Comment réduire les inégalités d’accès aux savoirs scientifiques ? L’Université d’Oxford publie une étude qui pointe trois facteurs essentiels pour gommer l’écart social de réussite et améliorer le niveau des élèves des milieux populaires : enseigner le raisonnement scientifique, améliorer la littératie et enfin améliorer les compétences métacognitives. Trois conclusions qui s’appuient sur un volume important de recherches et qui invitent à enseigner autrement.
Un écart important de réussite selon l’origine sociale
L’étude de Terezinha Nunes, Peter Bryant, Steve Strand, Judith Hillier, Rossana Barros and Jaimie Miller-Friedmann, University of Oxford, a été réalisée pour Education Endowment Foundation, une ONG britannique qui veut réduire les inégalités sociales à l’école. Elle est une première étape d’une étude plus globale sur l’enseignement des sciences qui sera publiée en 2018.
Cette étude s’appuie sur la dernière livraison de Pisa, dont le thème central était l’enseignement des sciences. Mais elle utilise aussi les données de l’ Avon Longitudinal Study of Parents & Children (ALSPAC), une étude portant sur près de 15 000 familles britanniques.
Le lien entre le milieu social d’origine et le niveau en sciences est bien établi. Là l’étude utilise les données de l’UK National Pupil Database pour montrer que les enfants des milieux populaires performent moins bien en sciences que les enfants des milieux socialement privilégiés. Cela commence dès la maternelle et l’écart avec ces enfants se creuse nettement entre 5 et 7 ans puis entre 11 et 16 ans. Les résultats peuvent être facilement suivis au Royaume Uni grâce au système du Free Meal, les élèves défavorisés bénéficiant du repas gratuit. A vrai dire cette situation ne concerne pas que les sciences. C’est le cas également en anglais ou en maths, signe que le problème est global.
Enfin le Royaume Uni n’est pas le champion des inégalités sociales de résultats. Celles ci se sont fortement réduites entre Pisa 2006 et 2015, relève l’étude.
La nécessité d’apprendre le raisonnement scientifique
Les données montrent aussi que ce n’est pas qu’un problème propre aux élèves. Les enfants des milieux populaires ont de meilleurs résultats quand ils sont scolarisés dans une école ayant un recrutement social plus élevé. Une réalité qui plaide pour la mixité sociale. Et qui montre qu’il fait tenir compte des inégalités entre établissements.
Mais le grand apport de cette étude c’est d’avoir cherché à aller au-delà de ces facteurs pour dégager, à travers des travaux de recherche et les données ALSPAC, des facteurs fortement corrélés à l’amélioration des résultats.
Le premier facteur que fait apparaitre l’étude c’est l’apprentissage du raisonnement scientifique. ALSPAC montre qu’une donnée sur le raisonnement scientifique est prédictrice du niveau en sciences et de la réduction de l’écart social de réussite en sciences.
Un lien fort entre sciences et littératie
Le second facteur mis en évidence est la littératie. Il y a un lien fort entre le milieu social et la littératie. ALSPAC là aussi montre que la compréhension en lecture est un bon prédicteur du niveau en sciences. Selon l’étude un bon niveau dans ces deux compétences annule l’impact du milieu social d’origine.
Il n’y a pas que le CP
L’étude pointe un troisième élément : la métacognition, cette compétence à réflechir sur son apprentissage. Un entrainement sur ce point a aussi un effet sur le niveau en sciences.
Le dernier apport de l’étude c’est de mettre en garde sur les interventions précoces. Les données montrent que l’écart entre enfants défavorisés et favorisés se creuse entre 5 et 7 ans et 11 et 16 ans. Il faut donc travailler les compétences identifiés à ces deux moments et pas seulement au primaire. Il y a une vie après le CP…
François Jarraud
Ce que pisa nous apprend pour améliorer l’enseignement des sciences