L’école fait son job. C’est un des messages portés par Fabrice Krot, Caroline Latournerie et Marguerite Graff. Tous trois enseignants, ils ont participé à l’écriture de « Chaque élève compte » (éditions de l’Atelier). Caroline et Marguerite sont professeures d’histoire-géographie au lycée Auguste-Renoir d’Asnières-sur-Seine. Fabrice Krot, aujourd’hui à la retraite, était instituteur, puis conseiller pédagogique à Châtenay-Malabry. Chacun à leur façon, ils ont innové pédagogiquement pour la réussite de leurs élèves, pour que « chaque élève compte ». Pour que Le Café pédagogique continue, profitez de notre offre et recevez ce livre en cadeau !
Être prof pour Caroline et Marguerite, c’est occuper une place privilégiée auprès de la jeunesse, place nourrie de rendez-vous presque quotidiens, en tout cas hebdomadaires. « Et cette place auprès de la jeunesse est un privilège, car elle met en relation le présent et le futur avec espérance. On est prof parce qu’on croit profondément en cette jeunesse. Et c’est un privilège, car la jeunesse est belle ! Elle peut être bruyante, fatigante, rétive, fragile souvent, mais elle est en demande de propositions et de réponses. Ses attentes nous obligent. Nous, enseignants, avons le goût de la jeunesse dans tous ses éclats. Nous les rencontrons à un moment de leur vie où ils sont en construction et nous sommes là pour les aider à s’accomplir, à se sentir à leur place ». Pour Fabrice Krot, être prof, « ce n’est pas délivrer une parole magistrale portée avec des arguments d’autorité, c’est au contraire aider les élèves à cheminer vers une réelle compréhension du monde qui les entoure d’une manière qui leur est abordable et qui leur permettra de se dépasser pour faire un saut conceptuel ». Ces trois visions du métier sont loin de celle prônée par l’avant-dernier occupant de la rue de Grenelle. Loin de la vision de l’école d’Épinal, où les élèves attendaient sagement que le savoir leur soit délivré. Pour ces trois profs, enseigner c’est se questionner, c’est se renouveler quotidiennement pour permettre aux élèves de développer leur esprit critique, de s’émanciper…
Le plaisir d’enseigner
Et être prof, c’est aussi, « rendre aux élèves leur fierté pour qu’ils se redressent. Les moments de grâce quand on a permis à un élève de vivre quelque-chose qui l’a déplacé, une lumière qui s’échange par le regard, parce qu’une idée a fait sens, ou parce qu’un mot, un encouragement l’a remis sur le chemin » expliquent Caroline Latournerie et Margueritte Graff. Pour elles, l’enseignement apporte des petites joies quotidiennes, celle des réussites individuelles des élèves, mais aussi du collectif. « On peut connaître avec toute une classe des grands moments de gaité, quand le cours fonctionne ». Le plaisir intellectuel n’est pas en reste dans l’acte d’enseigner selon elles. « La pédagogie et l’apprentissage constant nous nourrissent. Lorsque l’on se creuse la tête pour mettre en musique tel ou tel questionnement ou notion ou lorsque l’on Imagine des stratégies pour emmener jusqu’à une idée ».
Fabrice Krot, aujourd’hui à la retraite, a tout aimé dans le métier d’enseignant, « la relation aux élèves, la liberté pédagogique, le travail d’équipe, la recherche pédagogique, la remise en question permanente de son travail… ». Il n’est pourtant pas nostalgique « des lourdeurs administratives, de la méconnaissance du système scolaire chez de nombreux acteurs de l’école, du poids insupportable de la hiérarchie et de l’incompétence de certains hiérarques ».
Collaborer à « Chaque élève compte », un besoin pour les trois profs
Pour les trois profs, participer à la rédaction de « chaque élève compte » répondait au besoin de changer le regard sur l’école publique et surtout les élèves de quartiers populaires. « Lorsque j’étais conseiller pédagogique, j’ai animé la Maison des sciences. Un lieu pensé pour compenser le manque d’activités scientifiques dans les classes de ma circonscription » explique Fabrice Krot qui a présenté l’intérêt pédagogique de cette démarche dans un des chapitres du livre. « Il s’agissait de montrer que face au déterminisme social – de classe, de quartier…, il y a des actions qui peuvent être menées et qui portent leurs fruits. Les élèves des quartiers populaires sont donc capables de réussir comme les autres, il faut juste compenser lourdement l’écart culturel de départ, et ce, dès l’école maternelle ».
Caroline Latournerie et Marguerite Graff y ont raconté les débats sur la laïcité qu’elles ont animés en classe au lendemain des attentats de 2015. « Les jeunes attendent de l’école qu’elle leur explique les situations difficiles. Ils viennent avec l’espoir d’avoir des réponses. S’ils savaient déjà tout ou qu’ils étaient d’accord sur tout, alors l’école ne servirait justement à rien et nous non plus ! C’est bien pour leur permettre de construire leur propre réflexion, d’exercer leur libre arbitre, de leur offrir la possibilité de faire des pas de côté, d’éprouver le débat, c’est-à-dire la possibilité d’exprimer leurs avis, mais aussi d’accepter des opinions différentes, en ce sens, l’école est un lieu unique. Alors oui, pour aborder des questions vives qui tendent la société, il est nécessaire pour nous enseignants de nous préparer, d’avoir établi des relations de confiance avec les élèves et un climat sécurisant dans les classes. Quand ces conditions sont réunies, les cours autour des questions vives sont les cours les plus passionnants » commentent-elles.
Une école républicaine qui « fait le job »
Les auteurs et autrices réunis par Mohand-Kamel Chabane et Benoît Falaize partagent tous et toutes une volonté de « combler le gouffre qui s’aggrave entre ce que nous vivons au quotidien et les discours défaitistes, voir mortifères. Oui, les difficultés existent, mais les solutions aussi. Nous voulons témoigner que l’école républicaine, malgré les discours alarmistes « fait le job » et parfois de façon merveilleuse, d’abord parce qu’elle accueille tous les enfants, quels qu’ils soient. Et ensemble, chaque jour, nous faisons société, nous faisons république. L’école y parvient souvent mieux que le reste de la société… elle peut être fière de montrer le chemin » affirment Caroline et Marguerite. Et pour les deux enseignantes, enseigner auprès d’élèves étiquetés comme « difficiles », c’est vivre de beaux moments. « Nous leur faisons comprendre aussi cette chose toute simple et pourtant essentielle : « ici, aujourd’hui, pendant ce cours, je suis heureuse d’être avec vous ». Poser un regard positif sur eux, croire en eux, s’intéresser à leur histoire, à l’histoire de ces quartiers si décriés est une clé. Ils doivent sentir que nous faisons ce métier avec notre cœur et notre sincérité. Selon les classes, bâtir une relation de confiance peut prendre du temps, parfois plusieurs mois, pendant lesquels les élèves testent notre solidité, notre cohérence et notre équité vis-à-vis de tous, ainsi notre exigence vis-à-vis de nous-mêmes et notre engagement auprès d’eux. Une fois que la confiance règne, nous avons en main une baguette magique : alors, oui, presque tout est possible ! »
« Chaque élève compte », c’est le refus d’un pays qui se défie de sa jeunesse, qui s’enlise dans un regard négatif sur son école. C’est croire en l’éducabilité de tous les élèves.
Lilia Ben Hamouda
Kamel Chabane et Benoît Falaize, Parce que chaque élève compte. Enseigner en quartiers populaires. ISBN : 9782708253933
Profitez de l’offre exceptionnelle du Café pédagogique ! Le Café pédagogique vous offre ce livre pour votre adhésion à notre association. Soutenez le Café pédagogique, recevez ce livre en cadeau ou regardez nous disparaitre !
Pour profiter de cette offre et recevoir le livre, cliquez ici.