Circulaire de rentrée ou testament ? C’est un texte peu ordinaire que publie le BO du 9 mars sous l’appellation de « circulaire de rentrée ». D’habitude ce genre de texte égrène les décisions qui vont s’appliquer à la rentrée prochaine. La circulaire 2017 est largement rétrospective et reprend l’action gouvernementale depuis 2012. Elle va même jusqu’à recommander de continuer ceci ou d’achever cela. Dans ce dernier texte important, la ministre a réuni les grandes orientations du quinquennat. Pour un adieu.
Ils sont venus , ils sont tous là.
Exceptionnellement, le 9 mars, tout le staff ministériel s’est déplacé pour assister au dernier grand geste ministériel de N Vallaud Belkacem. La ministre participe à cette cérémonie en présentant sa circulaire de rentrée comme un véritable testament légué à ses successeurs.
« Je n’ignore rien des échéances »,dit-elle. « Un ou une futur ministre pourrait amender la circulaire. Mais je voulais rappeler le sens et les objectifs de ce ministère. Je veux faire un voeu pour la rentrée.. L’institution scolaire a besoin qu’on lui laisse du temps. Je fais le voeu que l’effort initié par la refondation soit poursuivi ». Et le texte de la circulaire commence lui aussi par le rappel des réalisations et des orientations du quinquennat qui se termine.
Une formation en maths pour les enseignants du primaire
Concernant le primaire, la circulaire invite à maintenir la priorité. Elle devrait être entendue car cette idée se retrouve chez tous les candidats à l’élection présidentielle.
Les points les plus neufs concernent la formation des maitres. Après la publication des résultats désastreux de TIMMS, le ministère lance une campagne de formation en maths. « Le plan de revitalisation de la formation dans le premier degré initié à la rentrée scolaire 2016 est marqué en 2017-2018 par la priorité accordée à la formation des professeurs des écoles en mathématiques. Un premier volet s’adresse aux professeurs en charge des classes de CM1 et CM2. Il est organisé selon une logique d’action-formation combinant des temps de regroupement et des temps in situ au sein de la classe et de l’école. Pour ces enseignants, il représente la moitié des 18 heures inscrites à l’Obligation réglementaire de service (ORS) au titre des animations pédagogiques et formations. Un second volet s’adresse à l’ensemble des enseignants du premier degré et s’appuie sur la publication sur M@gistère d’une nouvelle collection « Focus : savoirs et démarches pour enseigner dans le premier degré ». Construite comme un ensemble de modules d’auto-formation très courts, cette collection doit permettre de répondre aux besoins des enseignants. »
On notera aussi la mention des Rased : » L’action des Réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED) sera donc soutenue par un pilotage renforcé de ces réseaux ». La ministre confirme qu’il y aura un maitre surnuméraire (maitre +) dans chaque école de l’éducation prioritaire à la rentrée 2017. Evidemment cela ne veut pas dire qu’il sera à temps plein dans chaque école, même s’il y aura 5161 maitres + pour 4353 écoles en rep. La circulaire mentionne les APC et rappelle l’obligation du lien avec le collège.
Au collège, « des remontées positives »
Le collège est évidemment un point important de la circulaire. La circulaire rappelle que la dotation horaire par division est augmentée de 3 heures en 2017 : » L’octroi d’une dotation horaire supplémentaire de trois heures à la rentrée scolaire 2017 permet de répondre efficacement aux besoins de chaque établissement et favorise la diversification des modalités d’enseignement. »
La circulaire insiste sur la nouvelle culture de l’évaluation qui doit être mise en oeuvre « pour éviter une notation sanction à faible valeur pédagogique ». Il s’agit de privilégier une évaluation positive. Le nouveau livret scolaire unique (LSU) doit y aider et la circulaire invite à le tenir avec soin.
La ministre nous a dit avoir « des remontées assez positives » de la mise en place de la réforme du collège. « On est loin du chaos annoncé ». « Sur l’accompagnement personnalisé ce qui remonte est très positif », dit-elle. « Prendre en 6ème 3 heures hebdomadaires pour expliquer le travail personnel, les devoirs, la prise de notes, c’est très positif. Les EPI font l’objet d’un travail intensif dans les établissements ». Quant au travail en équipe nécessité par les EPI il permet de « repenser sa façon de faire » et « les projets menés par els élèves donnent du sens aux apprentissages ». La ministre conclue : c’est pourquoi il serait dommage de remettre en cause tout cela ».
Conservation étendue des notes du bac
On trouvera peu de mentions du lycée. La principale mesure appliquée à la rentrée est la conservation des notes au bac en cas de changement de série dans les voies générale e technologique et encas de changement de spécialité dans la voie professionnelle. La mesure est présentée comme devant faciliter le maintien en formation des élèves. Mais elle pourrait poser problème tant les écarts de niveau peuvent être forts entre séries.
La circulaire évoque aussi de nouveaux aménagements de programme en sciences et informatique. « L’offre de formation proposée aux élèves dans les lycées généraux et technologiques évolue pour accorder toute leur place au numérique et à des contenus d’enseignement renouvelés en mathématiques et en physique-chimie. Dans la lignée de l’enseignement de spécialité d’Informatique et sciences du numérique (ISN) déjà proposé en classe terminale de la série S, un enseignement facultatif d’Informatique et création numérique (ICN) a été introduit en classe de seconde générale et technologique comme enseignement d’exploration. Conjointement, un enseignement facultatif de deux heures hebdomadaires en classe de première générale (S, ES et L) est proposé. Il est étendu en classe terminale des séries ES et L à la rentrée 2017. Ainsi, les élèves de la voie générale qui le souhaitent peuvent désormais suivre un parcours numérique continu de la classe de seconde à la classe terminale ».
La circulaire précise aussi que « l’effort accompli pour favoriser le maintien en formation des élèves ayant échoué aux examens des voies générale, technologique et professionnelle (baccalauréat, BT, BTS, CAP) est prolongé. Les élèves sont autorisés à préparer les examens à nouveau dans l’établissement dans lequel ils étaient précédemment scolarisés. À la rentrée scolaire 2017, l’objectif est d’augmenter significativement le nombre de lycéens qui tentent à nouveau leur chance après avoir été ajournés au baccalauréat ». Mais elle sera plus difficile à appliquer car à la rentrée 2017 on attend 30 000 élèves en plus en terminale….
S’agissant des bacheliers professionnels, la circulaire rappelle qu’à « compter de la rentrée scolaire 2017 débute pour une durée de trois ans l’expérimentation visant à admettre de droit tous les élèves de baccalauréat professionnel en Sections de technicien supérieur (STS) » sur décision du conseil de classe de terminale.
Renforcement du pilotage en éducation prioritaire
La circulaire s’attache aussi à l’éducation prioritaire. La circulaire affirme vouloir renforcer le pilotage. « Le référentiel de l’éducation prioritaire fournit des repères fiables aux équipes pour permettre de conforter et développer les orientations pédagogiques les plus efficaces.. Une circulaire spécifique renforcera les exigences attendues des différents niveaux de pilotage afin d’impulser et de soutenir plus fortement les évolutions pédagogiques souhaitées au sein des classes et des réseaux ». Pour la ministre, la nouvelle politique d’éducation prioritaire donne des fruits. Elle cite des augmentations du taux de réussite au brevet.
Elle rappelle aussi les aides aux familles :les bourses pour les collégiens seront réévaluées de 25% à la rentrée , les fonds sociaux des lycées passeront à 65 millions. 450 postes seront attribués aux lycées « fragiles » : » Les autorités académiques allouent ces moyens supplémentaires aux établissements les plus en difficulté, selon des critères qu’elles définissent, comme les caractéristiques socio-économiques ou la part des élèves qu’ils scolarisent provenant de collèges en Rep+ et Rep. »
La politique de mixité sociale et territoriale sera poursuivie : » En 2017-2018, cet engagement s’amplifie et près de la moitié des départements français seront concernés par plus de 80 projets similaires ».
Remplacements : pas de contrainte
Pour les enseignants, la circulaire rappelle les mesures de revalorisation prises en 2017 suite aux accords PPCR.
Reste la question des remplacements. On sait que la Cour des comptes vient d’interpeller publiquement le ministère sur ce point en publiant un référé. La circulaire s’applique aux remplacements du 1er degré. « Un décret permettra d’établir un cadre juridique clair et sécurisé du remplacement dans le premier degré pour décloisonner la gestion et améliorer l’efficacité du remplacement en réaffirmant que l’ensemble des remplaçants sont affectés dans des zones pour répondre à l’ensemble des besoins de remplacement et à la formation continue… et qu’un remplaçant a vocation à remplacer tout service (toute école, tout poste, toute durée) dans l’intérêt du service et des élèves. Les zones de remplacement comportent plusieurs zones infra-départementales et, le cas échéant, une zone départementale ».
Interrogée par le Café pédagogique, la ministre a expliqué qu’il n’y aurait plus de distinction entre les brigades de remplacements de courte et de longue durée ce qui permettra d’augmenter le vivier de remplaçants.
Dans le second degré, le décret Robien était tombé en désuétude « à cause de sa façon d’imposer » les remplacements. « Le nouveau dispositif reposera sur le volontariat », précise la ministre. Elle compte sur la rémunération en heures supplémentaires pour trouver des volontaires. Par contre le ministère améliorera le décompte des remplacements de façon à observer les écarts entre académies et veillera à ce que les formations aient lieu hors temps scolaire. Un décret et une circulaire devraient être publiées très prochainement.
François Jarraud