L’Association des Professeurs de Sciences Économiques et Sociales (APSES) dresse un constat négatif de la réforme du lycée ans leur discipline. L’association a mené une enquête auprès des professeurs de SES. Elle a été remplie par 700 enseignants – 15% de la totalité des enseignants. Les résultats de cette étude montrent une augmentation du nombre d’élèves par classe, une baisse du nombre d’heures à effectifs réduits (deux fois moins) et une dégradation qui a des effets sur la santé des enseignants et enseignantes.
Le communiqué :
Dégradation de la formation, classes surchargées, travail empêché, risques psychosociaux : les effets particulièrement inquiétants de la réforme du lycée
L’APSES a mené une enquête auprès des enseignant·es de SES pour évaluer les effets de la réforme du lycée, trois ans après sa mise en place. Près de 700 enseignant·es de SES, soit environ 15% des collègues, issu·es de 527 établissements différents, y ont répondu entre octobre et novembre 2022. Les résultats détaillés de cette enquête sont disponibles ici.
Plus de groupes, et plus d’élèves
Le nombre d’élèves suivis par enseignant·e a fortement augmenté. Les collègues de SES ont en charge, en moyenne, 6,4 groupes d’élèves différents et 183 élèves, soit des groupes constitués de 28,6 élèves. C’est en SES que les groupes d’élèves sont les plus chargés, comme le montre la DEPP dans une publication récente1.
De surcroît, dans le cycle terminal, les élèves sont issu·es d’un nombre très élevé de classes différentes. La situation la plus fréquente est un groupe de spécialité composé d’élèves venant de 5 classes différentes. Seul·es 6% des collègues enseignent dans des groupes où les élèves sont issu·es d’une seule et même classe. Dans ces conditions, le fait de devoir travailler avec des élèves issu·es de classes multiples diminue la cohérence du groupe, et rend aussi très compliquée la possibilité d’exercer la fonction de professeur principal (il n’y a plus que 5,4% des collègues qui le sont en première, contre 21,6% en 2018-2019).
Moins d’heures à effectifs réduits
Le nombre d’heures enseignées en groupes à effectifs réduits a continué à diminuer : plus de la moitié des collègues n’ont aucune heure en groupe à effectif réduit, alors que ce n’était le cas que de 15,7% des collègues en 2018-2019.
Au total, les collègues de SES enseignent en moyenne 2,2h devant des groupes à effectifs réduits, contre 3,81 heures en 2018-2019. Depuis l’application de la réforme le nombre d’heures à effectifs réduits a donc été divisé par presque 2 en SES.
Cette baisse du nombre d’heures en effectifs réduits ou dédoublés entraîne à la fois un alourdissement significatif des conditions de travail des enseignant·es, et une dégradation notable des conditions d’enseignement pour les élèves, puisqu’elle rend beaucoup plus difficile la mise en place de méthodes actives, de pédagogies différenciées ou d’activités de remédiation.
Une dégradation des conditions de travail qui a un effet négatif sur la santé des collègues de SES
Ces effets de la réforme ont des conséquences sur la santé et le rapport au travail des collègues de SES. Interrogé·es dans cette enquête à partir de trois questions posées dans les enquêtes sur les risques psychosociaux (RPS) liés au travail, les collègues de SES déclarent plus que la moyenne des salarié·es et des enseignant·es des facteurs de RPS.
Ainsi, au cours des 12 derniers mois, 67% des collègues de SES déclarent être allé·es travailler tout en pensant qu’ils ou elles auraient dû rester à la maison parce qu’ils ou elles étaient malades, soit 10 points de plus que la moyenne des enseignant·es du second degré dans la dernière enquête de la DARES analysée par la DEPP2.
De même, alors que dans l’enquête de la DARES, 34% des enseignant·es déclarent que le travail a un effet néfaste sur leur santé, c’est 65% des enseignant·es de SES, soit presque deux fois plus. C’est particulièrement vrai pour les femmes qui déclarent beaucoup plus fréquemment un effet néfaste sur leur santé, mais aussi être allées travailler en étant malade.
Ces données confirment les résultats d’une enquête similaire menée dès la rentrée 2019. Force est de constater que les conditions de travail des enseignant·es de SES et les conditions d’apprentissage pour les élèves se sont nettement dégradées.
La réforme du lycée a donc bien eu comme effet un affaiblissement de la formation en Sciences Économiques et Sociales des lycéen·nes, pourtant indispensable pour comprendre les grands enjeux politiques, économiques et sociaux.