’une formation adossée à l’identification des besoins réels dans les domaines de l’écriture et de la production d’écrits. Ces besoins réels ou lacunes pédagogiques et didactiques ne correspondent pas toujours aux attentes exprimées par des enseignants. En maternelle par exemple, la demande de formation est très forte sur le geste graphique alors qu’elle ne l’est pas sur la dictée à l’adulte et les essais d’écriture qui pourtant font défaut dans les classes. Concevoir un pilotage pédagogique en phase avec les besoins réels des enseignants n’est pas évident. Il exige le repérage des pratiques pédagogiques au cœur des classes.
Pour ce faire, le rapport insiste sur la nécessité de prévoir des visites en classes (visite de l’inspecteur, de conseillers pédagogiques, de formateurs) sur des séances spécifiques d’écriture (en français ou dans d’autres disciplines). Le relevé des traces écrites constitue également une base matérielle fiable. « Dans chaque circonscription, un état des lieux des pratiques pédagogiques dans les domaines de l’écriture et de la production d’écrits parait indispensable pour objectiver ce qui est réellement enseigné aux élèves », et ce à partir d’outils d’appui à l’observation tels que le protocole utilisé par les IG pour ce rapport. Ce point figure également dans les recommandations finales où il est question d’engager le collège des IEN dans une réflexion sur « l’état des enseignements de l’écriture dans les circonscriptions et sur les moyens à disposition pour planifier et mettre en œuvre l’accompagnement et la formation des équipes des écoles dans une perspective de mutualisation ».
La formation à cet échelon comme la formation des directeurs, des cadres et des formateurs est à plusieurs reprises recommandée pour améliorer l’enseignement de l’écriture et de la production d’écrits. Elle est indispensable pour notamment, à l’échelle des directions d’école, « veiller à inscrire l’enseignement de l’écriture et de la production d’écrits dans le projet d’école », impulser un travail sur la progression des apprentissages de l’écrit entre la maternelle et l’élémentaire, sur les outils des élèves et la cohérence de leur parcours d’apprenti scripteur.
Un dernier levier mis en avant concerne la création de ressources, la diffusion de celles existantes (notamment sur Eduscol) ou leur adaptation aux besoins des écoles. Ainsi le rapport préconise la conception d’un guide de référence sur l’enseignement de l’écriture et de la production d’écrits, la création d’un document concis qui permette aux enseignants d’identifier « les enjeux de l’écriture dans sa relation à l’écriture, mais aussi la variété des situations qui doivent être proposées aux élèves […] dans toutes les disciplines ». Ils appellent également de leurs vœux « un cadre de référence – qui précise les attendus dans le domaine de l’écriture et de la production d’écrits » pour le carnet de suivi des apprentissages en maternelle.
Quelques points de discussion
Par ce rapport aussi dense que riche, la mission enseignement primaire (MEP) de l’inspection générale remet au centre de l’attention l’enseignement de l’écriture et de la production d’écrits. Elle invite au travail collectif sur ce sujet crucial. Profitons de cette dynamique pour poursuivre la réflexion.
Un nécessaire programme d’enquêtes et de recherches futures sur les pratiques effectives
Tout d’abord, vu l’intérêt d’une telle enquête, on ne peut que souhaiter l’extension des observations, d’une part, aux autres niveaux des cycles 1 et 2 et au cycle 3 (voire au-delà) et, d’autre part, à davantage de séances de disciplines autres que le français. Ces élargissements ou études complémentaires à large échelle complèteraient très utilement les constats formulés et permettraient d’asseoir le pilotage et l’action sur une connaissance plus étoffée des pratiques et besoins effectifs. Par exemple, les écrits longs, pour lesquels le rapport recommande un travail hebdomadaire dès le CE2, sont-ils davantage pratiqués au C3 en français et/ou dans les autres disciplines ? La dictée à l’adulte s’observe-t-elle davantage en GS et est-elle présente au C2 ? L’apprentissage de l’écriture, long, complexe et transversal, justifie cette extension, de même que le peu de travaux de grande ampleur sur les pratiques effectives d’enseignement de l’écriture.
Des termes à définir et des conceptions de l’écriture à harmoniser
La réflexion lancée peut difficilement se passer de définitions ou d’acceptions précises des termes écriture, activités scripturales, production d’écrits, rédaction, planification, préparation, relecture, révision, correction. Répondre en quelques mots ou en une phrase à une question dans un fichier de mathématiques, par exemple, est-il considéré comme une production d’écrits ? Si ce n’est pas le cas, à quelle catégorie de tâches observées appartient cette activité scripturale ?
Ce travail définitoire, certes délicat, demande la mobilisation de conceptions théoriques sous-jacentes. Les conceptions de l’écriture privilégiées, qui vont impacter les observations et les recommandations, semblent fluctuer dans ce rapport, pas toujours homogène de ce point de vue. Si par exemple, comme noté, « l’écriture est une activité graphique et linguistique dont les deux composantes ne peuvent être dissociées », c’est aussi et avant tout, rappelons-le, une activité langagière que les élèves découvrent et qu’ils s’approprient au travers de ses usages et fonctions. Essayer d’écrire son prénom en maternelle sur son dessin pour signaler qu’on en est l’auteur est d’abord un acte langagier qui va justifier le travail sur les dimensions graphique et linguistique. La dimension langagière étant moins souvent évaluée (recours à l’écriture pour différentes fonctions et dans différentes situations, inscriptions dans des genres ou types d’écrit, prise en compte du destinataire, intention du scripteur-auteur, etc.), il faudra veiller à ce que l’impact des évaluations nationales (effectivement attendues en matière d’écriture et de production d’écrit) ne minore pas cette dimension essentielle au niveau des formations et des pratiques de classe.
De même, définir l’écriture en intégrant les différentes tâches scolaires où elle est exercée, comme initié dans ce rapport, permet de penser leur complémentarité (complémentarité par exemple de la dictée et de la production d’écrits) ainsi qu’une progression globale des compétences scripturales, ce que ne permettrait pas une focalisation unique sur la production d’écrits. Conserver une approche englobante de l’écriture, qui inclut également les interactions avec la lecture, l’EDL, l’oral et les discours disciplinaires, serait souhaitable pour éviter de renforcer le cloisonnement dénoncé. Ce cloisonnement, en tension avec un nécessaire découpage pour organiser les enseignements, interpelle effectivement, notamment dans le choix de certains outils de classe repris dans ce rapport. Par exemple, dans le code « CHAMPIONS », certes attractif, il est surprenant que l’orthographe soit séparée de l’accord sujet-verbe (nommé étrangement conjugaison), des homophones, des accords et de la transcription des sons.
Enfin, une acception englobante de l’écriture envisagée en tant que processus exigerait que les phases d’anticipation (préparation, planification) et de retour sur l’écrit (relecture, révision, correction) fassent partie intégrante de l’écriture, qu’il s’agisse d’une tâche de copie, de dictée à l’adulte, de rédaction, etc. Calculer seulement le temps où l’élève « écrit » sur le support qui lui est donné, comme envisagé dans le rapport, est-il suffisant si l’on considère qu’apprendre à écrire, c’est s’approprier une démarche et donc aussi apprendre à préparer son écrit, à se relire et se corriger ? Disposer des données sur le temps effectif de préparation et de relecture-révision (ce qui n’est pas simple vu que ces opérations sont parfois enchevêtrées et que les élèves avancent à des rythmes différents) ainsi que sur ce qui s’y fait (expliquer la consigne, faire énoncer les critères de réussite, travailler la mémoire orthographique des mots difficiles de la dictée, faire relire les mots copiés en les comparant avec ceux d’un autre élève, lire l’essai d’écriture d’un élève pour qu’il mesure l’écart entre ce qu’il pense avoir écrit et ce qu’il a écrit, etc.) permettrait de mieux questionner la pertinence des pratiques enseignantes.
Des conclusions plus prudentes sur les pratiques efficaces et le besoin d’un croisement avec les travaux existants
De manière plus générale, la valorisation et la critique de certaines pratiques appellent à une précaution méthodologique. Celles-ci gagnent à être interprétées avec prudence en termes d’efficacité sur les apprentissages des élèves. En effet, l’enquête effectuée par les IG n’avait pas pour objectif de mesurer les performances et les progrès des élèves et de les expliquer à l’aune de variables (potentiellement nombreuses) liées aux choix des enseignants, à leur manière d’enseigner ou aux conditions d’exercice du métier.
Ainsi, dans une perspective d’action en appui sur la recherche, il serait intéressant de croiser les renseignements précieux que nous fournit ce rapport et les recommandations qui y sont faites avec les nombreux travaux scientifiques existants sur l’enseignement et l’apprentissage de l’écriture et la formation à cet enseignement. En ce qui concerne la dictée par exemple, différentes recherches de terrain montrent l’intérêt des dictées préparées ou négociées (d’ailleurs aussi valorisées sur Eduscol) et leur impact positif sur les apprentissages des élèves. Pourtant le temps effectif d’écriture des élèves y est plus réduit que dans une dictée classique. Vu sous cet angle, l’écrasante majorité de séances observées au CE2 qui n’ont pas donné lieu à une dictée (un peu plus de 90%) est-elle si inquiétante ? Une analyse plus poussée des données permettrait sans doute d’y répondre. En revanche, concernant la rédaction, à la lecture du même graphique (livret 2, p .22), on constate une tendance inverse par rapport à la dictée. Dans la quasi-totalité des séances de rédaction, il semble que les élèves écrivent et passent du temps à rédiger. Puisque l’usage du brouillon n’est pas généralisé, on peut en déduire que la phase préparatoire (et peut être aussi l’activité de relecture de son écrit) est (très) peu présente alors qu’il s’agit d’une tâche potentiellement complexe. Mise en dialogue avec d’autres recherches sur le processus rédactionnel et sur les pratiques de production d’écrits à l’école, cette lecture des données (différente de celle proposée dans le rapport) interpelle davantage sur les occasions offertes aux élèves d’apprendre une démarche d’écriture, que l’écrit soit long ou court.
Une indispensable prise en compte de la complexité
La dernière remarque concerne la complexité de l’enseignement et de l’apprentissage de l’écrit et sans doute aussi la complexité des métiers d’enseignant et de formateur (et peut-être aussi d’inspecteur). Rendre compte de cette complexité et la prendre en compte sont nécessaires pour espérer impacter positivement les pratiques et le pilotage.
Le rapport a le mérite de prendre à bras le corps cette complexité, entre autres en mettant en exergue des freins de nature multiple (manque de remplaçants, impact des évaluations nationales, lacunes dans les connaissances didactiques et pédagogiques, manque de formation sur l’écriture, immenses difficultés dans la prise en charge des élèves à besoins éducatifs particuliers malgré « la volonté de faire au mieux pour [les] accueillir et [les] instruire », etc.). Au sujet de ces freins, « on peut déplorer qu’une connaissance fragmentaire du prescrit, une volonté marginale de travailler en équipe rendent difficile l’élaboration commune de progression ». Mais on pourrait aussi interroger le rythme auquel les prescriptions et les recommandations changent, le peu d’heures de concertations institutionnalisées prévues dans le temps professionnel.
La prise en compte de la complexité se retrouve également dans les recommandations, adressées à la fois aux enseignants, aux formateurs et autres acteurs du pilotage pédagogique. Je voudrais à ce sujet nuancer l’une de celles adressées à l’école élémentaire (« réhabiliter les exercices d’entrainement au geste graphique et à la copie dans leur fréquence et leur variété tout au long de l’école primaire pour que les élèves s’engagent aisément dans les activités de rédaction »). Sans sous-estimer l’impact du geste graphomoteur et l’intérêt de la copie (surtout quand elle est enseignée et non pas seulement exercée), s’engager aisément dans une tâche de rédaction sollicite des dimensions supplémentaires. Par exemple, la mobilisation, le maintien en mémoire et l’organisation d’informations pour créer un texte cohérent, correspondant au genre ou au type d’écrit attendu et à la consigne donnée, font partie du processus de rédaction et se travaillent aussi en dictée à l’adulte (peut-être elle aussi à réhabiliter dans une perspective d’intercycle). Repenser l’enseignement de l’écriture et de la production d’écrits tout au long de l’école primaire demande de s’interroger sur la complémentarité et la spécificité des tâches d’écriture et sur les occasions d’apprendre qu’elles offrent potentiellement aux apprentis scripteurs.
Enfin, prendre à bras le corps la complexité de l’écriture, de son enseignement et apprentissage, et de l’exercice du métier demande aussi de prendre appui sur des travaux récents (de didactique notamment) ancrés dans le réel de la classe et de la formation. Est-il réellement pertinent et outillant de donner pour référence le fait que « [p]our produire un texte de qualité, le rédacteur doit à minima (re)trouver et sélectionner les idées pertinentes par rapport au sujet et organiser ces idées de manière logique et cohérente. Il lui faut ensuite traduire ces idées à l’aide du vocabulaire conforme. Puis le texte doit être produit sans erreur d’orthographe lexicale ou grammaticale, ce qui dans le cas du français est une tâche complexe » ? On sait aujourd’hui que pour tout scripteur, novice ou confirmé, la langue ne traduit pas une pensée préexistante : le discours, oral comme écrit, se construit dans l’entremêlement de ces deux dimensions. Et la production du texte ou mise en texte ne se limite pas à une focalisation sur l’orthographe, certes complexe en français. Elle est essai, reprise, relecture, transformation, potentiellement du fond et de la forme. À l’école, l’enseignement de l’écrit (et non son évaluation) passe par des interactions. Les élèves qui apprennent à produire des écrits ne cherchent pas seuls des informations. Ils apprennent à s’appuyer sur les leçons antérieures rappelées collectivement, sur les affichages de la classe et sur les idées qui émanent du groupe classe. L’organisation de ces idées va dépendre du type d’écrits et de la situation d’écriture, et elle est parfois guidée par un canevas textuel. L’orthographe peut être préparée en amont par des listes de mots et reprise lors de la relecture, qui est aussi l’occasion de vérifier l’adéquation des écrits produits avec d’autres critères de réussite préalablement énoncés aux élèves.
Tirer parti des savoirs issus de toutes les disciplines de référence (psychologie, linguistique, didactique, pédagogie, sociologie, littérature… sans ordre de priorité), travailler avec le terrain et au plus près de celui-ci, et favoriser de bonnes conditions d’exercice du métier est indispensable pour espérer mieux former et enseigner.
Bernadette Kervyn