« Ne sous estimons pas ce phénomène qui est un des défis majeurs auxquels l’École est confrontée ». Le 9 novembre, en inaugurant la journée d’étude « Réagir face aux théories du complot », Najat Vallaud Belkacem marque sa détermination à lutter contre le complotisme. Mais les annonces ministérielles sont limitées.
Un danger pour l’école
« Internet a révélé ces derniers jours un complot contre l’accent circonflexe. Un complot que je prépare depuis mes 13 ans, patiemment. On ne pourra pas m’accuser de l’avoir décidé dans la précipitation. Nous sommes en 1990, je suis en 5ème, et j’ai sans peine réussi à convaincre l’Académie Française de me prêter main forte pour conduire à bien ce projet inavouable. » N Vallaud-Belkacem ne manque pas d’humour pour évoquer les théories du complot.
Mais c’est un discours empreint de gravité qu’elle tient sur ce sujet. « Le conspirationnisme s’invite dans les salles de classe. Les enseignements sont contestés », explique-t-elle. « C’est un sujet d’une extrême gravité. C’est un réel danger ».
Enseignements spécifiques ….
Mais comment faire pour lutter contre un mouvement qui traverse toute la société ? Pour la ministre cela passe par des enseignements spécifique. « On explique rarement comment se fabriquent les savoirs. Les connaissances. Quels sont les enjeux et les règles qui les régissent. Voilà pourquoi j’ai tenu à ce que deux enseignements soient mis en place : l’Enseignement Moral et Civique et l’Éducation aux Médias et à l’Information ». Et la ministre de rendre hommage à » nos professeurs documentalistes qui sont les véritables maîtres d’oeuvre de l’acquisition par tous les élèves d’une culture de l’information et des médias ».
Pour cette journée, le ministère avait convoqué des enseignants qui se sont investis dans des projets pédagogiques de déconstruction du complotisme. Ainsi Ronan Cherel, un professeur d’histoire géographie de Rennes qui met ses élèves en situation de journaliste. Il rejoint une recommandation ministérielle : « j’ai voulu que l’EMI s’appuie aussi sur des projets, sur la création de médias : radios, journaux, plateformes web, tenus par les collégiens, et les lycéens eux-mêmes, à la fois dans le temps scolaire et en dehors et dont le nombre a été quasi doublé en un an. En faisant, on comprend la fabrique des images, des vidéos, et de l’information. »
Engagement dans toutes les disciplines ?
Sophie Mazet, une enseignante d’anglais a développé un cours d’autodéfense intellectuelle pour donner des armes à ses élèves : par exemple l’analyse de la rhétorique des complotistes. Marie Rose Farinella, une professeure des écoles, a développé des jeux de rôle avec ses écoliers.
Lionel Vighier , professeur de lettres, fait lui aussi travailler les élèves sur la rhétorique des complotistes et invite les élèves à produire ces théories pour en comprendre le phénomène.
Des annonces limitées
Au delà de ces exemples, comment former tous les enseignants au débat face à ces théories ? La ministre avait deux annonces. D’une part la production de ressources pédagogiques « dans quelques mois ». Parmi elles une formation à distance via M@gistère. D’autre part le ministère lance un appel à projet « pour que les équipes puissent nous faire remonter ce qu’ils ont mis en place dans leur école, collège ou lycée ». Un ensemble assez modeste pour un « défi majeur ».
François Jarraud