Les organisation syndicales d’éducation dénoncent unanimement les annonces de revalorisation des enseignants et enseignantes. Sur le volet socle, on estime que même s’il y a des avancées, cela reste largement insuffisant. Sur le volet pacte, tous s’accordent à dire qu’il ne s’agit pas d’une revalorisation puisque les enseignants devront travailler plus pour gagner plus.
Ces annonces sont loin de satisfaire les organisations syndicales. Aucune ne valide le volet pacte de cette revalorisation et toutes estiment insuffisantes les revalorisations liées au socle.
« Pour nous la seule partie qui est de la revalorisation, c’est la partie socle » explique Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale du Sgen-Cfdt. « Le pacte cela ne passe toujours pas, c’est du travailler plus pour gagner plus ». « Sur la partie socle, nous étions demandeur du dédoublement de l’ISAE et l’ISOE. Le ministère a bougé par rapport à la première mouture qui nous avait été présentée où seule la prime d’attractivité était proposée aux débuts de carrière. Des « bougers » significatifs qui permettent, enfin, au bout de trois années, d’avoir un gain salarial pour tout le monde mais on est pas à la fin du match. Nous sommes loin du compte de ce qu’on attend d’une revalorisation de fond des métiers de professeurs, CPE et psy EN ». Pour le syndicat, « le pacte n’est pas une revalorisation. On a une opposition de fond sur la philosophie. Le pacte aggrave les conditions de travail alors qu’on a des alertes majeures sur l’épuisement professionnel et par sa structure même le pacte va creuser les inégalités femmes-hommes, premier-second degré et entre les différentes disciplines ou fonctions. Comment les CPE, les profs documentalistes et les psy EN pourront l’intégrer ? ». Le Sgen-Cfdt salue toutefois les annonces d’alignement de la prime modulable des professeurs principaux de première, terminale et seconde année de CAP. « Nous demandions une hausse de la part modulable pour les professeurs principaux » commente Catherine Nave-Bekhti. « Ils ont accepté d’aligner les professeurs de première, terminale et deuxième année de CAP, ce n’est pas anecdotique. Les enjeux d’accompagnement et d’orientation des élèves ne sont plus les mêmes, les missions se sont intensifiées. Mais on est pas allés au bout de ce qu’il fallait ».
Au SNUipp, on a un gout amer. « L’action syndicale a forcé le dédoublement de l’ISAE et de l’ISOE. On s’est battu pour l’avoir » nous confie Guislaine David, secrétaire générale et porte-parole du syndicat des enseignants du premier degré. « Mais c’est loin d’être assez, loin des 300 euros que l’on demande ». Sur le volet Pacte, la responsable syndicale souligne l’aspect inégalitaire entre les femmes et les hommes du travailler plus pour gagner plus. « On sait que les femmes s’inscrivent moins dans des missions supplémentaires, elles ne pourront donc pas gagner plus ». «Cela va désorganiser l’école car les temps de travail collectif vont être percutés par les emplois du temps des uns et des autres. Et puis, c’est du One shot » ajoute-t-elle dénonçant le manque de plan pluriannuel.
Même amertume au SNES-FSU. « L’augmentation de l’ISOE/ISAE, on l’a porté, on s’est battu pour l’avoir » s’agace Sophie Vénétitay. « Mais cela ne permet même pas de rattraper ce que l’on a perdu. Les enseignants et enseignantes ont perdu jusqu’à 25% de pouvoir d’achat ces dernières années. Ce que l’on nous annonce est insuffisant. La promesse d’Emmanuel Macron des 10% de revalorisation n’est pas tenue. Il fallait doubler l’enveloppe pour y arriver. Là le compte n’y est pas. C’est d’autant plus grave que l’on traverse une crise de recrutements et de démissions sans précédents ». Quant au « Pacte, c’est une réponse provocatrice et hors sol » résume la responsable syndicale.
Pour Stéphane Crochet secrétaire général du SE-UNSA, « le Président persiste à faire des contre sens ». Le responsable syndical reconnait que sur les choses ont bougé sur la revalorisation pour tous « par rapport au début des discussions ». « Néanmoins Emmanuel Macron persiste avec son pacte car il ne comprend pas la réalité du métier. Un métier qui s’est largement intensifié, complexifié. Face à ce constat, il propose du travailler plus pour gagner plus » s’irrite-t-il.
Pour le SNALC, « on est très loin du compte ». « La promesse de campagne n’a été tenue ni sur le temps, ni sur le montant. On est très loin des 10 % annoncés, puisque la hausse est d’environ 100€ net par mois pour la grande majorité des collègues » indique le syndicat qui constate que « le ministère a fait évoluer la répartition de son enveloppe dite « socle » afin de la rendre un peu plus équitable ». Il rappelle, par ailleurs, « qu’il en faudrait encore 8 ou 9 comme celle-ci afin de nous payer à la hauteur de notre niveau de concours, de notre niveau d’études, de nos responsabilités et de la difficulté de nos conditions de travail ». Pour le SNALC, c’est « déjà les soldes » puisque le pack de missions est passé de 24 à 18 heures pour les missions prioritaires.
Chez SUD éducation, on ne décolère pas. « Ces annonces sonnent comme une nouvelle provocation : alors que toutes les organisations syndicales ont refusé le pacte, le Président confirme sa mise en œuvre. Et ce alors même que toutes les études montrent que le temps de travail des enseignants a explosé » indique le syndicat qui estime que « globalement, l’enveloppe est très insuffisante, elle ne pallie même pas les effets de l’inflation ! ».
Même mécontentement à la Fep-cfdt, syndicat des enseignants du privé sous contrat, qui évoque une revalorisation que ne permettra pas de combler le décrochage salarial des enseignants. Le syndicat note toutefois quelques avancées avec certaines de leurs revendications qui ont été prises en compte. « Les indemnités de suivi des élèves ont été doublées, mais nous demandons leur triplement pour 2024. Un accès plus rapide à la hors classe va dans le bon sens, mais ne règle pas l’absence de véritables perspectives de carrière. Les professeurs du privé pourraient enfin avoir le droit de passer le concours d’inspection, mais pas celui de personnel de direction. Les salaires des remplaçants du privé seront alignés sur ceux du public ». Sur le volet pacte, là encore, le syndicat réfute « la philosophie du pacte qui ressert l’idée de travailler plus pour gagner plus » et réclame « le basculement de l’enveloppe du pacte dans celle prévue pour le socle ».
Le mécontentement des syndicats est-il à l’image de celui des enseignants ? Les prochains mois nous le diront.
Lilia Ben Hamouda