Alors que toute la politique de revalorisation du ministère repose sur des primes, l’analyse de la dernière édition du Bilan social du ministère montre que ce sont surtout elles qui creusent les inégalités entre les genres et entre les corps. Les écarts de rémunération à l’intérieur de l’éducation nationale sont importants. Ils se maintiennent de façon très nette entre les sexes.
Inégalités entre premier et second degré
Le salaire net moyen des salariés de l’Éducation nationale se monte à 2270 € contre 2530 € pour les salariés du privé. Si l’écart avec le privé est à relever, ce chiffre moyen n’a pas grande signification tant les écarts de salaire sont importants entre les différents corps du ministère et aussi entre les genres.
On peut relever l’écart entre premier et second degré. Le salaire net moyen dans le premier degré est de 2310€ contre 2800€ dans le second degré. Le second degré se caractérise par des corps mieux rémunérés (agrégés) et des possibilités de primes importantes.
Car ce sont bien les primes qui sont au cœur des inégalités salariales de l’Éducation nationale. Ainsi les professeurs des écoles ont un salaire net moyen de 2316€ avec un écart de 250€ entre hommes (2517€) et femmes (2276€). En principe les PE devraient gagner autant que les certifiés du second degré. Mais ceux-ci gagnent en moyenne 2624€ avec aussi un écart entre les genres (2774 et 2592€).
Comment expliquer ces différences ? Les primes représentent 9% de la rémunération des PE contre 15% de celle des certifiés. La part des primes est nettement plus importante chez les hommes, professeurs des écoles et certifiés, que chez les femmes. Les femmes effectuent moins d’heures supplémentaires (dans le second degré), moins de missions que les hommes.
L’écart entre professeurs des écoles et certifiés tient aussi à une différence dans l’avancement entre les deux corps. La proportion d’enseignants en classe exceptionnelle et hors classe est très nettement à l’avantage des certifiés.
Inégalités entre les genres
Ces logiques se retrouvent dans les autres corps enseignants avec en plus un pourcentage de femmes nettement moins important. Si le salaire d’un agrégé moyen est de 3509€, la part des primes est de 18% en moyenne. Pour les professeurs de chaire supérieure, un corps nettement masculin, on compte 5633€ avec 34% de primes.
C’est la seule catégorie dont la rémunération flirte avec celle de l’encadrement de l’éducation nationale. Le salaire moyen des personnels de direction est de 4215€ avec un écart de 200€ entre hommes et femmes. Celui des corps d’inspection est de 4318€ avec 150€ d’écart entre les genres. Dans l’encadrement supérieur le salaire moyen est de 6382€ avec près de 300€ d’écart entre les genres.
Les inégalités et la politique de JM Blanquer
Comme le remarque le Bilan social, « Quels que soient le corps et le secteur, les hommes enseignent davantage à temps plein et sont plus avancés dans leur carrière (TIB plus élevé de 3 % à 12 % selon les corps et le secteur). Le niveau et la part des primes sont également plus élevés pour les hommes. Parmi les professeurs des écoles du public, l’écart de primes est de 37 % entre hommes et femmes, en lien avec une relative surreprésentation des hommes dans les directions des écoles et sur des établissements de plus grande taille (la prime de direction étant en partie liée à la taille de l’établissement), et dans les missions de remplacement. Dans le second degré, public comme privé, les hommes perçoivent en moyenne 27 % (dans le public) à 23 % (dans le privé) de primes de plus que les femmes. Cet écart est particulièrement fort parmi les professeurs agrégés et de chaire supérieure (40 % dans le public, 45 % dans le privé). En particulier, les hommes ont une plus grande propension à effectuer des heures supplémentaires, percevant, en moyenne tous corps confondus 47 % (dans le public) à 44 % (dans le privé) de rémunérations pour heures supplémentaires de plus que les femmes. Ils exercent également davantage de fonctions rémunératrices ».
Cette analyse officielle de la Depp, un service ministériel, est à mettre en rapport avec la politique salariale de JM Blanquer. La revalorisation des enseignants qu’il met en place repose entièrement sur des primes et sur l »augmentation du nombre des heures supplémentaires dans le second degré. Alors même que le ministre parle de rééquilibrage entre 1er et 2d degré, elle aura pour effet d’augmenter les inégalités entre eux. Elle aura aussi pour conséquence d’augmenter les écarts entre les sexes dans un ministère qui ne les tolère que trop. A l’éducation nationale, si les femmes sont hyper majoritaires, leur part diminue en fonction directe des emplois les mieux rémunérés.
F Jarraud