Alors que le ministère promet la création de 4 000 postes d’enseignants dans les collèges en deux ans du fait de la réforme du collège, ses services déconcentrés semblent préparer des suppressions de postes dans le privé. C’est ce que donne à penser une lettre envoyée par le recteur de Nantes aux principaux du privé. Une situation qui alarme le premier syndicat du privé, la Fep-Cfdt, jusque là favorable à la réforme. L’entourage ministériel assure de son coté que les emplois seront maintenus.
A la différence du public, quand un établissement du privé sous contrat perd des heures les enseignants en contrat définitif peuvent perdre leur emploi. D’où l’obligation de se reconvertir d’une année sur l’autre d’une discipline à l’autre, en espérant qu’il y ait des postes disponibles dans cette nouvelle discipline.
Reconversions forcées à Nantes
C’est ce que prépare le rectorat de Nantes. Dans une lettre adressée le 5 novembre aux chefs d’établissement du privé, le recteur de l’académie les invite à se préparer à ces reconversions suite à la suppression d’heures d’enseignement.
« La rentrée 2016 sera marquée par la mise en oeuvre de la réforme des collèges. Si cette nouvelle organisation pédagogique avait pour conséquence de générer des pertes horaires ou de contrat dans certaines disciplines, je souhaite que vous examiniez avec les enseignants concernés leur situation afin d’anticiper ces changements ».
Le recteur donne comme date ultime pour déclarer les changements de discipline le 8 janvier. Autrement dit les enseignants concernés ont 2 mois pour choisir une discipline de reconversion, accepter une formation… et ne pas se tromper dans le choix s’ils veulent éviter Pole Emploi.
Inquiétudes syndicales
Le recteur de Nantes anticipe, dans l’intérêt des enseignants, les retombées de la réforme. Le statut des enseignants du privé oblige à ce calendrier serré. Mais on reste frappé par la double communication de l’Education nationale. Elle se prolonge au rectorat de Nantes. Contacté par le Café pédagogique, il affirme que « conformément aux engagements de madame la Ministre, à effectifs constants les moyens sont au moins maintenus à la rentrée 2016 dans les collèges publics et privés sous contrat de l’académie de Nantes ». Ce qui semble en totale contradiction avec la lettre du 5 novembre…
Contacté par le Café pédagogique, Christian Douge, secrétaire national au second degré de la Fep Cfdt, estime que « le recteur avalise le fait que la réforme du collège va entrainer des pertes d’emplois ». La Fep Cfdt a essayé d’obtenir du ministère des engagements sur le maintien des emplois qu’elle n’a pas obtenus. « On a eu des assurances verbales, mais c’était juste des mots », nous dit-il.
Quatre disciplines touchées
Selon la Fep Cfdt, les pertes d’emploi pourraient concerner la technologie (où il y a perte d’heures en 6ème et 3ème), les langues anciennes, l’allemand et les langues régionales. « Dans les Pays de la Loire, les professeurs, particulièrement en allemand, ont le couteau sous la gorge », nous dit-il. « On est dubitatif sur les moyens réels dans les établissements à la rentrée ». Le phénomène est amplifié dans certains établissements par des politiques locales d’ouverture de classes non couvertes par des moyens.
Interrogé, l’entourage ministériel se veut rassurant. « La ministre a affirmé elle-même devant les recteurs et les inspecteurs qu’il n’y aurait pas de baisse des dotations des collèges sauf baisse du nombre d’élèves ». Il confirme l’augmentation des moyens. Tout au plus reconnait-il « une rédaction maladroite de la lettre rectorale » qui fait allusion à la réforme du collège.
Depuis des mois les opposants à la réforme la lisent comme une tentative d’économiser des moyens. La lettre du recteur de Nantes n’est pas là pour les rassurer.
François Jarraud