Rappelons nous la petite phrase du premier ministre : » Expliquer, c’est déjà vouloir un peu excuser ». Béatrice Mabilon-Bonfils a-t-elle trop voulu expliquer ? Toujours est-il que le 23 mars les services du premier ministre ont interrompu de façon brutale la captation d’une conférence qu’elle donnait dans le cadre de la Semaine de lutte contre le racisme et l’antisémitisme à l’université de Metz. Et que les services de M. Valls assument…
Deux livres qui font débat
Sous le titre « Fatima moins bien notée que Marianne », son intervention rendait compte du livre qu’elle a écrit, sous le même titre, avec François Durpaire et dont le Café pédagogique a redu compte. L’ouvrage montre qu’il y a » une islamophobie dans l’école qui est aussi de et par l’école ». Selon l’ouvrage l’Ecole joue au détriment des élèves musulmans. Une situation qui a aussi été mise en évidence par l’Ocde et l’Ined et par d’autres sociologues.
Mais Béatrice Mabilon-Bonfils est aussi co-auteure, avec Geneviève Zoïa, d’un autre livre sur la laïcité « à la française ». Dans cet ouvrage elle défend l’idée que « la laïcité aujourd’hui c’est la peur de l’Autre » et que la conception française de la laïcité nuit à l’intégration. Ces deux positions critiques alimentent le débat sur l’intégration, le racisme et la laïcité. Et c’est pour cette raison que l’Université de Lorraine avait invité B Mabilon-Bonfils dans le cadre de la Semaine de lutte contre le racisme et l’antisémitisme.
La Dilcra assume
Le 23 mars, une agence de communication diligentée par la DILCRA (Délégation Interministérielle à la Lutte Contre le Racisme et l’Antisémitisme), un service dépendant du premier ministre, entreprend de capter en vidéo et de twitter l’intervention de B Mabilon-Bonfils. Elle interrompt la capture au milieu de l’événement sur ordre de la Dilcra. Les tweets auraient été effacés.
Interrogée par le Café pédagogique, la Dilcra ne nie pas les faits. » Le prestataire chargé de couvrir l’événement s’est trompé. Nous voulions qu’il couvre le forum contre le racisme et pas cette table ronde consacrée à la laïcité, thème qui n’est pas directement lié à la Semaine ni aux prérogatives de la DILCRA », nous a dit la Dilcra.
L’islamophobie exclue du débat sur le racisme ?
Pour Pascal Tisserant, chargé de mission à l’égalité de l’université de Lorraine , et à ce titre organisateur de la soirée, ces arguments ne sont pas acceptables. « On est dans le cadre de la Semaine de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, il y a donc bien une dimension religieuse à la Semaine et le débat sur la laïcité y a sa place », nous a-t-il dit. « La Dilcra avait inscrit l’événement dans son agenda avec le titre explicite » Fatima moins bien notée que Marianne ». La Dilcra savait très bien pourquoi elle envoyait une équipe pour capter l’événement ».
Pour Béatrice Mabilon-Bonfils il n’y a aucun doute. Ce sont ses idées qui ont été censurées par les services du premier ministre.
François Jarraud