Pour le SNEP-FSU, premier syndicat des professeurs d’Éducation Physique et Sportive, « la démocratisation du sport passe inévitablement par l’École, seul lieu et temps où l’ensemble des jeunes sont confrontés à l’étude des pratiques physiques sportives et artistiques ». « Si des passerelles sont à réfléchir et approfondir avec le milieu sportif, ce n’est pas en les opposant ou en empiétant sur les champs d’intervention des uns et des autres que nous gagnerons le pari d’engager une plus grande part de la jeunesse vers la pratique physique et sportive tout au long de leur vie » a déclaré Coralie Benech lors d’une conférence de presse. La secrétaire générale du syndicat a fait le point sur la place de l’EPS à l’école et les conditions d’exercice de ces professeurs un peu à part.
Pour une jeunesse plus sportive, il faut investir fortement dans l’EPS, « en faire un axe prioritaire des politiques éducatives et reconnaitre cet enseignement sur l’ensemble du parcours scolaire des élèves ». « Pour l’heure, il manque un engagement politique à la hauteur des enjeux qui sont face à nous » selon Coralie Benech.
Pour preuve, le nombre de places au concours du CAPEPS qui a diminué de 21%, passant de 800 à 650 postes entre 2018 et 2023. Une diminution que le syndicat n’explique pas par les effectifs d’élèves qui dans le même temps ont augmenté de 28 866 élèves dans le second degré. La baisse des recrutements a entrainé de nombreuses suppressions d’emplois pour l’EPS et des classes de plus en plus chargées. « Depuis 2017, le SNEP-FSU a comptabilisé 1 009 suppressions de postes en EPS (603 en zone de remplacement et 406 en établissement) ». Première conséquence, 2 579 heures d’EPS non assurées dès la rentrée 2023, ce qui équivaut à plus 30 % d’heures non assurées recensées par rapport à la rentrée 2022, et + 87 % depuis 2019.
Autre conséquence, les effectifs d’élèves par classe, la responsable syndicale donne l’exemple du collège REP Pascal de Plaisir (78) où les classes dénombrent 30 élèves, 36 pour le collège Carnot à Paris (75) et 39 au lycée de l’Oiselet de Bourgoin-Jailleu (38). « Ce sont les élèves les plus en difficulté qui sont pénalisés par les sureffectifs dans les classes. Les installations ne sont pas adaptées et le temps de pratique souvent réduit d’autant ». « Pour une EPS de qualité, il faut un plan pluriannuel de 1 500 recrutements de professeurs d’EPS et la limitation des effectifs par classe – 24 en collège et LP, 27 en LGT » revendique le syndicat .
Des équipements vétustes et insuffisants
Concernant les équipements sportifs, le SNEP-FSU estime qu’il n’y en a pas assez, qu’ils sont pour beaucoup vétustes et inégalement répartis sur le territoire. Au niveau national, la moyenne d’équipements est de 49,6 pour 10 000 habitants. En Seine-Saint-Denis, elle est de seulement 16,2. « L’attribution des JOP 2024 à Paris aurait pu être l’élément déclencheur d’un grand plan de construction. Force est de constater que ce n’est pas le cas. 95 % des équipements sportifs utilisés lors des JOP seront soit déjà existants soit temporaires. Seules 3 nouvelles enceintes sportives – Arena Porte de la Chapelle, centre aquatique de Saint-Denis et le mur d’escalade du Bourget – sont sorties de terre ! » dénonce Coralie Benech.
Sur la loi sur le sport, la responsable syndicale la qualifie de « poudre aux yeux » sur le volet des équipements sportifs. « La loi « démocratiser le sport en France » (mars 2022) et le décret d’application (juin 2023) ne sont que de la poudre aux yeux en matière d’amélioration. Les plateaux en bitume, les pistes cendrées, les salles exigües et vétustes sont toujours là ».
Pour le syndicat, il faudrait construire ou rénover 200 piscines et au moins 200 gymnases écoresponsables par an avec une part de 50 % de financement par l’État.
EPS vs sport à l’école
« Le dispositif 2 h de sport est un affichage de façade, qui, d’ailleurs, s’appuie pour la majorité des établissements, sur des projets sportifs déjà existants dans les collèges concernés » dénonce le SNEP-FSU. « Le « sport à l’école » existe déjà, à travers l’enseignement de l’EPS et l’association sportive, et n’a pas besoin d’autres structures ». Dans les programmes de l’EPS, c’est la place de la culture sportive (et artistique) qui doit être renforcée, revendique Coralie Benech. Des programmes qui doivent être réécrits pour « permettre, à la fois, de replacer les disciplines sportives au cœur de l’organisation de l’EPS et de répondre à l’indispensable augmentation du temps de pratique sportive ». Pour le syndicat, qui revendique 4 heures d’EPS depuis de nombreuses années, ces quatre heures doivent être « l’élément central de cette réécriture ».
Conditions de travail détériorées et spécificités professionnelles non reconnues
Le syndicat qui s’était opposé à la retraite à 64 ans, déplore que l’usure professionnelle de leur métier ne soit pas prise en compte dans les réflexions sur les fins de carrière. « Les professeurs d’EPS, parmi les enseignants du second degré public, sont ceux qui en pourcentage ont le plus d’accidents de services ». Selon une enquête auprès des professeurs d’EPS, 81,8 % estiment que les conditions d’exercice actuelles de leur métier peuvent nuire à leur santé et 83 % déclarent être inquiets pour leur fin de carrière. 57 % d’entre eux ont des « difficultés à bien faire leur travail », 52 % sont confrontés à une « perte de sens du métier » et 15 % songent même à démissionner.
Mieux vivre au travail passerait par un « allégement et aménagement des services en fin de carrière, une reconnaissance du métier d’enseignant d’EPS en tant que profession à risque, le développement d’installations sportives qui concourent à la santé et à la qualité d’étude des usagers et à l’amélioration des conditions de travail des personnels, une meilleure prise en compte des impacts des congés de maternité et de la nature même des droits ouverts aux femmes sur leurs évolutions de carrières » détaille la secrétaire générale.
Lilia Ben Hamouda