« Il est important que les élèves sachent que l’école apporte quelque chose à la construction de soi ». Avec 4 collègues d’autres disciplines, Patricia Labarde a mené un projet interdisciplinaire sur le thème du jardin. Un projet où la géographie a épousé les maths, le français ou les SVT, mais aussi la pelle et le rateau pour cultiver son jardin. Une autre façon d’enseigner en travaillant la relation avec les élèves. Mais aussi la découverte par les élèves des engagements des enseignants et de leurs responsabilités citoyennes.
Un projet pluridisciplinaire
A Gonesse (95), le lycée René Cassin est un grand établissement de 1500 élèves issus plutôt de milieu défavorisé. C’est aussi un établissement où les enseignants travaillent en équipe soudée. « On s’entend bien entre collègues avec un même centre d’intéret pour le développement durable », explique Patricia Labarde, professeure d’histoire-géographie. Cela s’est traduit en 2016-17 par l’implantation de ruches dans le lycée et un premier travail interdisciplinaire. En 2017-18, en première S, c’est tout naturellement qu’est arrivé le thème de la biodiversité avec comme illustration celui des jardins. Un thème qui est « un prétexte pour faire travailler les élèves dans différentes disciplines » mais qui reflète aussi les engagements des enseignants.
De la géographie citoyenne
« L’intention c’était de les sensibiliser aux jardins comme porteurs de biodiversité », explique P Labarde. « Même dans notre milieu urbain, il reste différentes sortes de jardin et la municipalité a le souci de défendre la biodiversité comme les élèves l’ont découvert en rencontrant le directeur des espaces verts de la commune. A Gonesse on arrêté d’utiliser des pesticides dès 2015 ».
Ce thème des jardins, les élèves l’ont décliné en français, maths, SVT et géographie. Ils ont utilisé geoportail pour classer les types de jardin, calculer leur importance relative et établir des cartes des différents quartiers de la ville. Ils ont changé d’échelle et analysé la politique régionale des « couloirs » bleus et verts. En groupe ils ont réalisé des présentations qu’ils ont présenté oralement sur des sujets comme « les jardins mythologiques », « les cité jardins », « les jardins extraordinaires » ou « le jardin d’Eden ». « Le thème les a ouvert à d’autres disciplines », observe P Labarde.
La géographie y trouve sa part. « Je leur ai fait utiliser Geoportail et fabriquer des cartes de qualité professionnelle. Ils ont aussi travaillé l’expression orale », note P Labarde. « Ils ont pris conscience qu’ils peuvent quelque chose à leur niveau de citoyen. Ils ont découvert le fonctionnement de la commune et ses objectifs. Ils n’imaginaient même pas qu’il pouvait y avoir une direction des espaces verts ! »
Un projet pour s’épanouir
Le projet a aussi fait grandir les élèves. « Ils se sont rendus compte des relations entre enseignants, de notre connivence et c’est important pour la confiance », explique P Labarde. « Ils ont vu aussi notre investissement en dehors des cours dans ce projet. Et puis on a vécu des moments ensemble. Il y a eu aussi des moments de connivence entre profs et élèves. Par exemple quand on a créé pour de vrai un jardin dans le lycée, bêche à la main. Du coup on a eu beaucoup moins de conflits et le climat de classe est devenu plus agréable ». Ce travail pas noté a été mené avec sérieux et en même temps a été un espace de liberté.
« Nous les enseignants on a pris du plaisir à travailler comme cela », explique P Labarde. « Eux ils ont développé des compétences nouvelles. Par exemple avec le concours de nouvelles, conduit en français. Ou en travaillant la perspective en maths. Ils ont développé leur personnalité. Dans quelques années, ils ne se souviendront plus du programme de géographie de 1ère. Mais ils se souviendront que l’école a apporté quelque chose à leur construction personnelle ».
Propos recueillis par François Jarraud