Les ouvertures de la Cité scolaire internationale de Marseille et du lycée international de Palaiseau manifestent l’expansion des établissements internationaux préparée par la loi Blanquer. Alors que le ministre pourfend le « séparatisme », il encourage et installe des établissements qui reposent sur le séparatisme social le plus flagrant.
A Marseille, la maquette de la Cité scolaire internationale a été présentée à lapresse , raconte 20 Minutes du 19 février. L’établissement accueillera plus de 2000 élèves de la maternelle à la terminale à la rentrée 2024. Dans une ville et un quartier où des écoles sont très dégradées, 100 millions ont été trouvés en 2018 pour ce projet, partagés à moitié par la région, le département (37%) et la ville (14%). « Tout élève marseillais qui aura le niveau pour entrer dans cette école y entrera », promet le recteur selon 20 Minutes. Une affirmation démentie par « un partenariat avec les makers du territoire » et la déclaration du président de la région : « cette école est un message d’attractivité et de compétitivité que nous adressons aux acteurs économiques ».
A Palaiseau, c’est à la rentrée 2021 que s’ouvre un nouveau lycée international avec 6 classes de seconde. Selon Le Parisien, il vise aussi les enfants des chercheurs et enseignants étrangers qui travaillent sur le plateau de Saclay. Pour cette première ouverture, le rectorat ouvre un secteur de recrutement provisoire limité aux communes riches du plateau qui siphonne les meilleurs élèves aux dépens du lycée Camille Claudel de Palaiseau.
Derrière ces deux ouvertures l’appel d’air de la loi Blanquer qui a créé les établissements publics locaux d’enseignement international (EPLEI). La Cité scolaire de Marseille est un EPLEI. Le lycée international de Palaiseau, comme d’autres d’Ile de France, a vocation à le devenir.
Avec la création des EPLEI, JM BLanquer a fait sauter un tabou. Il a inscrit dans la loi un nouveau système public d’éducation parallèle, de la maternelle à la terminale. C’est le retour des lycées d’avant guerre, qui englobaient des classes enfantines, avec un recrutement qui repose sur la maitrise d’une langue étrangère par les plus petits, critère qui garantit l’exclusion sociale.
Ces établissements ont des modalités de recrutement qui en font des ghettos sociaux. Un rapport de l’inspection générale de septembre 2020 ne le cache pas. Il souligne par exemple que la transformation du lycée H de Balzac de Paris en EPLEI « impliquera une diminution de la mixité sociale » de l’établissement. Un tableau publié dans le rapport montre l’écart très important entre les EPLEI ou futurs EPLEI et leur environnement. Ainsi à l’école de Strasbourg , historiquement le 1er établissement, il y a un écart de 30 points entre l’indice de position sociale de l’école et la moyenne départementale. Lors des débats sur la loi Blanquer , le collège lycée international de l’est parisien a été cité comme un exemple de rééquilibrage à l’est des formations d’élite et d’ouverture sociale. En fait le rapport montre que seulement 35 élèves des 2 établissements viennent d’écoles Rep et 4 d’un quartier politique de la ville. C’est là que l’écart est le plus élevé avec la composition sociale environnante : indice social de 127 pour le collège est parisien et moyenne du département à 90.
Les EPLEI ont commencé à se multiplier. Un EPLEI est créé à Lille, d’autres sont en gestation à La Défense et Lyon. Tous croulent sous la demande. « La mixité sociale est un leurre et un frein » pour les EPLEI, dit sans fard le rapport de l’Inspection. Il invite à ne plus en tenir compte. Le séparatisme social le plus rétrograde ne se cache plus.
F Jarraud