C’est sans doute le défi de ce quinquennat pour l’Éducation nationale. La Depp publie deux notes relatives à l’évolution du nombre d’élèves dans le premier et le second degré. Déjà se distingue nettement les effets de la baisse du nombre des naissances. Le nombre d’élèves diminue fortement dans le premier degré. La chute aborde le collège et commence à produire ses effets en 6ème. Sur le quinquennat, c’est au moins 500 000 élèves qui devraient disparaitre. Cela libèrera des ressources. Comment le gouvernement les utilisera-t-elle ? Resteront-elles dans l’Éducation nationale pour en améliorer son fonctionnement ? Ou bien partiront-elles vers d’autres budgets ? La publication demain de la carte scolaire de la rentrée 2023 apportera des réponses.
100 000 naissances en moins
L’évolution démographique du pays fait sentir ses effets sur l’École de la maternelle au lycée. Même si elle n’est pas le seul moteur de l’évolution du nombre d’élèves, c’est elle qui fixe la direction. Or, entre 2011 et 2020, pour ne retenir que les écoliers, le nombre de naissances est passé de 823 000 à 735 000. Presque 100 000 enfants entrent en moins à l’école primaire sur la décennie.
Dans le premier degré
Selon la Depp, le premier degré a perdu 58 700 élèves à la rentrée 2022, soit 1% de ses élèves aussi bien dans le pré élémentaire que dans l’élémentaire. Cela n’a pas profité à la scolarisation des moins de 3 ans : on compte un millier d’enfants scolarisés en moins, même si le taux remonte de 0,1%. Globalement, l’école maternelle perd 22 500 élèves à la rentrée 2022, soit 1%, un taux équivalent dans le public et le privé. À l’école élémentaire, c’est 38 000 élèves qui ont disparu, principalement en CP (- 14 000) et en Ce1 (-18 000). La baisse est un peu plus forte dans le privé. Peut-être faut-il y voir les premiers effets de la crise.
Au total, 27 académies perdent des élèves dans le premier degré. Seules 3 académies connaissent une hausse : la Guyane, Mayotte et Nice. Rappelons que dans les deux premières, tous les enfants ne sont pas scolarisés et que des écoles pratiquent encore l’alternance matin / après midi. Les baisses les plus fortes sont dans les académies de Paris (-3%), Lille (-2.4%), Amiens, Besançon
Dans le second degré
Au collège, on assiste à une nette chute du nombre d’élèves en 6ème : -8 000 malgré l’arrivée de plusieurs milliers d’enfants ukrainiens. Globalement, il y a 4000 élèves de plus au collège à cette rentrée du fait des effectifs plus élevés des générations 2010 et 2008 (5ème et 3ème). Au lycée, les effectifs sont stables dans les formations générale et technologique. Mais ils baissent fortement en 2de (-14 000 soit -2,5%), effet de la génération 2007, mais pas seulement, on le verra. Dans la voix professionnelle, on compte 5000 élèves de moins avec moins d’élèves en 2ème année de CAP et en terminale pro.
C’est que d’autres phénomènes jouent également un rôle dans l’évolution du nombre d’élèves. La rentrée 2022 voit une forte hausse du taux de redoublement. Il n’est pas très difficile d’en comprendre la cause : quoiqu’en dise le ministère, les effets du confinement se font sentir, d’autant que rien n’a été fait pour les compenser. Cela se traduit par une hausse des redoublements en 3ème, qui diminue l’arrivée des élèves en seconde. Elle est tempérée par la hausse des redoublements aussi en 2de. L’orientation vers le professionnel et le technologique augmente aussi. Mais on assiste aussi à une hausse des sorties en cap et terminale pro. La politique gouvernementale a rendu l’apprentissage tellement attractif pour les entreprises qu’une partie des lycéens professionnels quittent le lycée pour les CFA.
Quelle politique ?
Mais de tous ces facteurs d’évolution, celui qui se distingue est bien sûr la chute démographique. Les classes creuses qui arrivent au collège vont remonter jusqu’en seconde d’ici à la fin du quinquennat. Derrière, c’est une seconde marche avec un nombre encore plus faible d’élèves. Les enfants en Cm2 sont 820 000. En CP, ils sont 780 000. En PS 750 000. D’année en année, le nombre d’élèves va continuer à baisser et de plus en plus vite.
Que fera le gouvernement de cette baisse du nombre d’élèves ? Elle peut permettre d’amener le nombre d’élèves par classe au niveau moyen des autres pays européens, alors qu’actuellement, on est très au-dessus. Elle peut aussi permettre de diminuer le nombre de fonctionnaires et réaliser des économies. Dès 2021, le sénateur Longuet invitait le gouvernement à anticiper la chute et à diminuer le recrutement de fonctionnaires au profit de contractuels. Entre la gestion comptable et améliorer le niveau scolaire de tous les enfants, le gouvernement va devoir choisir. La publication demain de la carte scolaire de la rentrée 2023 apportera des éléments de réponse.
François Jarraud