La publication du Livre blanc du Snpden présente les pressions et le sentiment de harcèlement que ressentent les personnels de direction. Ces sentiments sont confirmés par une précédente enquête menée, elle, officiellement par Nadine Esquieu pour la Depp, la direction des études de l’Education nationale en 2013. Elle montrait un fort pessimisme des chefs d’établissement sur l’avenir du système éducatif. Mais aussi l’écart entre métier rêvé et métier réel. Les chefs d’établissement veulent être les pilotes de leur établissement tout en s’affranchissant de la gestion des personnes…
Un large pessimisme
Selon ce « dossier » de 2013, 71% des chefs d’établissement sont pessimistes sur l’avenir du système éducatif. C’est sans doute le principal résultat de cette enquête menée en 2010 par Nadine Esquieu auprès de 500 chefs d’établissement. Les personnels de direction ont le sentiment de travailler plus qu’avant (même ceux qui ont peu d’ancienneté) et de manquer de moyens et de marges d’initiative. Seuls 38% sont satisfaits de leur degré d’autonomie. Ils sont insatisfaits sur leur charge de travail et soumis au stress.
Une perception irréelle de leur rôle
Le Livre blanc comme le « dossier » publié par le ministère en 2013, montrent important entre le métier réel et le métier rêvé. Les chefs d’établissement veulent être des pilotes, ils veulent être responsables du dynamisme de leur établissement. Ce sont les deux premiers traits qui les caractérisent et dans le métier idéal la dimension « pilote » est très majoritaire dans l’enquête de 2013. Dans celle du Snpden les personnels de direction se voient également en pilotes. En même temps il refusent d’être responsables de la gestion des ressources humaines et n’ont pas d’intérêt pour la psychologie de l’enfant, affirment les deux études. Si aujourd’hui la coordination pédagogique des enseignants est leur première activité dans le métier idéal ils se voient réfléchir au pilotage et penser la stratégie de leur établissement. C’est donc plus une dimension intellectuelle de leur rôle qui les attire que la gestion réelle de l’établissement. Et c’est un peu problématique…
Des profils différents
L’enquête ministérielle avait fait apparaitre des profils différents de chefs d’établissement. Globalement ceux qui exercent dans les établissements les moins faciles sont plutôt plus satisfaits de leur rôle. Les plus jeunes , formés sous Chirac et Sarkozy, sont insatisfaits car ils rejettent à la fois la gestion des enseignants et la présidence des conseils dans l’établissement. Ils voudraient consacrer leur temps au projet d’établissement et aux relations avec les inspecteurs d’académie. Ce sont eux qui flottent le plus dans une conception irréelle du métier.
Finalement les deux enquêtes montrent aussi un certain isolement du personnel de direction. Soumis à la fois aux pressions de l’autonomie et du contrôle, ils se retrouvent coincé entre niveaux de pouvoir comme entre des tâches en inflation constante. C’est bien le pilotage qui est à réinventer. On ne peut plus faire reposer la réussite de l’Ecole sur les seules épaules des chefs d’établissement », écrivait Ghislaine Matringe dans un numéro de la revue internationale d’éducation de Sèvres.
François Jarraud