Il est des voix qui comptent et qui portent. Eminent didacticien du français, Inspecteur Général de lettres, ancien Directeur de l’Enseignement Scolaire, ancien recteur, ancien président du Conseil Supérieur des Programmes, Alain Boissinot s’exprime à son tour sur l’état du français au lycée. Dans une tribune publiée sur le site de l’AEF, il rappelle la complexité de son héritage, entre transmission du patrimoine et formation rhétorique. Il souligne combien d’une réforme à l’autre le français s’est rétréci en « culture du commentaire ». Depuis 2020, « les épreuves d’examen, plus encore que les instructions officielles, dessinent une image de la discipline déphasée par rapport aux enjeux contemporains, et un retour à la conception étroite de l’enseignement littéraire, celle-là même qui, malgré les efforts de rénovation qui s’étaient fait jour au tournant des années 2000, a conduit à l’effondrement de la série littéraire dans les lycées et à une crise des vocations dans l’enseignement supérieur ». Des possibilités de renouvellement se dessinent, qui restent hélas à la marge : pratiques numériques innovantes, enseignement d’exploration « Littérature et société » (supprimé), reconnaissance de l’importance de l’oral (HLP, « Grand oral »), écritures créatives. Mais il y a urgence : « Une redéfinition de la discipline elle-même et de ses objectifs est indispensable pour redonner un sens aux enseignements littéraires et les illustrer, au moins dans l’enseignement supérieur, en une vraie voie de formation. Il suffit d’observer l’effondrement du nombre des candidats aux concours de recrutement en lettres modernes et plus encore en lettres classiques pour constater qu’il est plus que temps… »
Tribune de Viviane Youx dans Le Café