J’ai cette année une classe de cycle III un peu difficile dans un quartier de Paris lui-même difficile. A côté d’un groupe de CM2 plutôt partant et dynamique, la plupart des élèves de CM1 ne rentrent vraiment pas dans une dynamique d’apprentissage. Ils sont soit dans une passivité que je trouve inquiétante, soit dans une réactivité que je trouve gênante, et rien – sauf quand je leur lis une histoire – ne semble les intéresser.
Je pourrais choisir l’option de l’autoritarisme, qui « fonctionnera », j’en suis sûr : activités imposées de façon plus ferme, silence imposé sous peine de sanctions, etc.….
Mais, même si cela « fonctionnait », est-ce que pour autant ces élèves progresseraient et apprendraient pour de vrai. Ils feraient ce qu’on leur dit de faire, car ils n’ont pas le choix. Mais, comme dirait Célestin Freinet, « ne vous obstinez pas dans l’erreur d’une pédagogie du cheval qui n’a pas soif ».
J’aimerais donc plutôt chercher ce qui pourrait leur donner soif, ce qui pourrait les amener en conquête d’apprentissage.
Alors, avec Daniel G, nous nous sommes interrogés et nous avons cherché des idées. Le plus librement possible. Et en voilà une qui a émergé : Et si nous mettions en place un temps de « recherche de sens », qui permette de revenir sur ce qui nous amène à nous rendre à l’école pendant tant d’années, afin de remettre la quête du savoir au centre de toute chose. En effet, presque jamais au cours de la scolarité, nous nous interrogeons sur le pourquoi des apprentissages.
Nous pourrions consacrer un temps quotidien de « recherche de sens » qui pourrait se diviser en quatre thématiques : la langue, les mathématiques, le monde, l’humain. Chacune sur une semaine. En s’appuyant bien sûr sur ce qui se passe dans les activités de la classe au moment de cette « recherche de sens ». Et puis, ensuite, nous repartirions sur le premier thème.
Nous commencerions, chaque lundi pendant 20 minutes, à lancer un remue-méninges autour d’une de ces quatre thématiques et à laisser émerger leurs questions (les premières fois, il faudra sans doute donner des exemples pour leur faire bien saisir l’idée). Et puis tous les autres jours de la semaine, pendant vingt minutes environ, chaque enfant, seul ou à deux, conduirait sa recherche autour d’une des questions qu’il aura choisie. Un peu comme une recherche mathématique (vous en trouverez un exemple ici : http://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/43609).
Par exemple :
– en langue française : « pourquoi met-on des points dans des textes ? », « pourquoi les phrases sont-elles avec des sujets et verbes ? »
– en mathématiques : « pourquoi n’y a-t-il que dix chiffres alors qu’il y a une infinité de nombres ? », « pourquoi a-t-on inventé la règle ? »
– sur le monde, « pourquoi il y a-t-il des arcs-en-ciel ? », « pourquoi il y a-t-il de la poussière ? »
– sur l’humain, « pourquoi il y a-t-il des guerres ? », « pourquoi a-t-on souvent envie d’avoir des enfants ? »….
L’objectif de ce temps de recherche de sens serait avant tout d’ouvrir la curiosité des enfants sur ce que Jacques Levine appelait les secrets de la vie, ceux qui nous donnent envie d’apprendre, de creuser à l’intérieur des savoirs. Nous faisons le pari qu’en mettant les enfants dans ce bain de questionnements, peu à peu, ils se remettront en quête.
En tout cas, moi, Nicolas, je m’engage à tester dans les prochaines semaines cette approche et à vous faire part des premiers enseignements.
Avec vous ?
Nicolas Janod
Chaque mercredi retrouvez « La Classe plaisir » et ses moments précieux…