Non le bac n’est pas bradé. Avec 91.5% de reçus à l’issue du premier groupe d’épreuves, le bac 2020 enregistre une forte hausse du taux d’admission : +14%. Cette augmentation impressionnante ne préjuge pourtant pas d’une forte augmentation des reçus à l’issue de la session de juin.
90 000 reçus de plus au premier groupe
740 601 candidats sont inscrits aux différents bacs 2020 soit environ 10 000 candidats de moins qu’en 2019, principalement en série professionnelle. Pourtant à l’issue du premier groupe d’épreuves on compte 657 300 admis , soit beaucoup plus que les 561 900 de juin 2019.
Dans toutes les séries, les taux d’admission connaissent une hausse importante. En série générale on compte 94% d’admis soit 15% de plus qu’en 2019. C’est la dernière année où le bac est attribué par série. En L 92% des candidats sont reçus soit 11% de plus. En ES on a 94% de reçus soit 16% de plus et en S 95% soit +15%.
En série technologique on a 89% de reçus (+14%). En STMG la progression est très forte avec 87% de reçus (+16%). En STI2D et STL on compte 91% de reçus, 92% en ST2S et 95% en STHR.
Le bac professionnel atteint 87% de reçus soit 12 points de plus qu’à la session de 2019.
Un bac bradé ?
Est-ce à dire que le bac est bradé et que l’on va connaitre réellement 90 000 bacheliers de plus en 2020 ? Probablement pas. En effet le bac 2020 se passe dans des conditions exceptionnelles puisque totalement en contrôle continu et de façon improvisée.
Cela a deux effets. Le premier c’est qu’il n’y a plus de différence entre les inscrits et les présents. Cela ajoute automatiquement environ 5000 candidats « présents » en plus au résultat final du premier groupe.
Le second effet c’est la très forte chute du nombre de candidats envoyés au second groupe d’épreuves (le rattrapage). Certes on ne compte que 19 700 candidats ajournés contre 57 000 en 2019. Mais il n’y a aussi que 40 900 candidats envoyés au second groupe d’épreuves contre 103 800 en 2019.
Vers des résultats identiques en 2019 et en 2020 ?
Et compte tenu du faible nombre de recalés, de l’harmonisation très généreuse mise en place pour le premier groupe d’épreuves et de l’acceptation des dossiers d’établissements privés hors contrat, on peut penser que les candidats envoyés au second groupe d’épreuves sont des candidats vraiment faibles. Le premier groupe d’épreuves a vraiment fait le plein. Or ces candidats faibles ne vont pas être évalués sur dossier. Ils vont affronter de vrais oraux d’examen. En 2019 sur les 104 000 candidats du second groupe, 75 000 ont eu le bac. Il est probable que sur les 41 000 jeunes envoyés passer les oraux peu, peut-être même très peu, obtiendront des notes suffisantes pour décrocher le diplôme.
En nombre on sera loin des 90 000 bacheliers supplémentaires par rapport à 2019. Il y a eu à l’issue du second groupe d’épreuves 666 000 reçus au bac en juin 2019. Il y en a déjà 657 000 à l’issue du premier groupe. Il n’y en aura au final probablement entre 665 000 et 675 000 soit pas beaucoup plus qu’en 2019.
80% d’une génération a eu le bac en 2019. On montera peut-être un peu au dessus maison sera nettement en dessous du 91.5% annoncé le 7 juillet.
Les vrais problèmes de cette session
Il y a pourtant de vrais problèmes posés par ce bac. Le premier c’est la chute des candidats du bac professionnel. Il y a 24 000 candidats de moins. Ce n’est pas surprenant. La réforme du lycée a brouillé les cartes, à la fois celles des candidats et celles des formations. Les familles ont été poussées à tenter leur chance dans le général ou le technologique. Et la réforme du lycée professionnel va accélérer le mouvement tant elle trompe les jeunes en leur fermant en fait les issues vers le supérieur. C’est grave car le lycée professionnel était une voie de promotion pour des jeunes de familles populaires. Il leur donnait une véritable opportunité de décrocher un bac leur ouvrant ensuite des portes. C’est ce qu’a très bien montré Vincent Troger. Tout ce qui affaiblit le lycée professionnel se fait au détriment de ces familles. Les récentes réformes des lycées et Parcoursup ont nettement aggravé la situation de ces jeunes tout en tenant des discours trompeurs.
Le second problème est plus général encore. C’est la seconde session du bac où les règles d’examen sont faussées et largement floues. Nous vivons un affaiblissement du bac comme véritable examen national servant de repère dans la société. La réforme mise en place pousse aussi dans cette direction avec davantage de contrôle continu et une large autonomie locale dans l’organisation d’une partie importante des épreuves. Tout cela affaiblit le bac. Quand on affaiblit l’examen on justifie le recours à d’autres formalités de tri. En clair on justifie Parcoursup et ses affectations selon l’établissement d’origine des élèves comme cela a pu être démontré.
Pour compenser ces évolutions, qui tapent toutes sur les plus faibles socialement, il est urgent d’appliquer la décision de justice qui oblige à communiquer les algorithmes locaux de Parcoursup. Et de maintenir au maximum la forme d’examen national au bac. Une troisième session relachée serait fatale à l’examen.
François Jarraud