Comment rendre acteurs de leurs propres apprentissages des élèves qui présentent des troubles spécifiques du langage, tels que la dyslexie, la dyspraxie, ou encore la dysphasie ? Enseignante à l’EREA (Etablissement régional d’enseignement adapté) Jean Isoard de Montgeron, Laura Navarro les amène à s’emparer d’un projet de web-radio pour s’exprimer, échanger et progresser. Leur projet est présenté au 8ème Forum des enseignants innovants le 4 décembre.
Comment vous est venue l’idée de proposer à vos élèves de prendre l’antenne ?
J’ai toujours été attirée par le numérique et depuis mon arrivée à l’EREA je suis à la recherche d’adaptations et de projets qui permettent de travailler collectivement. Ce qui m’a poussé à proposer à mes élèves de prendre l’antenne c’est d’une part leurs difficultés importantes à l’écrit et d’autre part leur manque de motivation dans ma matière. Pour « m’assurer que ce projet était viable », nous avons commencé avec un micro d’occasion à 2€ ! Le son était très mauvais, mais peu importe je me suis aperçue que les élèves avaient des choses très intéressantes à dire, c’est ainsi que j’ai investi dans un matériel plus couteux.
La web-radio a permis de fédérer des classes « assez dissipées » autour d’un projet commun: une émission. Chaque élève trouve sa place: ingénieur en charge de la table de mixage, ingénieur en charge de l’enregistrement, rédacteur, animateur…Les élèves sont acteurs de leur enseignement.
Qui participe à ce projet ?
Toutes les classes du collège participent à un moment ou à un autre au projet.
Vous avez fait le choix de donner une dimension franco-espagnole à cette expérience. Pour quelles raisons ?
A la base mon objectif était de travailler l’expression orale en cours d’espagnol, de conserver une copie de l’enregistrement afin de valoriser le travail de l’élève et pouvoir mesurer sa progression. Les élèves étaient tellement demandeurs que j’ai proposé cet atelier à 15h30 sur mon temps libre. Ce qu’ils voulaient c’était surtout parler et enregistrer. De fait, afin de gagner du temps sur le temps de recherche et préparation, le contenu culturel des séquences d’espagnol servaient de matière à l’enregistrement de l’émission. Ce système a vite porté ses fruits car les élèves ont gagné en mémorisation grâce à ces reformulations et lorsqu’ils revenaient en cours d’espagnol après avoir écouté l’émission plusieurs fois seul ou avec leur famille, les élèves étaient à 100% dans le thème en classe et participaient plus en espagnol !
Dans ce projet, quel est votre rôle et celui de vos élèves ?
Je coordonne l’émission, au début je m’occupais du montage mais après un an de web radio les élèves sont devenus autonomes, je m’efface de plus en plus, à tel point que lors de certaines émissions je « n’existe plus »: les élèves prennent l’ordinateur et rédigent ensemble, ils gèrent la table de mixage, l’enregistrement et désormais un élève effectue le montage !!!
Si l’on doit terminer sur un exemple concret, lequel nous proposez-vous et pourquoi ?
Un exemple concret est l’émission n°1 en espagnol sur le thème de Salvador Dali. les élèves ont pu réaliser des photomontages qui étaient un prétexte pour enregistrer une émission qui présenterait leur exposition et leurs oeuvres. La web-radio permet de valoriser les productions orales mais aussi artistiques puisqu’on peut aussi poster des images/photos sur le blog public. Les compétences et la motivation des élèves nous poussent cette année à évoluer et proposer en parallèle une webTV. De plus, l’atelier web-radio est ouvert à tout l’EREA: collège + lycée afin d’en faire un lieu d’échanges et de parole.
Propos recueillis par Stéphanie Fizailne