Né en Segpa, le Rollerfootball, ce jeu non violent est un formidable outil pour intégrer filles et garçons et pour faire reculer la violence chez les adolescents. Il a reçu tous les encouragements possibles des plus hautes autorités de l’Etat comme des maires à la recherche d’activités périscolaires citoyennes. Mais il se heurte aussi depuis sa création à une rare inertie administrative.
Le Rollerfootball un sport qui renonce à la violence
« Le Rollerfootball » ce n’est pas du foot sur roller, prévient d’emblée Christian Lefèvre, son inventeur. Au contraire , C Lefèvre a voulu rompre avec l’évolution du football vers la violence. Au Rollerfootball c’est comme à la boxe française : pas touche ! L’activité est dans la retenue, la maitrise, le respect des règles. On ne joue pas un match mais « une rencontre ». Elle commence par la lecture du « serment de bonne conduite ». On joue protégé avec un ballon spécial qui ne peut pas blesser malgré la vitesse des rollers. Car bien sur on pousse un ballon vers un but comme au foot. Et on est bien sur des rollers. Mais il y a interdiction stricte de tacler et même de toucher l’équipe adverse. Interdiction aussi de taper le ballon dans la zone de but. Pour gagner al partie il ne suffit pas d’avoir le plus grand nombre de but. Il faut en plus avoir le moins de top (c’est à dire de faute). Et la faute commence au premier mot ordurier… Le jeu refuse les injonctions normatives de la « gagne » et de la violence.
Si ça marche c’est justement déjà du fait de ces règles. Jouer au Rollerfootball impose le dialogue et la coopération. L’autre trouvaille ce sont les rollers. Ils permettent une décentration des jeunes joueurs qui doivent d’abord s’acclimater à cette situation inhabituelle. Le jeu dépayse pas le changement de position dans l’espace, par les nouvelles règle et enfin par la mixité obligatoire. La règle des équipes mixtes est apparue comme une évidence sur le terrain lors d’une rencontre à Besançon. Au Rollerfootball, les garçons « consacrent déjà beaucoup d’énergie à réguler leur agressivité et à jouer autrement qu’au football », explique C Lefèvre. « Pendant ce temps là les fille se faufilent vers les buts. Elles ne sont pas désavantages dans ce jeu ».
Quand la bonne idée rencontre l’administration…
Créé en 2000 par Christian Lefèvre, le RollerFootBall (RFB) est resté plusieurs années comme une pratique d’école et de quartier. C’est à partir de 2005 que son destin change. Il est testé officiellement au lycée Voltaire à Paris et utilisé dans un projet pluridisciplinaire au collège Eluard à Bonneuil. Surtout, suite aux émeutes de 2005, le RFB est repéré comme un outil pour les éducateurs de rue. Il intéresse à côté de l’éducation nationale les services de la Ville et l’Agence de cohésion sociale (Acsé). En 2006 le RFB entre dans le catalogue officiel des Activités Sportives de l’Ufolep. Le 18 juillet 2007 un arrêté interministériel, publié au J.O. du 4 août 2007, décide du détachement d’un directeur de développement pour donner une dimension nationale au RFB. Depuis silence radio ! L’association RFB a beau avoir été invitée à l’Elysée pour accompagner le discours présidentiel sur le plan banlieue, une fois les caméras parties aucune aide concrète n’est apportée à l’association. Elle a été dotée par décret d’un détachement, qu’aucun ministère n’a eu envie de financer. Pire le RFB attend toujours son agrément Jeunesse et sports. L’Education nationale ne lui marque pas plus d’intérêt alors que le RFB a reçu le Prix de l’innovation éducative et le Prix Femmes Sports Filles Cités en 2008.
Un regard bienveillant sur les jeunes
C’est que Christian Lefèvre n’est pas du sérail ni sportif, ni éducation nationale. Ce qui le motive c’est le souvenir des « moments magiques » ceux où il voyait changer les enfants placés qu’élevait sa mère. Tout à coup les « enfants sauvages » s’humanisaient. C’est la fidélité à cette enfance qui pousse C Lefèvre à continuer à développer le Rollerfootball envers et contre tout. Le RFB, par sa dimension éducative et citoyenne, semble particulièrement convenir aux activités périscolaires. Il est temps de lui donner le coup de pouce dont il a besoin.
François Jarraud