90% des élèves apprécient l’EPS. C’est un des résultats du sondage organisé par le Snesp Fsu auprès des élèves et des parents. Loin de demander « du sport », les élèves et leurs parents ont des attentes précises sur l’EPS. Ressort du sondage une réelle volonté de voir l’EPS mis en avant dans les enseignements, avec un temps de pratique plus important. Alain De Carlo, secrétaire national du Snep Fsu et rapporteur de ces enquêtes, fait le point.
Comment s’est organisée votre enquête ?
Nous avons proposé une enquête pour les équipes EPS qui souhaitaient avoir un retour sur le ressenti de leurs élèves. Chaque équipe pouvait (ou non) nous renvoyer ses résultats pour compilation nationale. Parallèlement nous avons réalisé une enquête du SNEP-FSU vers les parents. Les équipes d’EPS pouvaient télécharger les enquêtes pour les proposer aux élèves et aux parents de leur établissement. Nous avons aussi envoyé l’enquête parents aux fédérations de parents d’élèves. Nous avons reçu plus de 6000 réponses de parents et 45 356 réponses élèves (23 153 filles 51% et 22 203 garçons 49%) venant d’établissements de toute la France. Ce qui en fait l’une des enquêtes les plus massives sur l’EPS. En 2006, le ministère avait réalisé une enquête sur le ressenti des élèves, elle avait concerné moins de 2000 élèves.
89% des élèves plébiscitent l’EPS ?
Quand on demande aux élèves si l’EPS fait partie des disciplines qu’ils aiment « le plus » ou « le moins », 60,5% d’entre eux répondent que l’EPS est une des disciplines qu’ils préfèrent. Pour 29,1%, ils « l’aiment » autant que les autres et seulement 10,5% d’élèves classent l’EPS dans les matières qu’ils apprécient le moins. Que ce soit chez les filles ou chez les garçons le « plus » est largement supérieur au « moins » (66 points d’écart chez les garçons, 32 points d’écart chez les filles). En effet, 89,6% des élèves nous disent apprécier l’EPS, la discipline est plébiscitée. Nous nous en doutions, mais pas à un tel niveau. Par ailleurs, une majorité d’élèves veulent plus d’EPS dans la semaine : 57,2%. Notons toutefois qu’il existe là aussi un écart entre les filles et les garçons. Si les garçons sont ultra-majoritaires à en demander plus, les filles le sont aussi, mais dans une moindre mesure.
Dans votre enquête, il semble que pour les élèves l’EPS c’est avant tout une articulation de finalités ?
En effet, quand on demande aux élèves ce que l’EPS leur apporte, si une réponse se dégage (61% pour « se défouler/ se dépenser »), les autres reviennent de façon équivalente (autour de 40%). Le premier item traduit la volonté des élèves d’avoir une EPS d’action où l’on se dépense physiquement. Il met au cœur de notre discipline l’étude pratique des apsa. Les autres réponses montrent sans aucun doute une complémentarité : le plaisir d’apprendre de nouvelles APSA (39%), le plaisir de dépasser ses limites (41%), se sentir bien dans ton corps et améliorer ta santé (42%), travailler ensemble en coopération (45%). Autant de motivations qui sont souvent mises en opposition dans les discours là où les premiers usagers les articulent.
Ces résultats devraient nous questionner sur les tendances actuelles de notre discipline, qui, en souhaitant poursuivre des objectifs de santé, réduisent la pratique physique et les études des APSA, alors que santé et culture sont intimement liés.
Il semblerait qu’à l’inverse de certaines propositions ce sont bien les sports collectifs qui sont plébiscités par les élèves ?
Oui, les élèves ont été questionnés sur les activités physiques sportives et artistiques qu’ils préfèrent (4 choix maximum) et ce sont les sports collectifs qui reviennent le plus (pour 52% des élèves). Suivent les APPN (46%), les sports de raquette (42%), les activités de la forme (33%), les sports de combats (26%), les activités aquatiques (23%), les activités gymniques (23%), les activités athlétiques (22%), les activités artistiques (18%), les activités réflexives (9%). Ces résultats ne sont pas un classement des APSA et l’EPS ne doit pas se réaliser en fonction de goûts des élèves car la formation d’un citoyen physiquement et culturellement éduqué passe par un enseignement complet et équilibré. Mais ils permettent d’avoir une image des perceptions des élèves… qui ne sont pas toujours celles mises en avant par l’institution !
Concernant les parents nous dépassons le plébiscite pour carrément tendre vers l’adhésion totale, avec notamment presque 95% qui considèrent l’EPS comme importante voire indispensable. Des priorités sur l’augmentation des horaires et l’amélioration des installations sont aussi mis en avant ?
Quand on demande aux parents ce que qu’ils pensent de l’EPS dans la formation de leur enfant, 55,7% des parents répondent qu’elle est « Essentielle », 39,2% « importante », 3,7% « peu importante », 0,6% « inutile ». Ce sont donc 94,9% des parents qui disent que l’EPS est importante ou essentielle. Les parents mettent en avant l’importance de l’EPS pour leurs enfants, loin des discours de JM Blanquer sur les « fondamentaux » ! Les 3 priorités des parents pour améliorer l’EPS sont les équipements sportifs (79%), la baisse des effectifs par classe (67%) et l’augmentation horaire (60%).
N’avez-vous pas peur que le ministère tombe une nouvelle fois dans les confusions entre EPS et sport et activité physique utilisant vos chiffres au service d’une « ubérisation » des intervenants au sein de l’école et notamment en EPS ?
Ces résultats montrent une attente forte des usagers pour une EPS de qualité. Ils ne souhaitent pas simplement que l’EPS fasse bouger. Au contraire ils sont exigeants sur les apprentissages (équipements, apsa…). Evidemment, les tenants du dogme de « moins de services publics » tenteront d’utiliser la demande sociale qui s’exprime pour apporter une réponse minimaliste, comme ils le font sur tous les secteurs. Pour notre discipline, en renforçant « le sport à l’école », le « bouger 30 minutes », tout en supprimant les moyens pour l’EPS et le sport scolaire, c’est la politique menée par JM Blanquer.
Comme tout au long de son histoire, l’avenir de l’EPS dépendra des rapports de force entre les tenants d’une éducation physique à contenu culturel exigeant, dont nous sommes, et ceux qui ne veulent qu’une Education Physique « de base », ou uniquement «du sport» à l’Ecole. Il reviendra aux enseignants d’EPS, avec les usagers, d’engager les luttes pour le développement de l’EPS de demain qui ne doit être ni « ubérisée » ni « low cost ». Cette enquête est un outil pour aller en ce sens. Elle confirme que les usagers portent « le plus et mieux d’EPS », ce qui doit nous donner confiance pour aller vers les nouveaux progrès pour notre discipline (4 heures pour tous, équipements, formation, recrutements…).
Propos recueillis par Antoine Maurice