» Depuis quelques années, les ventes des manuels scolaires s’effondrent en France comme à l’étranger…. A l’inverse, la production de stories sur Instagram a été multipliée par 5 en seulement 2 ans et demi. Le nombre de stories publiées au mois de janvier 2019 a dépassé les 500 millions et l’application a désormais détrôné Snapchat auprès des adolescents ». Fort de cette réalité, Mickaël Bertrand, professeur d’histoire géographie au lycée de Semur en Auxois (Côte d’Or) réalise des stories interactives d’histoire géographie sur Instagram. Son projet sera présenté au 11ème Forum des enseignants innovants à Paris le 23 novembre.
Une galaxie numérique en histoire-géo
Mickaël Bertrand aurait pu s’en tenir à son site, Historicophiles, d’une extraordinaire richesse. Développé au fil des années et totalement intégré à ses cours, Historicophiles propose des cours complets, des activités préparatoires aux chapitres du programme, et des modules de révision. Cerise Historicophiles propose aussi des analyses sur l’actualité. « Comme professeur d’histoire-géo, je suis persuadé que cela permet de monter que ces disciplines permettent de mieux comprendre le monde. Souvent les élèves ont des questions mais en classe on n’a pas forcément le temps d’y répondre si c’est hors programme ».
A ce site Historicophiles, Mickaël Bertrand ajoute maintenant un compte Twitter et des comptes sur Instagram et Snapchat. Ces deux applications appartiennent au continent numérique des adolescents et sont très peu explorés par les adultes.
Guidé par les élèves
« On ne dit pas à quel point les élèves nous inspirent et sont source d’énergie », nous dit M Bertrand. « Ce sont les élèves qui sont venus me chercher pour aller sur Instagram. J’étais réticent. Ils m’ont montré ce qu’ils font. Et je me suis rendu compte que les stories sur Instagram pouvaient faire d’excellentes ressources scolaires. Après plusieurs semaines d’observation, j’ai commencé à saisir l’opportunité de créer de nouvelles ressources pédagogiques à l’aide de cet outil. J’ai notamment été inspiré par des productions particulièrement abouties proposées par des médias tels que Le Monde, Libération ou encore The Economist. Au mois de mai/juin 2019, j’ai commencé à créer mes premières stories dans le cadre des révisions du baccalauréat 2019. L’engouement des élèves m’a conduit à poursuivre la réflexion en approfondissant la recherche sur des éléments de théorie autour de la mise en récit au service de l’éducation. «
De nouvelles ressources pédagogiques adaptées aux pratiques des élèves
« Le principal objectif de ce projet est de proposer de nouveaux ressources pédagogiques susceptibles de susciter l’engagement et la motivation des élèves », poursuit M Bertrand. « Les derniers rapports PISA de l’OCDE publiés en 2015 et 2019 montrent en effet un lien positif significatif entre motivation et performance. Le second objectif vise à développer des ressources qui reposent sur l’apprentissage expérientiel. Les recherches menées dans ce domaine témoignent d’une meilleure efficacité des ressources pédagogiques interactives en compréhension et en mémorisation par rapport aux manuels scolaires et aux vidéos. Par ailleurs, l’utilisation d’un réseau social tel qu’Instagram avec les élèves s’inscrit dans le cadre de l’éducation aux médias et à l’information. L’objectif est non seulement de montrer aux élèves qu’ils doivent comprendre la logique de ces outils pour développer leur esprit critique et éviter d’être manipulés, mais aussi qu’ils peuvent utiliser ces outils pour apprendre ».
» La mise en récit génère un sentiment d’adhésion, permettant ainsi à l’élève d’évoluer dans une situation d’apprentissage rassurante et donc de progresser selon la logique de zone proximale de développement proposée par Lev Vygotski. Les stories d’Instagram constituent une solution rapide et efficace pour mettre en œuvre un récit au service de l’éducation. Elles permettent en effet à l’enseignant de proposer une mise en récit mobilisant à la fois des images, du texte, du son, de la vidéo mais aussi des activités interactives qui renforcent l’engagement des élèves et contribuent à faire émerger un sentiment d’appartenance à une communauté apprenante ».
Des activités pédagogiques et des récits
» Les stories d’Instagram constituent en revanche une solution rapide et efficace pouvant être mobilisées au service de l’éducation. Elles permettent à l’enseignant de proposer aux élèves une mise en récit mobilisant à la fois des images, du texte, du son et de la vidéo sans compétence technique particulière. A l’inverse, l’enseignant peut intégrer dans ses stories des activités interactives qui renforcent l’engagement des élèves et contribuent à faire émerger un sentiment d’appartenance à une communauté apprenante », estime M Bertrand.
Par exemple il propose sur le thème des migrations le récit de trois jeunes filles, une sénégalaise, une égyptienne et une sud-africaine pour montrer la variété de l’Afrique. On suit ces trois jeunes filles dans trois parcours interactifs et cela donne aux élèves des informations sur les conflits en Afrique. »Je mets les connaissances en action dans ces récits avec de nombreux documents », dit M Bertrand.
François Jarraud