Dans son rapport « L’Europe de l’éducation en chiffres » sorti en décembre dernier, la DEPP fait le bilan de la stratégie commune d’éducation de l’UE des 27 qui se fixait sept objectifs à l’horizon 2030, « des objectifs qui doivent être considérés comme des niveaux de référence des performances moyennes européennes ». Si la France se démarque par le fort taux de scolarisation dès 3 ans, elle fait figure de mauvaise élève quant au taux d’élèves faiblement performants.
Objectif 1 : Au moins 96% des enfants dès 3 ans doivent participer à l’éducation
En 2020, 93% des enfants dans l’Union Européenne fréquentaient des structures permettant de commencer leur éducation. Cinq pays ont dépassé la cible européenne des 96%. La France et l’Irlande ont un taux de participation à 100%. Pour rappel, depuis 2019, l’instruction est obligatoire dès trois ans en France, mais la grande majorité des petits français fréquentaient déjà les bancs de l’école.
A l’autre bout de l’échiquier, la Grèce affiche un taux de 71,3% des enfants de 3 ans et plus fréquentant des structures éducatives. Pour autant, « l’idée gagne du terrain en Europe » souligne la DEPP.
Objectif 2 : Diminuer le nombre de sorties précoces de l’éducation
L’objectif affiché par l’UE des 27 est d’atteindre moins de 9% de jeunes qui quittent précocement le système scolaire, c’est-à-dire des jeunes âgés de 18 à 24 ans qui n’ont pas de diplôme et ne sont ni en formation ni à l’école.
En 2021, ils étaient 9,7% en moyenne dans l’UE-27. En France, ils sont 7,8%. En Allemagne, le taux a significativement augmenté, passant de 10,1 en 2020 à 11,8% en 2021. Le Portugal a quant à lui vu le nombre de jeunes non diplômés et déscolarisés considérablement baissé. Ils étaient 23% en 2011, ils sont 5,9% en 2021. « Dans ce pays, de nombreuses réformes et stratégies ont été mises en place depuis 2012. En particulier, le « plan national de promotion du succès à l’école » (« Programa Nacional de Promoção do Sucesso Escolar »), mis en place entre 2016 et 2019, inclut de nouveaux dispositifs d’évaluation au cours de l’élémentaire et du premier cycle de l’enseignement secondaire et un système de tutorat pour les redoublants » note le rapport.
Les garçons sont toujours plus nombreux a quitté le système éducatif sans diplôme. Dans l’UE-27, elles sont 7,9%, les garçons, 11,4% en moyenne.
Objectif 3 : Arriver à moins de 15% des jeunes de 15 ans ayant de faibles compétences de base
Se basant sur PISA 2018, l’UE-27 se donne pour objectif d’avoir moins de 15% d’élèves « faiblement performants », élèves qui se situeraient dans un groupe de niveau 2, « seuil à partir duquel les élèves commencent à être capables d’utiliser leurs compétences en lecture pour acquérir des connaissances et résoudre des problèmes ». Ils sont en moyenne 22,5% lors de la dernière enquête PISA à ne pas parvenir au seuil de compétences minimales dans la compréhension de l’écrit. Une moyenne qui a augmenté de 3 points de pourcentage entre 2009 et 2018. En France, la part est restée relativement stable, se situant à 20% en 2009, 21% en 2018. Taux dont ne peut se féliciter la France.
Dans les deux autres domaines évalués en 2018, culture mathématique et culture scientifique, la moyenne est respectivement de 22,9 et 22,3%. Pour la France, elle est, là encore, à 21% d’élèves de 15 ans rencontrant des difficultés.
Selon l’enquête TIMSS de 2019, le score moyen de l’UE-27 en CM1 (quatrième année d’enseignement) est de 527 points en mathématiques et 522 en sciences. Les résultats des élèves français sont largement à la traîne, leurs scores se situant à 485 points en mathématiques et 488 en sciences. La moyenne des élèves insuffisamment compétents en Europe se situe à 6%. En France, elle est de 14%, plus du double.
Pour les élèves de quatrième, là encore, la France décroche. Le score moyen est de 511 points en mathématiques et 515 en sciences. Le score français est de respectivement 483 et 489. La moyenne européenne des élèves insuffisamment compétents en huitième année d’enseignement (4e en France) est 23% en maths et 20% en sciences. En France, cette moyenne est de 33 et 28%.
Au niveau de l’équité, l’Europe accuse du retard par rapport aux autres pays de l’OCDE. Seul un quart des pays de l’UE sont à la fois performants et équitables. La France fait partie des mauvaises élèves. Elle réunit une faible équité des résultats (18% de la variation des résultats s’explique par le statut économique, social et culturel).
Objectif 4 : Limiter à 15% la part d’élèves de huitième année d’enseignement (quatrième) ayant un faible niveau en littératie numérique
La littératie numérique se définit par « la capacité d’un individu à utiliser efficacement un ordinateur pour collecter, gérer, produire et communiquer des informations à la maison, à l’école, sur le lieu de travail et dans la société ». Seuls six pays avaient participé à l’enquête Icils chargée d’évaluer ces compétences. La France est loin des 15%, les élèves faiblement performants étaient 43,5%. Près du triple.
Objectif 5 : au moins 45% des individus de 25 à 34 ans diplômés d’études supérieures
En moyenne, l’UE-27 affiche un taux de 41,2% de jeunes de 25 à 34 titulaires d’un diplôme d’études supérieures. En France, ils sont 50,3%.
Dans l’Union Européenne, les femmes sont plus souvent diplômées, 11 points d’écart en moyenne. En France, l’écart de genre est l’un des moins marqués – 54,2% de femmes contre 46% d’hommes. En Italie, elles sont 34,4% contre 22,3 des hommes.
La France est encore loin des objectifs fixés pour 2030. On voit mal comment cela pourrait s’arranger : classes surchargées, pénurie d’enseignants et enseignantes, suppressions de postes à la prochaine rentrée… L’incapacité du système français à accompagner ses élèves vers l’acquisition des compétences de base, particulièrement ceux de familles populaires, est un constat d’échec pour les politiques publiques d’éducation françaises de ces dernières dizaines d’années.
Lilia Ben Hamouda
Sur les suppressions de postes à la rentrée prochaine